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L’IDEM s’est posé la question car cette situation devrait continuer de se détériorer.
De nombreuses jeunes infirmières quittent la profession avant d’avoir 35 ans, dévoile lundi une publication de l’Institut économique de Montréal (IEDM).
Dans les faits, selon le rapport de l’IEDM, en 2022 au Québec, pour chaque tranche de 100 nouvelles infirmières, 43 quittaient la profession avant d’avoir 35 ans.
Au Canada, cette proportion est de 100 nouvelles entrées pour 40 départs de jeunes infirmières.
Ces chiffres représentent une hausse de 29% pour le Québec et une hausse de 25% pour le Canada par rapport à 2013.
«Cet exode de jeunes infirmières s’est aggravé au cours de la dernière décennie, contribuant ainsi à nos problèmes en matière de soins de santé», estime Emmanuelle B. Faubert, économiste à l’IEDM et co-auteure de la publication.
Cette situation devrait continuer de se détériorer. Selon des chiffres consultés par l’IEDM, d’ici 2030, il est estimé que le Canada manquera 117 600 infirmières dans le réseau.
Qu’est-ce qui pousse une jeune infirmière à mettre fin à sa profession avant le cap de la mi-carrière et bien avant celui de la retraite? L’IDEM s’est posé la question.
Un récent sondage de la Fédération canadienne des syndicats d’infirmières et d’infirmiers (FCSII) [en anglais seulement] citait le manque de contrôle sur leurs horaires de travail – y compris les heures supplémentaires obligatoires —, une rémunération insuffisante, un environnement de travail stressant et le manque de flexibilité comme principales sources de stress en milieu de travail.
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Le sondage de cette année de la FCSII a aussi révélé que neuf infirmières sur dix se disent épuisées et qu’une proportion alarmante de quatre infirmières sur dix, soit 40%, a l’intention de quitter la profession au cours de l’année à venir (sans distinction d’âge).
Les auteurs de la publication de l’IDEM sont donc d’avis, à la lumière de ces chiffres, que la majorité de ces motifs relèvent de conditions de travail défavorables, non pas seulement de la question salariale.
«Une plus grande flexibilité à tous les égards est essentielle pour améliorer la rétention du personnel infirmier au Canada», estime Mme B. Faubert qui précise que le fait d’améliorer la flexibilité pourrait se présenter sous de multiples formes et qu’il pourrait s’agir, par exemple, «d’assouplir les conventions collectives en accordant une plus grande liberté contractuelle à l’infirmière et à son employeur».
Un autre exemple selon Mme B. Faubert serait de favoriser l’autonomie professionnelle des infirmières.
«Les infirmières doivent pouvoir jouir d’une liberté totale leur permettant d’exercer leur profession de la manière qui leur convient et là où elles le souhaitent, qu’il s’agisse d’un poste dans un hôpital public, de travailler à son compte au sein d’une clinique d’infirmières praticiennes ou d’un mandat contractuel auprès d’une agence indépendante», explique-t-elle.
Les auteurs de la publication de l’IEDM sur le départ massif de jeunes infirmières du réseau de la santé publique sont assez catégoriques sur le fait que Québec souhaite abolir le recours aux agences privées dans le secteur de la santé : «Cette politique devrait être abandonnée et les hôpitaux et établissements de santé de la province devraient être autorisés à faire appel à des infirmières indépendantes».
Mme B. Faubert croit que l’abolition du recours aux agences privées dans le domaine public aggravera les chiffres liés aux départs d’infirmières.
«En obligeant les infirmières à retourner dans ce système et en interdisant le travail en agences, nous risquons d’en voir beaucoup plus envisager un changement de carrière», écrit-elle.
Plusieurs des infirmières ayant partagé leur désir de quitter la profession dans le secteur public ont affirmé souhaiter intégrer le secteur privé.
«Pour le personnel infirmier désirant avoir de meilleures conditions de travail, plus de flexibilité et de meilleurs salaires, les agences de placement sont perçues comme une alternative préférable et une dernière étape avant de quitter complètement la profession», explique-t-on dans la publication de l’IEDM.
La Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ) a révélé vendredi dernier les recommandations du conciliateur qui seront présentées aux infirmières et professionnelles en soins membres du regroupement syndical en octobre prochain. Si les travailleuses de la santé approuvent ces recommandations, voilà qui pourrait mettre fin au conflit en cours avec le gouvernement Legault.
Le conciliateur impliqué dans les négociations entre les membres de la FIQ et Québec pour une nouvelle convention collective a pris position sur les questions des heures supplémentaires, des primes, des mesures incitatives pour périodes critiques – soit à l’été et pendant le temps des Fêtes –, du rattrapage des chirurgies, de la formation du salaire des candidates à la profession d’infirmière et – surtout – des notions de centre d’activités et de poste.
C’est cette dernière question qui était au cœur des préoccupations des membres dans les derniers développements du conflit de travail, dans le cadre duquel les 80 000 infirmières, infirmières auxiliaires, inhalothérapeutes et perfusionnistes cliniques sont sans convention collective depuis le 31 mars 2023.