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James Bond intimement lié au Canada, au-delà de son prochain réalisateur

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Une photo de Sir William Stephenson, surnommé «Intrepid», prise en 1954 Une photo de Sir William Stephenson, surnommé «Intrepid», prise en 1954 (Photo AP)

Le prochain film de James Bond aura une touche québécoise, avec la réalisation du cinéaste Denis Villeneuve. Mais les liens du célèbre agent secret britannique avec le Canada remontent à beaucoup plus loin.

Le visionnaire de «Dune» s'apprête à prendre les rênes de la prochaine mouture de 007 pour Amazon MGM Studios, avec sa compatriote et conjointe Tanya Lapointe comme productrice exécutive.

La franchise cinématographique est issue d'un recueil de romans d'espionnage post-Deuxième Guerre mondiale de l'écrivain britannique et ancien officier de marine Ian Fleming, dont les aventures étaient centrées sur un agent anglais suave, amateur de martinis et doté d'une capacité redoutable à éliminer les menaces.

 

Mais en y regardant de plus près, on trouve plusieurs références canadiennes dans les livres et les films. 

En voici 007: 

– 001 «Intrepid»

On dit que James Bond est au moins inspiré en partie de l'espion et héros de guerre canadien Sir William Stephenson, dont les activités clandestines rendent difficile l'établissement de liens définitifs.

Stephenson, un natif de Winnipeg qui est décédé en 1989, était un ami proche de Fleming après leur rencontre à l'école d'espionnage que le Canadien avait fondée à Whitby, en Ontario, appelée «Camp X».

Sir William Stephenson portait le nom de code «Intrepid» pendant sa carrière et ses réalisations rivalisaient avec celles de n'importe quel héros du grand écran: champion de boxe poids léger, as de l'aviation pendant la Première Guerre mondiale, inventeur et entrepreneur millionnaire, conseiller de l'ancien président américain Franklin D. Roosevelt, confident de l'ancien premier ministre britannique Winston Churchill et chef d'une opération d'espionnage britannique élaborée à New York.

Fleming a déclaré s'être inspiré de nombreuses personnes rencontrées tout au long de sa carrière navale en temps de guerre. Mais selon le livre de Dwight Hamilton, «Inside Canadian Intelligence», Fleming décrit James Bond comme «hautement romancé», alors que «le véritable personnage, l’homme qui est devenu l’un des grands agents de la (Deuxième Guerre mondiale), est William Stephenson».

– 002 Les films

Les origines de la franchise remontent au producteur canadien de théâtre et de cinéma Harry Saltzman, qui a coproduit les films jusqu’à ce qu’il vende ses parts à United Artists en 1975.

Saltzman est né à Sherbrooke, au Québec, en 1915 et a fait ses débuts dans l’industrie cinématographique dans les années 1940, selon une nécrologie du «New York Times».

Il a cofondé Eon Productions en Royaume-Uni en 1961 avec Albert R. (Cubby) Broccoli, avec qui il avait acheté les droits cinématographiques des romans de Ian Fleming.

La légende raconte que Saltzman et Broccoli auraient choisi Sean Connery pour incarner la vedette de leur premier film, «Dr. No» (1962), sans même passer d'audition citant sa «beauté sombre et cruelle» comme correspondant parfaitement à la description du héros par Fleming.

Saltzman est décédé en banlieue parisienne en 1994 à l'âge de 78 ans.

– 003 Le méchant

Le premier méchant de James Bond à apparaître à l'écran fut incarné par le Montréalais Joseph Wiseman, dont le rôle du génie maléfique éponyme dans «Dr. No» a contribué à préparer le terrain pour de futurs malfaiteurs excentriques.

Wiseman incarnait le scientifique sino-allemand au tempérament posé Julius No, un maniaque au sang-froid vêtu d'une veste Nehru et doté de prothèses de mains noires; ses vraies mains étant présentées comme le «prix» payé pour des expériences radioactives ratées.

Né en 1918, Wiseman a fait sensation à Broadway en 1949 dans la pièce «Detective Story» de Sidney Kingsley, lançant ainsi une carrière cinématographique marquée par des personnages décalés, selon une nécrologie parue en 2009 dans le «Guardian».

