Société

La Gen Z sur le marché du travail: ambitieuse, mais peu loyale?

Il faudrait plutôt parler «d'ambition non comblée», selon un rapport de Randstad.

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(Envato Elements | milanzeremski)

La Génération Z - aussi appelée simplement Gen Z - arriverait sur le marché du travail avec beaucoup de confiance, d'ambition et de vision claire, mais avec une tendance à changer souvent d'emploi,  selon un récent rapport de Randstad Canada intitulé The Gen Z Workplace Blueprint: Future-Focused, Fast-Moving.

Si 41 % des jeunes Canadiens de la Génération Z (âgés de 12 à 27 ans en 2025) interrogés par Randstad Canada doutent de leur capacité à retrouver un emploi, un sur trois prévoit tout de même quitter son poste actuel d'ici un an. «Déjà, 22 % ont changé d'emploi dans la dernière année — le taux le plus élevé parmi toutes les générations», indique Randstad, groupe mondial de services en ressources humaines.

La durée moyenne d'emploi au cours des cinq dernières années et de 1,1 an pour la Génération Z, selon les données de Randstad alors qu'il s'agit de 1,8 an pour les millénariaux et de 2,9 ans pour les baby-boomers.

Selon Randstad, ces données prouvent «une recherche de progression rapide» chez la Gen Z, «et non un simple "zapping" professionnel». «Ces départs ne reflètent pas un manque de loyauté, mais plutôt une ambition non comblée et une recherche de sens», explique-t-on.

Le rapport de Randstad démontre que parmi ceux qui ont quitté un poste en moins d'un an, les principales raisons invoquées sont le salaire insuffisant (51 %), une mauvaise culture de travail (41 %) et le manque d'opportunités de progression (34 %).

Une réalité au Québec?

Est-ce que l'image des travailleurs et travailleuses de la Génération Z dressée par Randstad Canada correspond à la situation au Québec? Pas à ce jour, estime Annie Boilard, présidente du Réseau Annie RH et autrice du livre Le problème, c’est l’boss (enfin je pense...).

«C’est vrai que la Génération Z bougeait – je le mets au passé – on disait d’eux qu’ils butinaient d’un emploi à l’autre, mais pour moi les chiffres de Randstad représentent la réalité de 2024, première partie de 2025, mais pas celle d'octobre 2025», a-t-elle expliqué à Noovo Info.

Mme Boilard explique que le taux de chômage au Canada pour les jeunes de 14 à 25 ans est de 14%, un taux de chômage «très élevé».

«Plus le taux de chômage augmente, plus c’est difficile de trouver un boulot et je pense que c’est logique d’imaginer que les gens vont être un peu plus fidèles à leur employeur [...]» a souligné Mme Boilard en précisant que la pression liée à la pénurie de main-d'oeuvre n'était plus aussi forte. 

«Il y a à peine deux ans, on était en pénurie de main-d’œuvre, on s’arrachait les cheveux sur la tête pour recruter les talents, mais maintenant la situation est différente», a-t-elle expliqué en précisant qu'il faut tout nuancer alors que certains postes, métiers ou professions sont encore énormément recherchés selon l'industrie ou encore la région.

Moins de portes d'entrée

L'accès au travail est-il plus difficile pour les jeunes de la Génération Z? Oui pour certains secteurs, si l'on regarde les chiffres concernant les postes d'entrée de carrière (0 à 2 ans d'expérience) affichés à l'échelle mondiale: selon Randstad, ils ont reculé de 29 points depuis janvier 2024, notamment en technologie (-35 %), en logistique (-25 %) et en finance (-24 %).

Annie Boilard a confirmé à Noovo Info que l'entrée au travail était «encore plus difficile en 2025» qu'auparavant pour les jeunes travailleurs et travailleuses. «Il faut redoubler d'ardeur», a-t-elle affirmé.

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Pourquoi? «On ne le sait pas précisément, il y a vraiment plusieurs facteurs», a souligné la présidente du Réseau Annie RH. Elle a notamment cité l’intensification de l’intelligence artificielle dans les entreprises et l’économie «qui est un peu chambranlante». 

Mme Boilard estime que des enjeux de réputation générationnelle pourraient aussi se cacher derrière les difficultés d'accès aux postes d'entrée de carrière pour la Génération Z. «Le fait qu’on disait que la Gen Z était volage, qu’elle butinait d’un emploi à l’autre, qu’elle avait des limitations, des indisponibilités, beaucoup d’attentes envers les employeurs, ça été beaucoup promut, par eux et par les autres, peut-être que la réputation ainsi crée à quelque chose à voir dans l’histoire [...]», a-t-elle partagé à Noovo Info.

Annie Boilard a précisé que les comportements que l'on observait chez les jeunes étaient très cohérents avec la grande ouverture que le marché du travail leur offrait par le passé. «Je pense que les comportements vont évoluer avec un marché du travail un peu plus rigide, un peu plus austère», a-t-elle expliqué.

Ce que la Gen Z veut

Pour retenir les jeunes talents, Randstad estime que les employeurs doivent comprendre ce qui compte réellement pour la Gen Z, soit une meilleure rémunération (54%), de meilleurs avantages sociaux (23%) et plus de flexibilité sur les horaires (23%).

Le groupe mondial de services en ressources humaines conseille d'ailleurs notamment aux employeurs de repenser les postes d'entrée de carrière, d'offrir des parcours de progression visibles, d'aligner la culture d'entreprise sur les valeurs et la flexibilité et de collaborer directement avec les jeunes talents.

Pour les jeunes travailleurs de la Génération Z, Randstad conseille de rester proactifs et agiles, de demander des opportunités de croissance tôt, de reconnaître sa valeur, de saisir les occasions de démontrer leur impact et de développer résilience et réseau.

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De son côté, Annie Boilard invite les gens, autant les travailleurs que les employeurs, a faire preuve de lucidité face à l'actuel marché du travail où le pouvoir de sélection et d'embauche se retrouve du côté de l'employeur.

«Je ne pense pas que les jeunes doivent changer, n’importe qui qui se retrouverait dans leur situation, avec énormément d’opportunités d’emplois, aurait fait la même chose, mais l’idée c’est que le marché a changé et n’importe qui, les jeunes comme les moins jeunes, va devoir s’adapter à cette nouvelle réalité du travail», a-t-elle conclu.

Le rapport «The Gen Z Workplace Blueprint: Future-Focused, Fast-Moving» est basé sur un sondage mondial mené après de 11 250 travailleurs — dont 750 au Canada — et sur l'analyse de plus de 126 millions d'offres d'emploi. Il met en lumière la façon dont les jeunes de la Gen Z «transforment les parcours de carrière, les dynamiques de travail et les attentes envers les employeurs».