C'est à une vraie démonstration de force que s'est livrée l'Alliance syndicale de la construction, mercredi, alors que près de 1000 travailleurs sont venus manifester directement devant des bureaux de l’APCHQ à Anjou, pour marquer la première semaine de grève dans le secteur résidentiel.
Le tout s'est déroulé de manière pacifique, sous le slogan «à travail égal, paye égale» pour illustrer leur principale revendication, à savoir que les 60 000 travailleurs de la construction résidentielle puissent toucher les mêmes augmentations de salaire que les travailleurs de la construction dans les autres secteurs, qui ont tous déjà réglé.
Les travailleurs se sont fait bruyamment entendre: clairons, klaxons, percussion et musique sur haut-parleur à l'appui. L'humour des travailleurs était au rendez-vous dans les pancartes, avec «si tu veux pas me payer, fais-mois pas scier», par exemple.
Plusieurs travailleurs sont arrivés des régions par autobus nolisés; des rues ont dû être fermées, des arrêts d'autobus déplacés, vu l'ampleur de la manifestation.
Après une semaine de grève, ces travailleurs n'ont pas semblé se décourager. Ils ont ovationné le porte-parole de l'Alliance syndicale, Alexandre Ricard, président de la FTQ-Construction.
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«C'est pas vrai qu'on va se faire mettre sur le dos le fardeau de l'augmentation du prix des habitations, ces dernières années. Il y a plusieurs éléments qui font en sorte que les habitations coûtent cher aujourd'hui. On est un simple facteur. C'est pas nous autres qui a fait grimper ces prix-là», a lancé M. Ricard.
«Je vois déferler plein d'entrepreneurs qui attirent des travailleurs (du résidentiel) en leur offrant les conditions du commercial -- la preuve que nos revendications sont justes et raisonnables», a-t-il lancé aux manifestants.
Fait à noter, contrairement à ce qui prévaut dans les autres secteurs d'activité économique, les travailleurs de la construction ne touchent pas d'augmentation de salaire rétroactive à la date d'échéance de la précédente convention collective, lorsque leur convention n'est pas renouvelée à l'échéance. Ils perdent donc de l'argent. Leur convention est échue depuis le 30 avril.
APCHQ et ministre Boulet
L'APCHQ a commenté cette manifestation. «Alors que la date critique du 1er juillet approche, l'Association des professionnels de la construction et de l'habitation du Québec s’impatiente face à l'immobilisme de l’Alliance syndicale et souhaite que les négociations actuelles aboutissent rapidement à une entente», a-t-elle fait savoir.
M. Ricard a répliqué à son tour. «Oui il y a des discussions à la table. Mais il faut que ça avance, Ça n'a pas de bon sens de faire perdurer le temps, parce qu'on n'a pas le droit à la rétroactivité. Pendant ce temps-là, on perd de l'argent. Pendant ce temps-là aussi, on n'a pas de loi anti-briseurs de grève, ce qui est totalement déraisonnable et qui fait des frictions aussi.»
Effectivement, les dispositions anti-briseurs de grève du Code du travail ne s'appliquent pas à l'industrie de la construction.
Interrogé à Québec, le ministre du Travail, Jean Boulet, a réitéré son offre de recourir à l'arbitrage. En vertu de ce processus, un arbitre, qui est un tiers neutre, détermine le contenu de la convention collective et cela met fin au conflit de travail. Toutefois, pour ce faire, les deux parties doivent y consentir. Or, l'APCHQ s'est dite prête à accepter, mais pas l'Alliance syndicale, qui veut négocier elle-même ses conditions de travail.
Le ministre Boulet a lui-même souligné que plusieurs chantiers étaient encore en activité, malgré la grève. «Les travailleurs peuvent continuer à travailler. Des travailleurs sont au travail.»
Il a noté qu'il y avait eu «des événements ici et là où il y a eu des interventions policières», mais le climat s'est calmé.