Sa carrière cinématographique comprend «Detective Story» (1951) avec Kirk Douglas, «Viva Zapata!» (1952) avec Marlon Brando et le film canadien «The Apprenticeship of Duddy Kravitz» («L'apprentissage de Duddy Kravitz»), en compagnie de Richard Dreyfuss et de la comédienne québécoise Micheline Lanctôt en 1974. 

À la télévision, il a notamment joué Manny Weisbord dans la série des années 1980 «Crime Story».

– 004 Miss Moneypenny

Parmi les personnages les plus récurrents au cinéma, on retrouve Miss Moneypenny, un rôle relativement mineur, peu développé jusqu'aux films récents, mais néanmoins apprécié des amateurs.

L'actrice canadienne Lois Maxwell a été la première à incarner le personnage de M, la secrétaire du chef des services secrets britanniques et patronne de Bond.

Maxwell, de son vrai nom Lois Ruth Hooker, est née à Kitchener, en Ontario, en 1927. Selon une nécrologie de la CBC, elle a quitté la maison à 15 ans pour s'engager dans l'armée.

Elle a déménagé à Hollywood à 20 ans, décrochant une série de rôles, dont «That Hagen Girl» («Scandale en Floride») avec Shirley Temple et Ronald Reagan.

Mais c'est son rôle dans James Bond qui l'a rendue célèbre. Elle a joué dans 14 longs métrages entre 1962 et 1985, dont «Goldfinger» en 1964 et «Octopussy» en 1983, selon IMDB et le James Bond Wiki.

Maxwell a également joué dans la série télévisée de la CBC «Adventures in Rainbow Country» et, dans les années 1980, a tenu une chronique dans le «Toronto Sun» sous le pseudonyme de Miss Moneypenny.

– 005 La chanson

Il y a une certaine intrigue derrière la chanson «Surrender» de k.d. lang, qui a clôturé le film «Tomorrow Never Dies» («Demain ne meurt jamais») de 1997, dans lequel Pierce Brosnan incarne l'élégant agent.

L'interprète de «Constant Craving» a prêté sa voix à un hymne bien accueilli, coécrit par David Arnold, compositeur de la musique de James Bond, avec David McAlmont et Don Black.

La chanson devait initialement être le thème principal, mais elle a été doublée à la dernière minute par la chanson éponyme de Sheryl Crow. Dans un retour en arrière pour le 25e anniversaire du film en 2022, k.d. lang a confié à Yahoo que ce changement soudain «était extrêmement décevant pour (elle), car (elle) pensait interpréter la chanson d'ouverture».

– 006 Le livre

Le roman de Fleming, «The Spy Who Loved Me», paru en 1962, est narré par une Franco-Canadienne du nom de Vivienne Michel, qui raconte son histoire dans un style différent des précédents.

Dans le livre, qui a été largement critiqué, Bond n'apparaît que passé la moitié du récit. Fleming l'aurait désavoué après sa publication, le qualifiant d'expérience ayant «manifestement très mal tourné».

Lorsqu'il a vendu les droits du film à Saltzman et Broccoli, ils ont été autorisés à utiliser le titre, mais rien d'autre, selon le site web d'Eon Productions, 007.com.

Le tournage du film «The Spy Who Loved Me» («L'Espion qui m'aimait»), sorti en 1977 et mettant en vedette Roger Moore dans le rôle de Bond, a coïncidé avec la vente par Saltzman de sa part dans Eon, et le film est devenu le premier à mentionner Broccoli comme seul producteur.

– 007 L'évasion

«The Spy Who Loved Me» met en scène une course-poursuite à ski rocambolesque. Bond, poursuivi par des agents du KGB, tombe sur une falaise et saute de la montagne, échappant à la mort grâce à un parachute.

La séquence a été partiellement tournée sur l'île de Baffin, où les conditions météorologiques difficiles ont contraint l'équipe à attendre dix jours avant de tenter un saut du mont Asgard, dans le parc national d'Auyuittuq, selon 007.com.

Une fois les nuages dissipés, l'équipe n'avait que 15 minutes pour filmer la cascade.

«Nous étions dans une région désertée, à l'intérieur du cercle polaire arctique, avec un village inuit à environ 48 kilomètres», a relaté John Glen, réalisateur de la deuxième équipe.

«Chaque jour, nous devions nous déplacer en hélicoptère pour installer les pylônes d'escalade afin que l'équipe puisse y monter avec les caméras. Le temps était exécrable.»