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Les dépenses de fonctionnement d'Ottawa creusent les déficits, selon le DPB

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015d72c87176234238664049bd11a85611646ab4c9cdcdb8ea79edcd77060275.jpg Le directeur parlementaire du budget (DPB) prévoit qu'Ottawa dépassera largement les nouveaux repères budgétaires fixés dans le budget fédéral 2025 présenté la semaine dernière. Le directeur parlementaire du budget par intérim, Jason Jacques, attend avant de se présenter devant le Comité sénatorial permanent des banques, du commerce et de l’économie, à Ottawa, le jeudi 2 octobre 2025. (AP Photo)

Le directeur parlementaire du budget prévoit que les libéraux fédéraux maintiendront de justesse la viabilité budgétaire à long terme grâce à leur nouveau budget. Mais les mesures de dépenses quotidiennes signifient qu'Ottawa dépassera largement ses nouveaux repères budgétaires.

Dans une nouvelle analyse du budget publiée vendredi, le DPB par intérim, Jason Jacques, affirme qu'Ottawa devrait enregistrer un déficit moyen de 64,3 milliards $ au cours des cinq prochaines années, soit le double du niveau fixé dans la dernière mise à jour budgétaire du gouvernement fédéral à la fin de 2024.

Le premier ministre Mark Carney a présenté le budget 2025 comme un plan d'investissements «générationnels» visant à affranchir l'économie canadienne de sa dépendance envers les États-Unis en réponse à la guerre commerciale menée par le président américain, Donald Trump.

Malgré les déclarations de M.Carney concernant le transfert des dépenses publiques vers les investissements en capital plutôt que vers les coûts de fonctionnement, M. Jacques a affirmé que l'aggravation des déficits est due aux nouvelles dépenses quotidiennes liées aux programmes.

M. Jacques a imputé la détérioration du déficit aux 87 milliards $ de nouvelles dépenses de fonctionnement nettes sur cinq ans, ainsi qu'aux 65 milliards $ mis de côté pour les passifs éventuels, tels que les règlements judiciaires, les obligations environnementales ou les provisions fiscales.

Selon la définition des libéraux, les dépenses d'investissement désignent les investissements directs dans des actifs tels que les infrastructures et le logement, ou encore les mesures qui encouragent ces dépenses de la part du secteur privé ou d'autres ordres de gouvernement.

Mais M. Jacques a estimé que la définition du capital donnée par le gouvernement était «trop large», car elle inclut des dépenses de programme telles que les dépenses fiscales liées à l'impôt sur le revenu des sociétés, les crédits d'impôt à l'investissement et les subventions.

Selon les calculs du DPB, les dépenses en capital s'élèveront à 217,3 milliards $ jusqu'en 2030. Cela représente une baisse de 30 %, soit 94 milliards $, par rapport aux prévisions d'Ottawa dans le budget.

Le DPB demande au gouvernement de créer un organisme indépendant composé d'experts chargé de déterminer quelles mesures de dépenses sont considérées comme des dépenses en capital, afin d'éliminer la «subjectivité» des projections du gouvernement.

John Fragos, attaché de presse du ministre fédéral des Finances, François-Philippe Champagne, a rejeté l'argumentation du DPB.

«Bien que nous respections le DPB et le travail qu'il accomplit pour fournir des rapports opportuns aux parlementaires, le rapport en question adopte une vision étroite de la trajectoire de la politique fiscale et économique du Canada, en examinant le budget du Canada de manière isolée, sans tenir compte des considérations à long terme et des répercussions», a-t-il déclaré.

Il a ajouté que le budget se concentrait sur les défis plus larges en matière de croissance et de productivité auxquels le Canada est confronté, et qu'il «conciliait ambition et gouvernance responsable». Il a cité un éditorial publié en début de semaine par l'ancien DPB Kevin Page, qui attribuait à Ottawa de bonnes notes pour sa stratégie et sa relative prudence budgétaire, preuve de la bonne planification financière du gouvernement.

Un problème de définition

À l'approche de la publication du budget le 4 novembre, les libéraux fédéraux ont fixé des repères budgétaires — des critères de référence pour démontrer une gestion financière prudente — afin d'équilibrer le volet opérationnel du budget en trois ans et de maintenir une baisse du ratio entre le déficit et le produit intérieur brut (PIB) sur la période de planification.

M. Jacques a déclaré que le gouvernement fédéral afficherait un excédent d'exploitation dans les années à venir si les mesures annoncées depuis l'énoncé économique de l'automne 2024 étaient supprimées. Il a ajouté qu'il s'attendait désormais à ce que le gouvernement fédéral n'équilibre le volet opérationnel du budget qu'en 2028-2029, soit un an plus tard que le calendrier fixé par le repère budgétaire du gouvernement.

Bien que le budget comprenne une analyse de l'effet de divers scénarios économiques sur les finances fédérales, le DPB a estimé que ces scénarios «n’offrent qu’un éventail limité de chocs économiques possibles».

Le «test de résistance» du budget effectué par le DPB a révélé que le gouvernement n'avait que 7,5 % de chances d'atteindre son objectif budgétaire de réduction du déficit en pourcentage du PIB. Le bureau prévoit également que le gouvernement ne réduira probablement pas son ratio dette/PIB — qui constituait auparavant un ancrage budgétaire pour le gouvernement fédéral — au cours de la période de prévision.

Si l'organisme de surveillance budgétaire tire la sonnette d'alarme quant à la viabilité budgétaire du gouvernement à court terme, les perspectives à long terme du DPB sont quelque peu plus optimistes.

Le rapport de M. Jacques indique que, sur la base d'une légère baisse du ratio dette/PIB prévue au cours des 30 prochaines années, la politique budgétaire du budget de 2025 serait jugée viable à long terme.

Toutefois, le rapport souligne que les budgets des trois dernières années prévoyaient une réduction de la dette en pourcentage du PIB à un rythme beaucoup plus rapide que celui prévu dans le budget 2025.

Le DPB a également déclaré que les projections du dernier budget laisseraient peu de marge de manœuvre pour réduire les recettes ou augmenter les dépenses de programme dans les années à venir tout en maintenant la viabilité budgétaire.

Le budget proposé par les libéraux fera l'objet d'un vote décisif à la Chambre des communes la semaine prochaine.

Craig Lord

Craig Lord

Journaliste