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Moldavie: le parti pro-européen mène le scrutin au terme d'une élection tendue

Il n'est pas encore certain que le parti obtienne la majorité.

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Une femme tient un enfant dans ses bras alors qu'elle vote lors d'une élection parlementaire, à Chisinau, en Moldavie, le dimanche 28 septembre 2025. Une femme tient un enfant dans ses bras alors qu'elle vote lors d'une élection parlementaire, à Chisinau, en Moldavie, le dimanche 28 septembre 2025. (Vadim Ghirda/Associated Press)

Le parti pro-occidental au pouvoir en Moldavie semble bien parti pour dominer le scrutin lors d'élections parlementaires cruciales, éclipsées par des accusations d'ingérence russe. La course a été largement perçue comme un choix géopolitique entre une voie vers l'Union européenne (UE) ou un retour dans le giron de Moscou.

Ce scrutin tendu a opposé le Parti action et solidarité, pro-occidental au pouvoir, qui détient une forte majorité parlementaire depuis 2021, à plusieurs adversaires pro-russes, mais à aucun partenaire pro-européen viable. Il n'est pas encore certain que le parti obtienne la majorité.

Avec environ 75 % des bulletins de vote dépouillés, les données électorales officielles ont montré que le Parti action et solidarité, pro-UE, était en tête avec 44,3 % des voix, tandis que le Bloc électoral patriotique, pro-russe, en recueillait 27,7 %. Le Bloc alternativa, pro-russe lui aussi, a obtenu 8,5 % des voix et le parti populiste À nous, qui prône une «politique étrangère équilibrée» entre l'Est et l'Ouest, a obtenu 6,5 % des votes et le parti de droite «Démocratie chez nous» a reçu 6 % des voix.

La journée électorale a été marquée par une série d'incidents, allant des alertes à la bombe dans plusieurs bureaux de vote à l'étranger à des cyberattaques contre des infrastructures électorales et gouvernementales, en passant par des électeurs photographiant leurs bulletins de vote et certains transportés illégalement vers les bureaux de vote. La police a également arrêté trois personnes soupçonnées de complot visant à provoquer des troubles après le scrutin.

Ce scrutin crucial élira un nouveau parlement de 101 sièges, à l'issue duquel le président moldave nommera un premier ministre, généralement issu du parti ou du bloc au pouvoir, qui pourra ensuite tenter de former un nouveau gouvernement. Tout gouvernement proposé doit être approuvé par le Parlement.

À la fermeture des bureaux de vote locaux dimanche à 21 h, la Commission électorale centrale a indiqué que plus de 1,59 million de personnes, soit environ 51,9 % des électeurs inscrits, avaient voté, dont 264 000 Moldaves dans des bureaux de vote installés à l'étranger, qui resteront ouverts jusqu'à 19 h dans leurs pays respectifs. Lors des élections législatives de 2021, le taux de participation a légèrement dépassé 48 %.

La Russie aurait tenté de «détourner» le vote

Igor Grosu, chef du Parti d'action et de solidarité, a déclaré après la fermeture des bureaux de vote que «les tentatives de la Russie pour détourner le processus électoral ont été considérables» et que les institutions étatiques ont déployé des efforts pour garantir la sécurité et l'intégrité du scrutin.

«Les conséquences de cette intervention sont difficiles à estimer à ce stade», a-t-il affirmé. «Nous attendons les résultats des élections. Nous prions pour la patience et le calme.»

La Moldavie est enclavée entre l'Ukraine et la Roumanie, membre de l'UE. Ce pays d'environ 2,5 millions d'habitants a suivi ces dernières années un mouvement de conquête de l'Ouest et a obtenu le statut de candidat à l'adhésion à l'UE en 2022, peu après l'invasion russe de l'Ukraine. Les tensions entre la Russie et la Moldavie, république soviétique jusqu'en 1991, ont explosé.

Après avoir déposé son bulletin de vote dimanche, la présidente pro-occidentale moldave, Maia Sandu, a réitéré ses accusations de longue date selon lesquelles la Russie aurait «interféré massivement» dans les élections, affirmant avoir voté «pour maintenir la paix» et que l’avenir de son pays résidait dans l’UE.

Craintes d’ingérence russe présumées de longue date

Quelques jours avant le vote de dimanche, le premier ministre moldave, Dorin Recean, a averti que la Russie dépensait «des centaines de millions» d’euros dans le cadre d’une prétendue guerre hybride pour tenter de s’emparer du pouvoir, qu’il a décrite comme «la bataille finale pour l’avenir de (du) pays».

Les présumées stratégies russes comprennent une opération d’achat de voix à grande échelle, des cyberattaques, un plan visant à inciter à des émeutes de masse autour des élections et une vaste campagne de désinformation en ligne visant à affaiblir le soutien au parti au pouvoir pro-européen et à influencer les électeurs vers des partis proches de Moscou.

Juste avant le scrutin, la police a mené des centaines de raids, arrêtant de nombreuses personnes prétendument formées en Serbie pour provoquer des «émeutes de masse» et déstabiliser le pays à l'approche de cette élection cruciale.

La Russie a nié à plusieurs reprises toute ingérence en Moldavie et a rejeté ces allégations la semaine dernière, les qualifiant d'«antirusses» et affirmant qu'elles étaient «sans fondement».

Mais dimanche, la police moldave a confirmé disposer d'informations concernant des «groupes de personnes» prévoyant de provoquer des troubles à partir de minuit environ et lundi lors d'une manifestation à Chisinau, la capitale du pays, afin de semer le désordre et la déstabilisation.

Igor Dodon, ancien président et membre du Bloc électoral patriotique pro-russe, a appelé à manifester devant le Parlement lundi. Après la fermeture des bureaux de vote, il a affirmé que le parti au pouvoir, pro-occidental, «est désormais pris de panique et envisage divers prétextes, excuses et scénarios allant au-delà de la loi et des normes démocratiques». 

Plusieurs irrégularités le jour du scrutin

Les allégations d'irrégularités lors de la journée de vote en Moldavie ont été nombreuses.

Le ministère moldave des Affaires étrangères rapporte que plusieurs bureaux de vote situés dans différentes villes à l’étranger ont reçu des menaces de bombes, empêchant parfois les électeurs de voter pendant deux heures.

Mme Sandu a indiqué sur Facebook que les autorités avaient également reçu de nombreux signalements d'électeurs transportés illégalement vers des bureaux de vote à l'étranger, «manifestement en échange d'argent», et de cas de retrait de bulletins blancs des bureaux de vote afin qu'ils puissent être «réintroduits après avoir été tamponnés». 

Le Service moldave des technologies de l'information et de la cybersécurité a déclaré que des cyberattaques avaient ciblé l'infrastructure électorale et les services infonuagiques du gouvernement, mais qu'elles avaient été rapidement neutralisées.

Promo-Lex, une organisation non gouvernementale qui surveille le scrutin, a écrit dans un rapport publié quelques heures avant la fermeture des bureaux de vote avoir confirmé plus de 300 incidents, allant de la présence de personnes non autorisées dans les bureaux de vote à de nombreuses personnes photographiant ou filmant leur bulletin de vote.