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Les libéraux préfèrent parler de leur «mandat» plutôt que de possibles concessions

«Jécoute et j'ai écouté tout le monde, mais ce que j'écoute d'abord et avant tout, c'est les Canadiens», a dit le ministre des Finances.

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ee60d11188e84a65055c73183319ff6210de2801162204d242eafac38b148136.jpg Le ministre des Finances, François-Philippe Champagne, s'entretient avec des journalistes à Ottawa, le mercredi 22 octobre 2025. LA PRESSE CANADIENNE/Adrian Wyld (Adrian Wyld / La Presse Canadienne)

Les libéraux de Mark Carney insistent sur leur «mandat fort» quand ils sont appelés à clarifier s'ils sont enclins à faire des concessions pour sécuriser l'appui d'un ou de plusieurs partis d'opposition à leur budget attendu. 

«Moi j'écoute et j'ai écouté tout le monde, mais ce que j'écoute d'abord et avant tout, c'est les Canadiens (qui) nous ont donné un mandat fort», a répondu mercredi le ministre des Finances, François-Philippe Champagne, lorsque questionné sur sa réceptivité aux demandes des partis d'opposition.

Le matin même, le premier ministre rencontrait le chef bloquiste Yves-François Blanchet dans un esprit de «collaboration» pour discuter, entre autres, du budget à être déposé le 4 novembre, a indiqué le bureau de M. Carney.

Il a aussi rencontré, en après-midi, le chef conservateur Pierre Poilievre. Les deux rencontres ne figuraient pas à l'agenda officiel publié par l'équipe de M. Carney et il n'est donc pas clair si celles-ci étaient prévues depuis un certain temps ou non.

Quoi qu'il en soit, le leader parlementaire des libéraux, Steven MacKinnon, a maintenu ses accusations voulant que les partis d'opposition agissent «cavalièrement» et manquent de sérieux en laissant planer qu'ils s'opposeront fort probablement au budget. Il a, une fois de plus, surtout ciblé les conservateurs et bloquistes dans ses reproches.

Le lieutenant politique des libéraux pour le Québec, Steven Guilbeault, a aussi envoyé une volée de bois vert au Bloc québécois.

M. MacKinnon, dont le rôle est de négocier avec les autres partis, a, comme M. Champagne, insisté sur le «mandat» obtenu par les libéraux aux élections du printemps dernier, se gardant, pour sa part, de l'affubler du qualificatif «fort».

«Nous développons le plan pour lequel nous avons acquis un mandat, nous estimons, aux dernières élections. Nous allons proposer ce plan. Nous sommes à un point très crucial pour l’avenir du pays et nous estimons qu'il incombe aux partis d'opposition d’écouter ce plan», a-t-il soutenu lorsque pressé de dire si les libéraux s'affairaient à acquiescer à certaines exigences des conservateurs, bloquistes ou néo-démocrates.

Lorsqu'une journaliste lui a rappelé que les libéraux étaient à la tête d'un gouvernement minoritaire, M. MacKinnon a surtout voulu parler de l'«opinion publique».

«Il y a aussi l’opinion publique, que j’estime très opposée à la tenue de deux élections fédérales dans la même année. Je pense que les Canadiens, oui, ne nous ont pas donné la majorité, mais nous ont donné un mandat pour gouverner, et c’est l’exécution de ce mandat qui va être proposée dans le budget du 4 novembre.»

Son collègue M. Champagne a reconnu que les libéraux doivent chercher un partenaire de danse dans un contexte minoritaire, mais a aussi signalé que son point focal est ailleurs.

«Oui, on va danser avec qui veut danser, mais l'important c'est que les gens, que je peux vous dire que les gens à la maison n'ont pas beaucoup de patience pour la politicaillerie», a-t-il conclu.

«Pleurnichage» et «psychodrame»

Quelques heures après sa rencontre avec M. Carney, M. Blanchet s'est présenté devant les médias pour énumérer, à nouveau, les six exigences «incontournables» pour que sa formation politique appuie le budget dans le cadre du vote de confiance envers le gouvernement qui suivra son dépôt.

Il a soutenu que M. Carney s'était montré «raisonnable» et avait, croit-il,«pris acte» des demandes bloquistes et qu'il n'avait pas versé dans le «psychodrame» exprimé par plusieurs ministres en mêlées de presse.

«Le gouvernement peut nous donner ce qu'on a demandé à l'intérieur de paramètres budgétaires responsables et cesser d'envoyer M. MacKinnon, M. Champagne ou M. Guilbeault pleurnicher dans les corridors du parlement», a dit M. Blanchet, tournant au ridicule la sortie publique de ces derniers.

Questionné à savoir s'il montrerait de la flexibilité si les libéraux acquiescent à certaines choses réclamées, mais pas à la totalité, il a martelé qu'il y a «six demandes» et pas moins.

On y retrouve le versement exigé de 814 millions $ aux Québécois pour égaler la dernière remise sur le carbone qui a été accordée aux habitants d'autres provinces canadiennes puisque la tarification fédérale du carbone y était en vigueur avant sa suspension.

Quant à M. Poilievre, il a aussi été ferme mercredi que les libéraux doivent adopter ses «suggestions» pour pouvoir bénéficier de l'appui de ses troupes.

Le chef conservateur demande notamment que le déficit fédéral passe sous la barre des 42 milliards $, un chiffre qui, selon M. MacKinnon, «il sait inatteignable».

Les demandes conservatrices sont plutôt «raisonnables», a soutenu M. Poilievre, faisant valoir qu'elles sont basées sur des promesses faites précédemment par les libéraux.

Il a indiqué ne pas avoir obtenu d'«engagement» de la part de M. Carney sur les conditions à un appui conservateur, mais il a tout de même qualifié la discussion de «bonne». Comme M. Blanchet, il n'a pas voulu éventer de détails spécifiques, soulignant la nature privée de la conversation.

Émilie Bergeron

Émilie Bergeron

Journaliste