Une importante affaire de trafic de drogue à Montréal pourrait être compromise après qu'il a été révélé que le procureur chargé du dossier avait une relation intime avec l'un des avocats de la défense des coaccusés.
L'affaire découle d'une opération menée par la police provinciale du Québec, qui a annoncé en janvier 2024 qu'elle avait effectué 25 descentes et démantelé un réseau de trafic illicite de cannabis en ligne.
Ce texte est une traduction d’un article de CTV News.
Les perquisitions ont permis l'arrestation de 10 suspects et la saisie de 155 kilogrammes de cannabis en vrac, de plus de 3000 plants de cannabis, de près de 500 000 dollars en espèces et de 18 000 dollars en cryptomonnaie.
Les accusés sont soupçonnés d'avoir effectué 70 000 transactions pour un montant total de 15 millions de dollars par l'intermédiaire d'un réseau illégal ayant des liens avec le crime organisé montréalais.
Les audiences préliminaires sont toujours en cours. Cependant, l'affaire pourrait être rejetée après qu'un membre de l'équipe de la défense a allégué un abus de procédure après avoir appris l'existence d'une relation personnelle entre la procureure de la Couronne Alice Bourbonnais-Rougeau et l'avocat de la défense Mathieu Rondeau-Poissant.

«J'ai paniqué»
La relation personnelle, d'abord rapportée par La Presse, est détaillée dans les documents de la cour, qui montrent qu'en mai 2025, Mme Bourbonnais-Rougeau avait d'abord nié la relation avec l'un des avocats de l'accusé avant de l'admettre par la suite.
«Dans le feu de l'action, j'ai paniqué», a-t-elle déclaré, selon un résumé de ses aveux obtenu par CTV News.
«J'ai menti à [mon supérieur] pour prendre le temps d'en discuter avec d'autres personnes.»
Elle a rapporté que «ce n'était pas malveillant» et s'est rendu compte plus tard qu'elle s'était placée dans une situation de conflit d'intérêts.
La relation a débuté en décembre 2024 et s'est terminée en mai dernier, selon les documents judiciaires. Elle a révélé que «lors de dîners occasionnels, il y a eu quelques cas d'intimité physique».
Certains des accusés prétendent maintenant que cette relation personnelle porterait atteinte à l'équité du procès.
Me Bourbonnais-Rougeau est procureure au Bureau de la grande criminalité et des affaires spéciales, qui traite les «affaires jugées spéciales en raison de leur complexité, de leur portée, de leur sensibilité ou de leur intérêt pour la société».
Pour sa défense, elle a déclaré qu'elle n'avait «jamais divulgué ou reçu d'informations privilégiées» liées à l'affaire de drogue.
Me Bourbonnais-Rougeau et Me Rondeau-Poissant n'ont pas répondu aux demandes de commentaires vendredi.
Dans une requête déposée au tribunal, le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) a indiqué que «étant donné que [Bourbonnais-Rougeau] et [Rondeau-Poissant] ne sont plus impliqués dans l'affaire, il n'y a pas de risque de préjudice à l'intégrité de la justice».
Les audiences sur la demande d'abus de procédure doivent débuter le 20 août.
Opération «Postcure»
Me Rondeau-Poissant a représenté David Keith Bishop, l'un des co-accusés dans l'opération «Postcure» de la SQ. Il est accusé de vente de cannabis à une personne âgée de 18 ans ou plus en vertu de la Loi sur le cannabis, de blanchiment de produits de la criminalité en vertu du Code criminel et de possession en vue d'en faire le trafic en vertu de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances.
Selon la SQ, la police a saisi plusieurs immeubles, comptes bancaires et véhicules d'une valeur d'environ 7 millions de dollars. L'enquête a été menée par le programme Accès-Cannabis, une initiative créée en 2018 et financée par le ministère de la Sécurité publique du Québec, qui réunit la SQ, le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) et plusieurs autres services de police pour lutter contre la contrebande de cannabis dans la province.
L'enquête sur Postcure était «le plus gros dossier sur lequel nous avons travaillé depuis la création d’Accès-Cannabis à la SQ», a déclaré le lieutenant Daniel Mc Coy à l'époque.
L'opération était le fruit d'une collaboration entre la SQ, le SPVM et le Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada (CANAFE).
Ce n'est pas la première fois que Me Bourbonnais-Rougeau a des démêlés avec la justice. Le 19 mai 2023, elle a été reconnue coupable de conduite d'un véhicule à moteur avec les facultés affaiblies par l'alcool et de délit de fuite à la suite d'un incident survenu le 24 avril 2021.
Elle a fait appel de la décision devant la Cour supérieure, qui a confirmé la condamnation l'année dernière. Elle a ensuite fait appel devant la Cour d'appel du Québec, qui n'a pas encore rendu son jugement.


