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«Je ne devrais pas être sous protection dans un pays comme celui-ci», dit le haut-commissaire de l'Inde au Canada

Le haut-commissaire de l'Inde au Canada est également revenu sur les discussions diplomatiques entre le Canada et l'Inde.

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Dinesh Kumar Patnaik, haut-commissaire de la République de l'Inde au Canada, photographié au haut-commissariat de l'Inde à Ottawa, le jeudi 16 octobre 2025. (Spencer Colby/La Presse canadienne)

Alors que l'Inde et le Canada s'efforcent de rétablir leurs relations, le nouveau haut-commissaire de l'Inde au Canada rejette les allégations — formulées à la fois par la GRC et l'ancien premier ministre Justin Trudeau — qui liaient des diplomates indiens à des homicides et des extorsions dans ce pays.

Au contraire, le haut-commissaire Dinesh Patnaik affirme que les nouvelles discussions entre les deux pays se sont concentrées sur «l'ensemble de la situation sécuritaire», qui, selon lui, inclut le mouvement séparatiste sikh.

Ce texte est une traduction d'un contenu de CTV News

«Nous discutons actuellement des différents scénarios sécuritaires qui se produisent dans ce pays», a indiqué M. Patnaik lors d'une entrevue exclusive qui sera diffusée dimanche dans l'émission Question Period sur CTV.

«Des scénarios sécuritaires dans lesquels un groupe de personnes sème la terreur et prend les relations en otage», a-t-il affirmé. «Comment réagir face à eux? Comment gérer la situation en matière d'ordre public?». 

Le premier ministre indien Narendra Modi et son gouvernement condamnent depuis longtemps le mouvement pro-Khalistan, qui soutient la création d'un État sikh indépendant en Inde, et critiquent le Canada pour ne pas s'opposer au séparatisme sikh à l'intérieur de ses propres frontières.

En 2023, Trudeau a réfuté ces accusations.

«Ils ont tort», a-t-il dit  à l'époque. «Le Canada a toujours pris très au sérieux la violence et les menaces de violence. Nous avons toujours pris des mesures sérieuses contre le terrorisme, et nous continuerons à le faire.»

S'adressant à l'animatrice et journaliste Vassy Kapelos, M. Patnaik a longuement parlé des «discussions plus larges», qui, selon lui, concernent la sécurité des Canadiens en Inde.

«Le Canada ne peut pas considérer cette situation comme un problème indien. C'est un problème canadien. Ce sont des Canadiens qui créent ce problème», a soutenu M. Patnaik.

«Je trouve étrange qu'un haut-commissaire ici doive être sous protection», a-t-il également exprimé. «Je suis sous protection. Je ne devrais pas être sous protection dans un pays comme celui-ci.»

Au début de la semaine, la ministre des Affaires étrangères, Anita Anand, a rencontré M. Modi en Inde. À l'issue de cette rencontre, les deux pays ont signé une déclaration décrivant les domaines dans lesquels ils souhaitent coopérer, notamment le commerce et l'intelligence artificielle.

Interrogée mardi par les journalistes sur ce qu'elle avait dit à M. Modi au sujet des attaques contre la communauté sikhe au Canada, Mme Anand a répondu que «les questions de sécurité publique sont la priorité absolue du gouvernement canadien».

«J'ai soulevé tous les points relatifs à la répression transnationale, à la sécurité de chaque citoyen canadien et à l'importance d'une enquête judiciaire indépendante qui doit toujours enquêter sur les crimes commis sur le sol canadien», a insisté Mme Anand.

À la suite des réunions de Mme Anand en Inde, la Fédération sikhe du Canada a affirmé que la sécurité des sikhs à travers le Canada «était utilisée comme monnaie d'échange».

«Renforcer les liens économiques et diplomatiques alors que les militants sikhs continuent de faire l'objet de menaces de la part d'agents indiens n'est pas une diplomatie responsable, c'est une incitation à de nouveaux abus et une recette pour la déstabilisation de l'Asie du Sud», a écrit le président de la Fédération, Moninder Singh, dans un communiqué.

Le haut-commissaire qualifie ces allégations d'«absurdes»

Les relations entre le Canada et l'Inde sont tendues depuis 2023, lorsque Trudeau a affirmé qu'il existait des «allégations crédibles» selon lesquelles des agents du gouvernement indien étaient impliqués dans l'assassinat du leader sikh canadien Hardeep Singh Nijjar plus tôt cette année-là.

Un an plus tard, la GRC et le gouvernement fédéral ont accusé des diplomates et des fonctionnaires consulaires indiens basés au Canada de se livrer à des activités clandestines liées à des activités criminelles graves dans ce pays, notamment des homicides et des extorsions.

En réponse à ces allégations, le Canada a expulsé six diplomates, dont l'ancien haut-commissaire Sanjay Kumar Verma, tandis que l'Inde a expulsé six diplomates canadiens en représailles.

L'Inde a nié toute implication, et les responsables canadiens ont précédemment déclaré que l'Inde avait refusé de coopérer à l'enquête.

Mais en juin, le commissaire de la GRC, Mike Duheme, a qualifié les discussions en cours avec les responsables indiens de «bonnes» et «positives».

La conseillère à la sécurité nationale et au renseignement, Nathalie Drouin, a quant à elle rencontré son homologue indien en Inde le mois dernier, au cours de laquelle « les préoccupations respectives en matière de sécurité » ont été discutées, selon un communiqué.

Interrogé directement par Mme Kapelos sur la coopération de l'Inde dans le cadre d'une enquête, M. Patnaik a reconnu que les responsables de la sécurité étaient «en train de rétablir les relations», mais a qualifié les allégations de «grotesques et absurdes» et «sans aucune preuve tangible».

Pressé à nouveau sur ces allégations, M. Patnaik a insisté sur le fait que l'Inde «attend toujours que des preuves lui soient fournies».

Lorsqu'on lui a demandé spécifiquement, sur la base des allégations de la GRC, s'il pouvait garantir aux membres de la communauté sikh qu'ils ne seraient pas pris pour cible à l'avenir, M. Patnaik a répondu « ils ne l'ont jamais été ».

«Nous ne le faisons jamais», a-t-il également déclaré. «L'Inde ne mène jamais d'actions extraterritoriales.»

Dans une autre entrevue qui sera diffusée dimanche dans l'émission Question Period sur le réseau CTV, le ministre de la Sécurité publique, Gary Anandsangaree, n'a pas répondu directement lorsqu'on lui a demandé à plusieurs reprises si le retour des diplomates indiens au Canada représentait un risque pour les Canadiens.

«Nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour assurer la sécurité des Canadiens, mais nous veillerons également à entretenir des relations bilatérales qui nous permettent non seulement d'avoir ces conversations, mais aussi d'instaurer un climat de confiance qui nous permettra de faire avancer les dossiers en suspens depuis un an et demi, deux ans», a soutenu M. Anandasangaree.

M. Anandasangaree a également dit que le Canada devait «veiller à ce que les responsables soient tenus de rendre des comptes» et a souligné que le Canada avait inscrit le gang Bishnoi, une organisation criminelle transnationale opérant principalement depuis l'Inde, sur la liste des entités terroristes au début de l'année.

CTV News a contacté la GRC au sujet des affirmations de M. Patnaik selon lesquelles l'Inde attend toujours des preuves et n'a pas encore reçu de réponse.

CTV News

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