Ottawa révise ses plans de dépenses de défense de fond en comble, a annoncé jeudi le ministre de la Défense, David McGuinty, alors que le Canada subit la pression de ses alliés pour augmenter ses dépenses à des niveaux jamais vus depuis l'apogée de la Guerre froide.
M. McGuinty a déclaré que le gouvernement fédéral serait très bientôt plus explicite sur ses engagements de dépenses au sein de l'alliance et qu'il ferait des annonces à ce sujet.
«Le Canada réexamine actuellement l'ensemble de ses dépenses de fond en comble», a-t-il indiqué aux journalistes au siège de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN), à Bruxelles.
«Tout récemment, notre premier ministre a annoncé un nouvel effort de 6 milliards $ pour sécuriser notre Arctique, l'Arctique canadien. Nous travaillons donc d'arrache-pied avec nos collègues pour mettre en œuvre une série de changements. Nous aurons beaucoup plus à dire à ce sujet sur le plan financier très prochainement.»
Le ministre canadien est en Belgique pour participer à la réunion des ministres de la Défense de l'OTAN, la dernière grande réunion de l'OTAN avant le sommet des dirigeants, qui aura lieu plus tard ce mois-ci, durant lequel les membres devraient convenir d'augmenter leurs objectifs de dépenses de défense.
Les ministres de la Défense se réunissent pour établir des «objectifs capacitaires», soit des listes de courses détaillant les types d'armes que les 32 pays membres doivent acquérir.
Les listes d'achats prioritaires comprennent des systèmes de défense aérienne et antimissile, de l'artillerie, des munitions et des drones.
«Aujourd'hui, nous décidons des objectifs capacitaires. Ensuite, nous évaluerons nos lacunes, non seulement pour assurer notre défense aujourd'hui, mais aussi dans trois, cinq ou sept ans», a déclaré le secrétaire général de l'OTAN, Mark Rutte.
Le Canada sous pression
Le Canada subit la pression de ses alliés pour porter ses dépenses de défense à 5 % du PIB, soit une hausse de trois points de pourcentage par rapport à l'objectif actuel. Ottawa peine depuis longtemps à respecter le seuil actuel de 2 % et ne consacre actuellement que 1,33 % de son PIB à la défense, selon un récent rapport de l'OTAN. Le rapport annuel du secrétaire général de l'OTAN, publié en avril, indiquait que les dépenses de défense du Canada atteindraient 1,45 % en 2024.
Les dirigeants des pays alliés se réuniront du 24 et 26 juin aux Pays-Bas pour le sommet annuel de l'OTAN, où ils devraient s'entendre sur une augmentation massive de leurs engagements en matière de dépenses de défense, principalement à la demande du président américain, Donald Trump.
Le secrétaire américain à la Défense, Pete Hegseth, a déclaré jeudi, aux portes du siège de l'OTAN, qu'il s'attendait à ce que les pays membres s'entendent sur un objectif de 5 % lors du sommet.
«Pour être une alliance, il faut être plus que des drapeaux, a-t-il dit. Nous sommes ici pour poursuivre le travail entrepris par le président Trump, un engagement à atteindre 5 % pour l'ensemble de l'alliance, ce qui, selon nous, se concrétisera – et doit se concrétiser – d'ici le sommet de La Haye, plus tard ce mois-ci.»
Aucun pays membre n'atteint actuellement le seuil de 5 %, pas même les États-Unis. M. Hegseth n'a répondu à aucune question lorsqu'il s'est adressé aux journalistes à son entrée dans l'édifice.
Le plan présenté lors du sommet engagerait les pays membres à consacrer 3,5 % de leur PIB annuel aux besoins essentiels en matière de défense – comme les avions de chasse et autres armes – et 1,5 % aux secteurs connexes, comme les infrastructures, la cybersécurité et l'industrie.
Selon les données de l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm, le Canada n'a pas consacré l'équivalent de 5 % de son PIB à la défense depuis 1957. La dernière fois qu'il a dépensé 2 % de son PIB, c'était en 1990.
Le gouvernement de l'ancien premier ministre Justin Trudeau a suggéré qu'une fois que le Canada aura acheté jusqu'à 12 nouveaux sous-marins pour remplacer ses sous-marins vieillissants de classe Victoria, il devrait atteindre l'objectif de 2 %. Ottawa compte attribuer un contrat pour la nouvelle flotte de sous-marins d'ici 2028.
L'actuel premier ministre, Mark Carney, a promis, lors de la récente campagne électorale, de devancer l'échéance du Canada pour atteindre le seuil de 2 % de 2032 à 2030, voire plus tôt.
Le ministre McGuinty a déclaré jeudi que le Canada est pleinement conscient de l'évolution du contexte de sécurité mondial et observe l'augmentation des risques géopolitiques.
«Nous ne nous faisons aucune illusion quant à l'ampleur des défis à venir, a-t-il assuré. La guerre brutale et non provoquée de la Russie contre l'Ukraine continue de déstabiliser le paysage sécuritaire mondial. Les ambitions croissantes et le comportement de plus en plus affirmé de la Chine érodent la stabilité dans la région indopacifique. Et les actions déstabilisatrices de régimes comme la Corée du Nord et l'Iran minent l'ordre fondé sur des règles dont nous dépendons tous.»
«Face à ces menaces croissantes, nous devons tous faire davantage. Nous ferons tous davantage», a insisté le ministre de la Défense.
— Avec des informations de l'Associated Press
