Un juge fédéral américain a rejeté mardi la plainte déposée par l'administration Trump contre l'ensemble de la magistrature fédérale du Maryland concernant une ordonnance du juge en chef suspendant l'expulsion immédiate des migrants contestant leur renvoi.
Le juge de district américain Thomas Cullen a accédé à la demande des juges de rejeter l'affaire. Il a affirmé qu'agir autrement «irait à l'encontre d'une jurisprudence accablante, s'écarterait d'une tradition constitutionnelle de longue date et porterait atteinte à l'État de droit».
La Maison-Blanche n'a pas fait de commentaire dans l'immédiat.
Le juge Cullen a été nommé juge fédéral par le président Donald Trump en 2020. Il siège dans le district ouest de Virginie, mais il a été choisi pour superviser l'affaire, car les 15 juges fédéraux du Maryland sont tous accusés, une circonstance très inhabituelle qui reflète la sévérité de l'administration républicaine envers les juges qui ralentissent ou interrompent ses politiques.
Thomas Cullen a exprimé son scepticisme quant à cette action en justice lors d'une audience en août. Il s'est interrogé sur la nécessité pour l'administration Trump de poursuivre tous les juges pour contester l'ordonnance.
L'ordonnance empêche l'administration Trump d'expulser immédiatement tout immigrant demandant le réexamen de sa détention devant le tribunal de district du Maryland. Elle bloque leur expulsion jusqu'à 16 heures le deuxième jour ouvrable suivant le dépôt de leur requête en habeas corpus.
L'ordonnance vise à maintenir les conditions existantes et la compétence potentielle du tribunal, à garantir que les requérants immigrants puissent participer aux procédures judiciaires et avoir accès à des avocats, et à donner au gouvernement «pleinement l'occasion de présenter ses arguments et ses conclusions».
Le ministère de la Justice, qui a déposé la plainte en juin, affirme que cette suspension automatique viole une décision de la Cour suprême et entrave l'autorité du président à faire appliquer les lois sur l'immigration. Le ministère est de plus en plus exaspéré par les décisions bloquant le programme de Donald Trump et a accusé à plusieurs reprises les juges fédéraux d'entraver abusivement ses pouvoirs.
Cette action en justice était une manœuvre juridique extraordinaire, qui a intensifié le conflit entre le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire fédéraux.
Les avocats des juges du Maryland ont soutenu que la plainte visait à limiter le pouvoir du judiciaire d'examiner certaines procédures d'immigration, alors que l'administration Trump poursuit son programme d'expulsions massives.
«Le pouvoir exécutif cherche à intenter une action en justice au nom des États-Unis contre un pouvoir équivalent du gouvernement, a pointé l'avocat Paul Clement, lors de l'audience. Il n'y a vraiment aucun précédent pour cette action.»
Me Clement est un éminent avocat conservateur qui a été solliciteur général sous la présidence républicaine de George W. Bush. Il a énuméré plusieurs autres voies que l'administration aurait pu emprunter pour contester l'ordonnance, comme le dépôt d'un recours individuel en habeas corpus. Les requêtes en habeas corpus permettent aux personnes de contester leur détention par le gouvernement.
L'avocate du ministère de la Justice, Elizabeth Themins Hedges, a déclaré que le gouvernement cherchait simplement à lever un obstacle juridique empêchant une application efficace des lois sur l'immigration.
«Les États-Unis sont plaignants ici, car ils subissent un préjudice», a-t-elle soutenu.
Parmi les juges cités dans la plainte figure Paula Xinis, qui a conclu en mars que l'administration Trump avait illégalement expulsé Kilmar Abrego Garcia vers le Salvador – une affaire qui est rapidement devenue un point de friction dans la répression migratoire de M. Trump. Abrego Garcia a été détenu dans une mégaprison salvadorienne tristement célèbre, où il affirme avoir été battu et torturé.
Donald Trump a dénoncé des décisions judiciaires défavorables et, dans un cas, a demandé la destitution d'un juge fédéral de Washington qui avait ordonné le refoulement d'avions remplis d'immigrants expulsés. En juillet, le ministère de la Justice a déposé une plainte pour mauvaise conduite contre le juge.
