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Limiter les manifestations propalestiniennes à McGill: la demande rejetée par un juge

L'établissement n'a pas démontré en quoi une injonction permettrait d'apaiser les tensions sur le campus.

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De la peinture a été projetée sur le bâtiment administratif de l'Université McGill après une manifestation. De la peinture a été projetée sur le bâtiment administratif de l'Université McGill après une manifestation. (CTV News)

Un juge de la Cour supérieure du Québec a rejeté la demande de l'Université McGill visant à obtenir une injonction interlocutoire pour empêcher le bruit excessif et l'obstruction de ses bâtiments.

L'Université McGill a également demandé au tribunal d'accorder l'injonction afin d'empêcher l'intimidation, le harcèlement ou les menaces à l'encontre de ses étudiants et de son personnel.

Ce texte est une traduction d'un article de CTV News.

Le juge Patrick Ferland a affirmé que l'établissement n'avait pas prouvé qu'il y aurait un préjudice si l'injonction n'était pas prononcée et que celle-ci permettrait de rétablir une atmosphère paisible sur le campus.

Le document judiciaire indique que McGill a demandé l'injonction à la suite de manifestations sur le campus liées à la guerre à Gaza et visant spécifiquement l'organisation Students for Palestine's Honour and Resistance (SPHR).

L'établissement et le syndicat étudiant ont retiré le nom de McGill à l'organisation en décembre 2023.

L'injonction aurait empêché le SPHR de bloquer indéfiniment les entrées du campus inférieur, de faire du bruit perturbant les cours et de harceler les étudiants et le personnel.

Le Students for Palestine's Honour and Resistance a organisé plusieurs manifestations pour faire pression sur l'administration de McGill afin qu'elle rompe tous ses liens avec les institutions et les entreprises israéliennes, notamment en occupant et en bloquant des bâtiments et en perturbant les cours.

Un campement propalestinien a passé près de trois mois sur la pelouse du campus du centre-ville de l'université au printemps 2024. Deux juges ont rejeté les injonctions provisoires visant à le faire retirer.

Le juge Ferland a noté dans sa décision que, bien que la dernière demande de l'Université McGill ait été soutenue par un groupe d'associations d'étudiants juifs, plusieurs groupes – y compris d'autres groupes d'étudiants juifs et des syndicats de l'université – se sont opposés à l'injonction.

Ils ont fait part de leurs inquiétudes quant à leur capacité à organiser des activités, d'autant plus que les négociations de la convention collective approchent, et ont fait valoir que l'injonction «aurait un effet dissuasif considérable sur la liberté d'expression sur le campus».

L'injonction pourrait s'appliquer à toute personne sur le campus et au-delà, indépendamment de son intention ou de sa motivation. Elle pourrait être utilisée pour empêcher des actions de grève telles que des piquets de grève et toute autre forme de protestation, ont fait valoir les syndicats.

«Bien que la Cour comprenne parfaitement les préoccupations exprimées par de nombreux membres de la communauté McGill, une injonction interlocutoire est une forme exceptionnelle de réparation qui peut restreindre gravement la liberté individuelle et entraîner des conséquences draconiennes», a écrit le juge Ferland dans sa décision.

« Une injonction ne peut se fonder sur des considérations hypothétiques: elle vise à répondre à des violations réelles ou imminentes de droits qui sont susceptibles de causer un préjudice grave ou irréparable et qui ne peuvent être évitées que par l'intervention de la Cour», a-t-il ajouté.

Quatre injonctions provisoires contre le SPHR ont été accordées à l'université au cours de l'année dernière.

Selon le juge Ferland, il n'y a aucune preuve que d'autres manifestations et événements du SPHR étaient susceptibles d'avoir lieu. On ne sait pas non plus qui se cache derrière cette organisation et quelles sont ses intentions.

Le groupe, qui n'est pas une entité juridique, n'a rien publié sur les réseaux sociaux depuis avril 2025 et n'a pas participé à la procédure judiciaire.

Le juge Ferland a ajouté que McGill n'avait pas justifié l'injonction pour lutter contre «l'atmosphère malsaine qui règne actuellement sur le campus».

Il a affirmé que, bien qu'il y ait des preuves de harcèlement et d'intimidation graves, l'Université n'avait pas démontré en quoi une injonction permettrait d'apaiser les tensions sur le campus.

«Cela ne signifie pas que nous nions la gravité des événements illégaux et intolérables qui se sont produits en avril dernier ou au cours des mois qui ont précédé. Ceux-ci ont laissé des blessures profondes et durables chez de nombreux étudiants, enseignants et membres du personnel», a nuancé le juge Ferland.

«Une injonction n'est toutefois pas un remède qui peut être obtenu à titre préventif contre des événements dont la probabilité n'a pas été démontrée. Elle n'est pas non plus destinée à être un message diffusé à l'ensemble de la communauté pour signifier que certains actes ne seront pas tolérés», a-t-il dit dans sa décision.

Le SPHR n'a pas pu être joint immédiatement pour commenter cette décision.

L'Université McGill a fait savoir qu'elle examinerait la décision avant d'envisager d'autres mesures.