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En un an, le taux de chômage chez les Québécois âgés de 15 à 24 ans a connu une hausse vertigineuse.
En un an, le taux de chômage chez les Québécois âgés de 15 à 24 ans a connu une hausse vertigineuse, passant de 6,8% en juillet 2023 à 13,9% en juillet 2024. Au total, le nombre de jeunes au chômage dans cette tranche d’âge est passé de 31 000 il y a un an à 61 100 aujourd’hui, selon Statistique Canada.
D’après une analyse de données gouvernementales réalisée par Bloomberg News, l’arrivée massive de travailleurs étrangers temporaires sur le marché du travail aurait contribué à cette situation. Le média rapporte que le nombre d’entre eux autorisés à travailler dans les secteurs de l’alimentation et du commerce de détail, deux milieux prisés par les jeunes étudiants, a bondi de 211% entre 2019 et 2023.
«Cette hausse rapide est en partie alimentée par l'augmentation de la demande d'immigration au Canada après l'assouplissement des restrictions de voyage liées à la pandémie», précise Bloomberg News.
Selon Bloomberg News, certains nouveaux arrivants auraient saisi l’opportunité d'appliquer pour des emplois temporaires afin de faciliter l’obtention de leurs résidences permanentes.
En 2023, le Canada a autorisé les employeurs à faire venir au pays environ 240 000 travailleurs dans le cadre du Programme fédéral des travailleurs étrangers temporaires.
«Environ un cinquième de ces postes étaient des emplois les plus courants dans les restaurants et les magasins de détail, tels que les cuisiniers, les préposés aux comptoirs alimentaires et les caissiers», rappelle Bloomberg News.
La semaine dernière, le ministre fédéral de l'Emploi, Randy Boissonnault, a néanmoins annoncé que des changements pourraient être apportés au Programme canadien des travailleurs étrangers temporaires. Dans un communiqué de presse, il a soutenu que celui-ci ne pouvait pas être utilisé «pour éviter d’embaucher des travailleurs talentueux au Canada».
Le ministre a ajouté que le gouvernement envisageait de nouvelles façons de restreindre l'admissibilité au programme, notamment en examinant depuis combien de temps une entreprise est en activité et si elle a des antécédents de licenciements.
Il prévient qu'une surveillance plus rigoureuse sera également mise en place dans les domaines présentant un risque élevé de fraude. Le gouvernement envisage aussi d'augmenter les frais relatifs au traitement «des études d'impact sur le marché du travail» liées au programme.
«J’ai clairement indiqué au cours de la dernière année que les abus et la mauvaise utilisation du Programme des travailleurs étrangers temporaires doivent cesser», écrit le ministre dans le communiqué.
Parallèlement, un rapport international récemment publié indique que le Programme canadien pour les travailleurs étrangers temporaires est un «terreau fertile» pour l’esclavage contemporain.
Le document final d’un rapporteur spécial des Nations unies, qui s’est rendu au Canada l’année dernière, souligne qu’un déséquilibre des pouvoirs empêche les travailleurs d’exercer leurs droits.
Le statut des travailleurs dépend d’un permis de travail fermé propre à un employeur. Si les personnes sont licenciées, elles peuvent recevoir une mesure de renvoi dans leur pays d'origine.
Le rapport indique que les travailleurs sont soumis à un large éventail d’abus et ne sont pas toujours conscients de leurs droits. Il souligne que le gouvernement confie une grande partie de la responsabilité d’informer les travailleurs de leurs droits à l’employeur, «malgré le conflit d’intérêts évident».
Le rapporteur spécial Tomoya Obokata énumère divers problèmes vécus par les travailleurs, tels que le vol de salaire, de longues heures de travail avec des pauses limitées et un équipement de protection individuelle insuffisant. Le rapport fait également état d’allégations de harcèlement et d’exploitation sexuels, ainsi que de violences physiques, émotionnelles et verbales.
M. Obokata a également constaté que les travailleurs ont du mal à accéder aux soins de santé. Dans certains cas, les employeurs ont empêché les gens de se faire soigner, indique le rapport, et certains travailleurs se sont vu refuser le congé nécessaire, ont été encouragés à «prendre des analgésiques ou des remèdes maison à la place» ou ont même été licenciés.
Le rapport note que les règles mises en œuvre en 2022 obligent les employeurs à faire un effort raisonnable pour fournir aux travailleurs un accès aux soins de santé s’ils sont malades ou blessés.
Il souligne également que de nombreux employeurs fournissent un logement à leurs travailleurs, mais que cela peut entraîner une surpopulation, par exemple 20 à 30 personnes partageant une seule salle de bain, illustre-t-il.
Le rapport appelle le Canada à «mettre fin aux accords de migration de main-d’œuvre qui favorisent l’exploitation en créant des situations de dépendance qui lient les travailleurs à leurs employeurs» et dans lesquelles ces derniers contrôlent le logement, les soins de santé et le statut du travailleur.
Le nombre de permis dans le cadre du programme a augmenté de 88 % entre 2019 et 2023, bien qu’Ottawa ait récemment indiqué qu’il prévoyait de réduire le nombre de ces travailleurs au Canada.
Mathis Denis, porte-parole du ministre de l’Emploi Randy Boissonnault, a affirmé que le gouvernement avait augmenté les amendes pour non-conformité des employeurs au programme. Il a ajouté que le gouvernement avait imposé 2,1 millions $ d’amendes pour violation des règles du programme au cours du dernier exercice financier, contre 1,54 million $ l’année précédente.
Il a annoncé que le ministre envisageait d’augmenter les frais pour financer «des activités supplémentaires d’intégrité et de traitement» et qu’il cherchait à mettre en place de nouvelles réglementations concernant l’admissibilité des employeurs.
Avec de l’information de Bloomberg News et de La Presse canadienne.