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«L'objectif de mettre fin aux agences demeure le même, mais la situation ne le permet pas actuellement.»
Québec devait mettre fin au recours des agences privées en santé dans les grands centres de la province à compter d’octobre 2024. Le ministère de la Santé reporte cette échéance à mars 2025.
Ce report annoncé par le ministre Christian Dubé jeudi concerne Montréal, Laval, la Montérégie, la Capitale-Nationale et Chaudière-Appalaches.
«L'objectif de mettre fin aux agences demeure le même, mais la situation ne le permet pas actuellement», a écrit le ministère de la Santé dans un communiqué.
Pourquoi? Le réseau de la santé ne semble pas prêt à se passer du personnel d’agences en santé. La Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ) a prévenu la semaine dernière qu’on risquait des bris de services dans les hôpitaux si on tentait de respecter la date-butoir. «On crée une crise de par un échéancier qui nous apparaît complètement irréaliste», a déclaré le Dr Serge Legault, vice-président de la FMSQ, dans une publication relayée par la FMSQ sur X.
Initialement, le ministre Dubé avait réagi en refusant de «reculer» sur la date du 20 octobre 2024. Voilà qu’il fait volte-face, «afin d'assurer une saine transition pour les patients, les patientes et le personnel», dit-il, mais le ministère de la Santé rappelle que le recours aux agences privées a son coût.
«En 2022-2023 seulement, 1,5 milliard $ a été versé aux agences privées de placement de personnel et à la main-d'œuvre indépendante», a écrit le ministère dans son communiqué. «À terme, le gouvernement souhaite réinvestir ces montants dans les soins aux patients et aux patientes par les établissements publics.»
Pour les autres régions, la date limite demeure inchangée. La fin du recours aux agences privées est établie au 18 octobre 2026 pour le Bas-Saint-Laurent, l'Outaouais, l'Abitibi-Témiscamingue, la Côte-Nord, le Nord-du-Québec, la Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine et le Nunavik.
L'échéance est le 19 octobre 2025 pour le Saguenay-Lac-Saint-Jean, la Mauricie et le Centre-du-Québec ainsi que l'Estrie, Lanaudière et les Laurentides.
Par ailleurs, les milieux de vie bénéficieront également d'un assouplissement. Ces types d'établissements "doivent avoir des seuils minimaux de personnel en place et dépendent plus fortement de la main-d'œuvre indépendante". Pour leur donner un peu plus de temps, le gouvernement reporte la date de l'interdiction du recours aux agences privées du 20 octobre 2024 au 19 octobre 2025 (pour les territoires urbains). Cela touche les établissements privés conventionnés et non conventionnés, les résidences privées pour aînés et les résidences intermédiaires situées en territoire urbain.
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Jusqu’ici, environ 3800 personnes en provenance des agences privées ont été embauchées dans le réseau public cette année. Il en faut 5000.
Le niveau de soins de santé dans certaines régions inquiète à l’heure actuelle. Des coupures de services ont eu lieu en Côte-Nord et dans d’autres régions dans les derniers mois. Dans une lettre dont ont d'abord fait état La Presse et TVA, dix médecins ont souligné que le personnel est essoufflé par la situation qui perdure dans la région de la Côte-Nord depuis bientôt trois mois.
«Cette crise doit être jugulée avant que des citoyens paient par leur vie le prix de décisions politiques trop précipitées. Il faut que le ministre de la Santé rétablisse des conditions de rémunération qui permettent au CISSS de signer des contrats avec la main-d’œuvre indépendante de façon urgente en l’absence d’une autre solution immédiate», pouvait-on lire dans la missive.
Dans les circonstances, Québec solidaire (QS) a, de façon détournée, salué que le gouvernement Legault se ravise dans cette situation. «C'était le choix inévitable après l'été de découverture que nos hôpitaux ont vécu», a commenté le porte-parole solidaire en santé, Vincent Marissal, dans un communiqué. «On fonçait dans le mur parce que le ministre a mal géré ce virage.»
Ceci dit, c'est là un «constat d'échec», selon Marissal, et que «Québec ne peut pas reculer indéfiniment devant le privé qui prend de plus en plus de place dans notre réseau».
Joël Arseneau, porte-parole du Parti québécois en matière de santé et député Îles-de-la-Madeleine, a déploré le manque de considération pour les autres régions.
«Ce recul face aux agences était prévisible, mais ne fait que repousser le problème. Encore une fois, le ministre s'occupe des grands centres, mais ne fait rien pour les régions éloignées comme la Côte-Nord où son équipe volante n'est toujours pas déployée», a-t-il déclaré sur X.
Avec de l'Information d'Audrey Bonaque pour Noovo Info et de Katrine Desautels pour La Presse canadienne.