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Mais le rapporteur spécial persiste et signe. Il ne bougera pas.
Les partis d'opposition se sont unis mercredi pour que les Communes demandent au rapporteur spécial, David Johnston, de se retirer, mais celui-ci a aussitôt signalé son intention de rester en poste.
«Je respecte profondément le droit de la Chambre des communes d'exprimer son opinion sur mon travail à venir, mais mon mandat émane du gouvernement. J'ai le devoir de poursuivre ce travail jusqu'à la fin de mon mandat», a-t-il signifié dans une déclaration écrite.
JUST IN: Johnston says he isn't going anywhere. pic.twitter.com/yMhkACb0zR
— Rachel Aiello (@rachaiello) May 31, 2023
Moins d'une heure plus tôt, une motion néo-démocrate réclamant son retrait a été adoptée par une majorité d'élus, seuls les libéraux, minoritaires, s'y étant opposés. Selon les résultats annoncés aux Communes, 174 députés ont voté pour et 150, contre.
Le chef du Nouveau Parti démocratique (NPD), Jagmeet Singh, estime que «l'apparence de biais» visant M. Johnston est «si élevée que cela érode le travail» qu'il est chargé de conclure d'ici à octobre.
Il a plaidé avoir eu une approche «prudente» et loin des «attaques personnelles» des autres partis d'opposition. Il a affirmé avoir été convaincu d'un besoin de retrait de l'ex-gouverneur général, «particulièrement» par des révélations voulant que l'avocate Sheila Block, qui a épaulé M. Johnston jusqu'à présent, a donné 7593 $ au Parti libéral du Canada entre 2003 et 2022.
M. Johnston n'a pas répondu directement à cette accusation, qui découle de données rapportées par le groupe Democracy Watch. Il a toutefois déjà démenti des affirmations des chefs conservateur et bloquiste, Pierre Poilievre et Yves-François Blanchet, qui lui reprochent notamment d'être un «ami» du premier ministre.
En présentant son rapport préliminaire, l'ex-gouverneur général avait soutenu qu'il n'avait eu aucun contact direct qui soit amical avec M. Trudeau en 40 ans.
«Lorsque j'ai accepté le mandat de rapporteur spécial indépendant, je l'ai fait en pleine connaissance du fait que le travail qui m'attendait ne serait ni simple ni sans controverse, a-t-il ajouté mercredi. Il s'agit de questions délicates et importantes qui doivent être traitées avec le sérieux qui s'impose.»
Avec la motion adoptée mercredi, la Chambre a également redemandéla tenue d'une enquête publique et indépendante sur l'ingérence étrangère, pour laquelle M. Johnston a exprimé un avis défavorable.
La motion n'est pas contraignante et les libéraux n'ont techniquement pas à s'y plier, mais M. Singh martèle depuis des jours qu'il croit pouvoir les amener à changer leur fusil d'épaule.
«On va continuer de mettre la pression sur (le premier ministre Justin) Trudeau pour qu'il fasse la bonne chose», a réitéré mercredi le chef néo-démocrate, peu de temps avant la tenue du vote sur la motion.
Les libéraux ont toutefois envoyé le signal qu'ils n'ont aucunement l'intention de passer outre la recommandation de M. Johnston ni de désavouer le rapporteur spécial.
En avant-midi, M. Trudeau n'a pas dérogé de son message, rappelant la conclusion du rapporteur spécial et ex-gouverneur général.
«Il pensait au début que oui, peut-être que ce serait la bonne chose (une enquête publique), a découvert et a conclu que non, ça ne l'était pas», a-t-il dit en mêlée de presse.
Il a fait valoir qu'il avait mis entre les mains d'un rapporteur spécial la décision de trancher parce que son gouvernement a «entendu très clairement que les partis d'opposition veulent et voulaient une enquête publique».
Les conservateurs, même s'ils ont appuyé la motion du NPD, reprochent à M. Singh d'avoir ouvert la porte à ce revers parce qu'il n'a pas mis en jeu l'entente qui lie sa formation politique aux libéraux.
«Si le NPD avait vraiment vraiment voulu avoir une enquête publique indépendante sur l'ingérence de Pékin, il n'aurait pas dit d'avance au gouvernement qu'il ne mettrait pas en jeu sa coalition», a lancé le leader adjoint à la Chambre des conservateurs, Luc Berthold, peu de temps après le vote.
À ses côtés, le leader en Chambre des troupes de M. Poilievre, Andrew Scheer, a accusé M. Singh d'«hypocrisie», de «duplicité» et d'«escroquerie».
M. Poilievre, tout comme M. Blanchet, est la cible de toutes les flèches lancées par M. Trudeau dans ce dossier. Les deux chefs de parti refusent de prendre connaissance d'informations sensibles contenues dans une annexe confidentielle qui sous-tendent les conclusions du rapporteur spécial.
«Ce qu'on est en train de voir, c'est que particulièrement l'approche que choisit M. Poilievre et, à un certain niveau, M. Blanchet rend la situation extrêmement toxique et la rendrait quelle que soit la personne qu'on choisirait (à la place de M. Johnston)», a dit le premier ministre avant de se rendre à la réunion hebdomadaire de son caucus.
Semblant piqué au vif, le chef bloquiste a reprisle mot en s'adressant aux médias puisqu'il «semble être à la mode».
«Ce qui est toxique, c'est de cacher de l'information que l'appareil média pourrait transmettre au public parce que le public et les électeurs ont besoin d'information pour faire un vote éclairé lorsqu'arrive l'élection», a-t-il rétorqué.
MM. Blanchet et Poilievre refusent de consulterl'annexe confidentielle du rapport Johnston puisqu'ils estiment que cela les réduirait au silence en raison des exigences de la cote de sécurité dite «très secrète» dont ils devraient se doter. Néanmoins, un député bloquiste et trois élus conservateurs la liront puisqu'ils sont membres du Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement (CPSNR) qui passera en revue le travail du rapporteur spécial.
M. Singh, lui, a accepté de se doter de la cote de sécurité et de prendre connaissance des informations ayant trait à la sécurité nationale.
Avec des informations de Michel Saba, La Presse canadienne