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Plus de 14 000 migrants qui allaient vers les États-Unis ont rebroussé chemin

Ce phénomène, connu sous le nom de «flux migratoire inversé», est en grande partie constitué de migrants vénézuéliens.

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11b1831e8d6c50bf4f1aa7adec0b95b3a62c61946c7a4b447ae5f0f0c1a7388c.jpg Luis Sanchez, au centre, est assis avec d'autres migrants vénézuéliens à bord d'un bateau qui quitte la côte caribéenne du Panama, le 23 février 2025. Après avoir perdu espoir de rentrer aux États-Unis, ces migrants repartent vers le sud. (Photo AP/Matias Delacroix, archive)

Plus de 14 000 migrants, principalement vénézuéliens, qui espéraient rejoindre les États-Unis ont fait demi-tour et sont partis vers le sud depuis le début de la répression migratoire du président américain Donald Trump, selon un rapport publié vendredi par les gouvernements de Colombie, du Panama et du Costa Rica.

Ce phénomène, connu sous le nom de «flux migratoire inversé», est en grande partie constitué de migrants vénézuéliens qui ont fui les crises économiques, sociales et politiques persistantes de leur pays pour se retrouver confrontés à une politique d'immigration américaine qui n'ouvre plus la voie aux demandeurs d'asile.

La migration par le dangereux bouchon du Darién, à la frontière entre la Colombie et le Panama, a atteint un pic en 2023 lorsque plus d'un demi-million de migrants l'ont traversé. Ce flux a quelque peu ralenti en 2024 et s'est presque complètement tari au début de l'année.

Le rapport, publié vendredi avec le soutien du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, indique que la migration vers le nord a chuté de 97 % cette année. Les migrants voyageant vers le sud interrogé au Costa Rica, au Panama et en Colombie par les bureaux des médiateurs de ces pays étaient presque tous vénézuéliens (97 %) et environ la moitié d'entre eux ont déclaré prévoir de retourner au Venezuela, selon le rapport. Presque tous ont indiqué rentrer car ils ne pouvaient plus atteindre légalement les États-Unis.

Depuis 2017, environ 8 millions de personnes ont fui la crise au Venezuela. Pendant des années, ces migrants affluaient vers d'autres pays d'Amérique du Sud, notamment la Colombie, le Pérou, l'Équateur, le Chili et d'autres encore.

La situation a changé en 2021, lorsque des centaines de milliers de personnes ont pris la route des États-Unis, bravant le bouchon du Darién.

Une application mobile du gouvernement américain est devenue le principal moyen d'entrée des demandeurs d'asile aux États-Unis sous l'administration Biden. Des milliers de migrants se sont ensuite retrouvés bloqués au Mexique lorsque le président Trump a mis fin à l'application dès son premier jour de mandat.

Les migrants qui tentaient d'atteindre les États-Unis lorsque M. Trump est entré au pouvoir et a modifié les politiques frontalières ont désormais fait demi-tour pour retourner en Amérique du Sud. Environ un quart des personnes interrogées prévoyaient de se rendre en Colombie, auparavant épicentre de l'émigration en provenance du Venezuela. D'autres ont déclaré ignorer leur destination.

La Colombie et d'autres pays d'Amérique du Sud ont demandé de l'aide auprès de la communauté internationale pour faire face à la crise migratoire pendant des années, avant que nombre de ces migrants ne commencent à migrer vers les États-Unis. Aujourd'hui, les troubles politiques et économiques au Venezuela persistent.

Un retour dangereux

Les migrants, dont la plupart ont traversé pendant des jours le bouchon de Darién pour se diriger vers le nord, sont encore plus vulnérables à leur retour. Ils disposent de moins de fonds pour financer leur voyage et de peu de perspectives d'emploi une fois rentrées. Ils se retrouvent également dans des régions où les groupes criminels sont de plus en plus nombreux à s'en prendre à eux, selon le rapport.

«La plupart de ces personnes sont déjà victimes de violations des droits humains», a indiqué Scott Campbell, représentant des Nations Unies aux droits de l'homme en Colombie, dans un communiqué. «Nous exhortons les autorités à aider les personnes concernées par cette migration inverse afin d'éviter qu'elles ne soient exploitées ou ne tombent dans des réseaux de trafic dirigés par des groupes armés illégaux.» Ce changement marque un renversement radical dans l'un des plus grands mouvements de migrations de masse au monde.

Les migrants voyagent en bus vers le sud, à travers le Mexique et d'autres pays d'Amérique centrale, jusqu'à leur arrivée au centre du Panama. De là, ils paient près de 280 $ US pour embarquer sur des bateaux précaires remplis de passagers et les ramener en Colombie.

Ils empruntent deux itinéraires différents. La plupart font des allers-retours d'île en île au nord du Panama, par la mer des Caraïbes, et débarquent dans la petite ville de Necocli, en Colombie, où beaucoup ont commencé leur voyage.

D'autres voyagent vers le sud par la mer, le long d'une bande de jungles entre le Panama et la Colombie, à travers l'océan Pacifique, où ils sont déposés dans des villages isolés ou dans la ville colombienne de Buenaventura. Le Bureau du Médiateur colombien estime qu'environ 450 personnes ont emprunté cette route périlleuse.

La région est l'une des plus violentes de Colombie, et l'absence de présence de l'État est comblée par des groupes armés en guerre.