La mauvaise gestion et la mauvaise planification contribuent à la détérioration des routes à Montréal, a constaté la vérificatrice générale (VG) de la Ville.
Dans son rapport de 512 pages pour 2024, la VG Andrée Cossette cite les rues de Montréal, tristement célèbres pour leurs nids-de-poule, et souligne des problèmes tels que le manque de capacité à réaliser les travaux routiers, les pannes mécaniques et l'absence de vision claire pour les projets routiers comme facteurs contribuant à un niveau de service inférieur aux attentes des résidents.
«Notre vérification nous amène à conclure que la Ville n’a pas mis en place des mécanismes suffisants pour assurer une gestion efficace de l’entretien et de la maintenance des routes locales et artérielles, afin de les préserver en bon état, conformément aux niveaux de service établis», a écrit Mme Cossette dans son rapport.
On note par exemple qu'alors que la Ville s'était fixée en 2024 de réaliser des travaux de maintien sur 90 kilomètres, des travaux avaient été planifiés sur 123 kilomètres... mais avaient été réalisés sur seulement 46 kilomètres au bout du compte. Un manque de coordination, de capacité de réalisation de l'exécution des travaux, l'augmentation du coût des travaux et la législation des arrondissements, comme les interdictions de travaux de nuit, peuvent expliquer le manque à gagner, peut-on lire dans le rapport.
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Son enquête a également révélé que plusieurs arrondissements sous-utilisent leur budget consacré à la réparation des nids-de-poule, en partie à cause de «pannes répétées de l'équipement», en particulier dans les arrondissements Ahuntsic-Cartierville et Sud-Ouest.
La vérificatrice générale a examiné la question de l'entretien des routes, car celle-ci a été désignée comme la priorité numéro un que la Ville devrait revoir en termes de niveau de service, selon un récent sondage mené auprès des résidents de Montréal.

«L'approche de gestion des actifs de la Ville applicable à ses routes n'est pas suffisamment structurée et ne repose pas sur une vision claire. Cela entrave la mise en œuvre d'une stratégie alignée sur une orientation commune et garantissant des interventions en temps opportun, en particulier l'entretien préventif», indique le rapport.
«De plus, la gestion compartimentée de l'entretien des routes locales et artérielles ne favorise pas une utilisation optimale des ressources, ce qui compromet la durabilité de l'infrastructure routière», a-t-on ajouté.
La vérificatrice générale a formulé un certain nombre de recommandations pour remédier aux problèmes liés aux travaux routiers, notamment en impliquant davantage les arrondissements dans les activités d'entretien des rues et en établissant «des objectifs stratégiques officiels, mesurables et clairement énoncés».
Elle a également recommandé à la Ville de «définir et de mettre en œuvre un programme d'entretien préventif pour le réseau artériel, en précisant une méthodologie pour déterminer les besoins financiers et un calendrier de mise en œuvre, afin que ces routes bénéficient d'un entretien préventif approprié».
Le long rapport de la vérificatrice générale traite également des conclusions relatives à la gestion des équipements de protection individuelle par le Service d'incendie de Montréal, à la gestion des dépenses payées par les cartes d'achat d'entreprise et des dépenses remboursées aux membres du personnel des arrondissements, ainsi qu'à la rémunération des cadres supérieurs, entre autres.
Des recommandations prises «très au sérieux» par la Ville
Dans un point de presse subséquent, la présidente du comité exécutif de la Ville, Émilie Thuillier, a dit prendre acte du rapport et de ses recommandations.
«Notre administration prend l'amélioration de la gestion de la Ville très au sérieux. On s'y engage depuis notre arrivée au pouvoir. Dans le présent mandat, il y a eu d'importantes avancées qui ont été réalisées en matière d'efficacité organisationnelle.»
D'après Mme Thuillier, l'équipe de Projet Montréal a su démontrer «une gestion pragmatique et efficace des services publics», qui ne «délaisse pas les besoins des Montréalais».
Mme Thuillier a aussi tenu à souligner l'ampleur du réseau routier montréalais et que l'administration Plante avait eu un important travail de rattrapage à faire à son arrivée au pouvoir. Elle a par le fait même montré du doigt le manque de proactivité des administrations précédentes quant à l'entretien des différentes infrastructures. «On tente de remonter la pente avec l'ensemble de la population, mais en trouvant un équilibre avec la vitalité commerciale et la vitalité des quartiers et aussi la fluidité dans les rues», a-t-elle affirmé.
Émilie Thuillier est aussi la mairesse de l'arrondissement d'Ahuntsic-Cartierville, qui a été passablement écorché dans le rapport de la VG.
Rapport «accablant», selon Ensemble Montréal
La cheffe d'Ensemble Montréal et candidate à la mairie, Soraya Martinez Ferrada, n'a pas tardé à réagir mardi, qualifiant le rapport «d'accablant».
Mme Martinez Ferrada a noté qu'il s'agissait de la responsabilité de la Ville de s'assurer d'avoir des routes fonctionnelles et adaptées à «l'ensemble des réalités que vivent les Montréalais».
«Quand vous regardez le rapport, les six pires arrondissements sont tous gérés par Projet Montréal», a-t-elle asséné. L'ex-ministre fédérale a aussi décoché une flèche directement à son rival dans la course à la mairie de Montréal Luc Rabouin, critiquant sa gestion du Plateau-Mont-Royal. «Il aurait pu à plusieurs reprises des décisions qui sont, en somme, d'investir dans ses rues locales et il ne l'a pas fait. Encore pire, cette administration, en 2021, a coupé le programme d'aide aux arrondissements qui soutiennent le réseau local de 100 M$.»
D'après Mme Martinez Ferrada, ces décisions démontrent une «incapacité» de Projet Montréal d'investir «là où ça compte».
«On se retrouve avec un rapport qui démontre à quel point cette administration n'a aucun plan d'entretien, aucun plan de planification sur les routes artérielles.»
Les arrondissements gérés par Ensemble Montréal se retrouvent à l'opposé du spectre en matière de gestion, selon la cheffe de la formation politique. «Vous avez une équipe qui sait où il faut investir et où ça compte», a-t-elle martelé.
Pour améliorer la situation, Ensemble Montréal propose de mettre en place une table regroupant les maires de l’ensemble des arrondissements qui se rassemblerait régulièrement .dans le but «d’assurer un meilleur suivi des projets et une prise de décision tenant en compte les réalités locales».



