Le porte-parole conservateur en matière de santé, Dan Mazier, a annoncé jeudi qu'il comptait demander une enquête pour déterminer la façon dont l'Agence de la santé publique du Canada (ASPC) a perdu plus de 20 millions $ de produits pharmaceutiques provenant de la réserve nationale d'urgence.
Cette perte a été mentionnée comme un poste budgétaire unique dans les comptes publics de 2025, les états financiers vérifiés du gouvernement fédéral pour l'exercice 2024-2025.
En réponse aux questions de La Presse Canadienne, un porte-parole de l'Agence de la santé publique du Canada a déclaré dans un communiqué que la perte était attribuable à ce que l'agence a qualifié d'«écart de température».
Tard jeudi, l'agence a répondu à d'autres questions, expliquant qu'il y avait eu des fluctuations de température dans certains congélateurs en décembre 2024 et qu'une enquête interne avait révélé que cela était dû à «plusieurs facteurs». Elle a précisé qu'un volume d'un médicament thérapeutique avait été perdu. Le communiqué ne précisait ni le type de médicament thérapeutique concerné, ni la quantité perdue, ni les facteurs ayant contribué à cette perte.
«Bien que l’Agence de la santé publique du Canada ne puisse divulguer aucun autre détail concernant les actifs détenus par la réserve, notamment les types et les volumes, en raison d’enjeux liés à la sécurité nationale, nous pouvons confirmer que les pertes constatées ne compromettent pas la capacité de la réserve à répondre aux crises de santé publique», indiquait le communiqué initial de l’Agence.
L’Agence de la santé publique du Canada a précisé qu’elle dispose d’un système de gestion de la qualité pour prévenir et identifier de tels incidents et «mettre en œuvre des mesures correctives afin d’éviter qu’ils ne se reproduisent».
M. Mazier a proclamé qu’il demanderait une enquête sur les événements survenus au Comité permanent de la santé de la Chambre des communes.
«La perte de 20 millions $ de produits pharmaceutiques provenant de la réserve d’urgence du Canada est choquante et inacceptable, et le fait que les libéraux aient tenté de dissimuler cette information aux Canadiens est encore pire», a dit M. Mazier dans un communiqué écrit. Un porte-parole de la ministre de la Santé, Marjorie Michel, a déclaré qu'elle était au courant d'un «dysfonctionnement technique» à la réserve nationale.
«Bien que cet incident soit regrettable, l'ASPC veille à ce que la réserve soit adéquatement équipée pour remplir sa mission, notamment la protection des vaccins essentiels. La ministre Michel collabore également avec l'agence afin d'éviter qu'un tel incident ne se reproduise», a souligné Guillaume Bertrand dans un courriel.
Dans une déclaration, le chef intérimaire du Nouveau Parti démocratique (NPD), Don Davies, a qualifié cette perte d'«irresponsable» et a ajouté qu'elle révélait des problèmes liés au «plan du gouvernement libéral visant à réduire la capacité du secteur public».
«C'est financièrement inapproprié et cela met en péril la santé publique. Nous exigeons des réponses quant à la façon dont cela s'est produit», a conclu M. Davies.
Historique de la réserve
La réserve nationale est un réseau d’entrepôts répartis dans tout le pays où le gouvernement conserve des fournitures médicales, des vaccins et du matériel d’intervention d’urgence.
Créée pendant la guerre froide, la réserve était initialement destinée à contrer une urgence nucléaire.
Depuis, le système a été adapté pour répondre aux épidémies, notamment le syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) et la COVID-19, aux catastrophes naturelles, comme les ouragans et les inondations, aux attaques bioterroristes et à d’autres situations urgentes.
Elle a fait l’objet d’un examen minutieux au début de la pandémie de COVID-19 après qu’il a été révélé que les stocks d’équipement de protection individuelle qui y étaient entreposés – dont des millions de masques N95 – étaient périmés et n’avaient pas été remplacés des années avant le début de la pandémie.
À l'époque, le Canada et d'autres pays se livraient une concurrence féroce pour acquérir d'importantes quantités de gants, de masques et d'autres équipements, dans un contexte de pénurie mondiale.
Face à la grogne publique, le gouvernement fédéral a entrepris une révision du système de réserves. Cette révision a mené à la publication d'un plan de gestion complet en juillet 2024.
L'examen a mis en évidence que les entrepôts de réserves disposaient d'infrastructures vieillissantes et de systèmes de gestion de l'information obsolètes. En réponse, le gouvernement a loué et modernisé un entrepôt doté d'infrastructures spécialisées pour la gestion du matériel biomédical.
Selon le plan de gestion complet, en 2023, les réserves comprenaient des respirateurs, des appareils de maintien des fonctions vitales, des masques et d'autres équipements de protection individuelle, ainsi que du matériel de diagnostic. Elles contenaient également des mini-cliniques de triage d'urgence, des fournitures comme des génératrices et des couvertures, ainsi que des vaccins et des médicaments.
En 2023, les réserves occupaient 20 entrepôts, soit une superficie totale d'environ 158 000 mètres carrés, contre huit entrepôts en 2019. Pendant la pandémie, la superficie des entrepôts a dépassé les 280 000 mètres carrés.
Le plan de gestion global indiquait également que les stocks avaient commencé à faire don de matériel médical avant leur date de péremption.

