«C'est une vie entière que nous devons vivre sans notre cocotte.»
La famille du bébé de 10 mois qui a été victime d'un homicide involontaire des mains de l'ancienne gardienne Katy Jomphe a exprimé lundi sa tristesse et son incompréhension devant la Cour lors de l'observation sur la peine.
Dans une lettre devant le tribunal et Katy Jomphe elle-même, le père du bébé a affirmé qu'il ne pourra jamais «pardonner l'acte» commis par l'ancienne gardienne en mai 2018 dans une garderie de Sainte-Brigitte-de -Laval. Jomphe, 41 ans, a été déclarée coupable en mai dernier. L'enfant avait été retrouvée inconsciente dans une garderie après avoir été secouée. Victime de lésions cérébrales, son décès est survenu quelques heures plus tard dans un centre hospitalier.
«Katy Jomphe a détruit notre vie […] C'est une vie entière que nous allons devoir vivre sans notre cocotte», at-il ajouté lors de la lecture de son message au palais de justice de Québec. «On a laissé notre fille trois semaines à Katy Jomphe et elle nous l'a enlevée.»
La mère de la petite, submergée par l'émotion, a tenu à raconter la terrible séquence des événements, de l'arrivée de la victime à l'hôpital au décès de celle-ci dans les bras de son père. Lors de son témoignage, elle a affirmé vouloir prendre la parole afin d'expliquer toute la gamme d'émotions à laquelle elle et ses proches ont dû faire face.
«Elle [Katy Jomphe] a fait voler ma famille en éclats», a déclaré la maman éplorée, qui a dû dissimuler les raisons du décès du bambin à son grand frère de 10 ans. Les mots lui ont manqué pour lui expliquer la vérité. Elle a ajouté que son fils avait été privé de son innocence d'enfant.
La mère a été habitée par une «rage incontrôlable» et une tristesse «infinie».
«Je n'oublierai jamais ce moment-là, ça a brisé mon cœur de mère», a-t-elle dit. Le couple de parents endeuillés a traversé des périodes d'épuisement physique, psychologique et émotionnel. «Je n'aurai jamais de conversation avec ma fille. Je ne l'entendrai jamais rire aux éclats. Je ne l'entendrai pas chanter, je ne la verrai pas danser. Je ne la verrai jamais grandir, développer sa personnalité, affirmer ses choix, admirer son caractère. Je ne la verrai jamais entrer à l'école, se faire des amis, se chicaner avec son frère. Je ne la verrai jamais tomber en amour et avoir des enfants.»
Rappelons que les deux parents ont été, à un moment lors de l'enquête, considérés comme suspects dans la mort de leur enfant.
Katy Jomphe a laissé échapper des sanglots lors des témoignages.
Le jeune frère de la victime, qui n'était pas présent dans la salle d'audience, a aussi écrit une lettre que le père a pris soin de lire à la Cour.
Le garçon aurait aimé «pouvoir dire au revoir une dernière fois à ma sœur». Il n'a pas su «comment réagir lors de la mort» de sa sœur, mais s'est depuis «forgé un caractère, entre la douleur et la tristesse».
À son tour, la grand-mère du bambin s'est souvenue de l'instant où sa petite fille était décédée et du hurlement de désespoir que le père de la victime avait poussé à ce moment.
«Je peux vous dire que Katy Jomphe nous a enlevé le droit au bonheur», a-t-elle déclaré.
«Quand votre fils vous appelle et que vous entendez son cri de désespoir parce qu'on vient de débrancher son bébé, qui vient de rendre son dernier souffle dans ses bras, votre coeur s'arrache de votre poitrine.»
La grand-mère souligne également le fait que le processus judiciaire qui s'éternise sur des années lui a apporté beaucoup d'angoisse. «C'est d'une cruauté indescriptible», a-t-elle dit.
Celle-ci exige que la juge Sandra Rioux envoie un message fort à la population pour rappeler que la violence envers les enfants est inacceptable et doit être sévèrement sanctionnée.
La Couronne a demandé à la juge 12 ans de détention en raison de l'impact du geste sur de nombreuses personnes. Le procureur décrit également le caractère colérique, insouciant et égocentrique de la gardienne Katy Jomphe.
La Défense, qui n'a pas encore plaidée, fera ses demandes à la juge, mardi au palais de justice.
Les identités des membres de la famille ont été frappées d'une ordonnance de non-publication.


