Santé

Des médecins critiquent des propos de Danielle Smith sur les bloqueurs de puberté

«(Les bloqueurs de puberté) ne rendent pas une personne infertile ou stérile. C'est faux.»

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8c13dc4085f3d479c571ce190331b3a2f9ce2c956e80481794eea4e9a7a6d70e.jpg La première ministre de l'Alberta, Danielle Smith, lors d'une conférence de presse suivant une rencontre des premiers ministres canadiens à Huntsville, en Ontario, le 24 juillet 2025. (Nathan Denette | La Presse canadienne)

Mercredi, la première ministre de l'Alberta, Danielle Smith, s'est adressée aux opposants d'une loi restreignant les soins de santé aux jeunes transgenres, affirmant qu'ils devaient se renseigner sur la puberté. 

Les médecins albertains ont trouvé ces remarques «condescendantes».

Mme Smith a défendu la loi interdisant aux médecins de prescrire des inhibiteurs de puberté aux moins de 16 ans, affirmant que ces médicaments stérilisent définitivement les enfants.

«Je vous encourage à vous renseigner sur ce qu'est la puberté», a-t-elle lancé aux journalistes présents à Edmonton. «La puberté est le processus par lequel un enfant atteint sa maturité sexuelle et peut donc avoir des enfants. Les bloqueurs de puberté, par définition, interrompent ce processus.»

L'Association médicale de l'Alberta a répliqué, affirmant que Mme Smith devait à son tour mener ses propres recherches.

«(Les bloqueurs de puberté) ne rendent pas une personne infertile ou stérile. C'est faux», a déclaré le Dr Sam Wong, président de la section pédiatrie de l'association.

«Dire qu'ils sont stériles est une exagération flagrante, car on ne dirait jamais qu'un enfant de six ans est stérile parce qu'il ne peut pas avoir d'enfants (…) peut-être que Smith devrait vérifier ses faits (…) être moins condescendante.»

Le Dr Wong s'est dit surpris que la première ministre ait de nouveau affirmé cela mercredi, car elle avait déjà été corrigée. «C'est tellement faux et inapproprié. C'est incroyable qu'elle puisse s'en tirer en disant ça (...) Je ne sais pas d'où elle tire ses informations médicales, mais ce qu'elle affirme est faux.»

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La première ministre a déclaré il y a un an que son gouvernement, le Parti conservateur uni, était prêt à défendre sa loi devant les tribunaux et qu'elle était disposée à utiliser la clause dérogatoire pour passer outre aux droits garantis par la Charte.

Samedi, Mme Smith a indiqué lors d'une émission radiophonique qu'aucune décision n'avait encore été prise concernant le recours à la clause dérogatoire.

«Les bloqueurs de puberté, par définition, interrompent le processus de maturité sexuelle, ce qui signifie que l'on stérilise les enfants, et nous n'allons pas le faire.»

Elle a également été catégorique lundi lorsqu'elle a déclaré à CBC que les bloqueurs de puberté étaient l'équivalent d'une stérilisation.

«Lorsqu'on administre des bloqueurs de puberté à un enfant qui n'a pas encore atteint la puberté, il n'atteint pas sa maturité sexuelle, ce qui signifie qu'il ne peut pas avoir d'enfants. Or, nous sommes d'avis que ces décisions se prennent à l'âge adulte», a-t-elle affirmé.

«Il existe une divergence d'opinions à ce sujet. Et lorsqu'il y a divergence d'opinions, il faut les régler en justice. Mais au final, je crois à la suprématie du Parlement, ce qui signifie que les politiciens ont le dernier mot.»

Effets réversibles

Depuis que Mme Smith a fait part de son intention de recourir à la disposition de dérogation, les médecins et les associations médicales nationales ont expliqué que les bloqueurs de puberté suspendent temporairement les changements biologiques. L'effet est toutefois réversible une fois leur utilisation interrompue.

«Nous les utilisons depuis des décennies, et les personnes qui ont pris des bloqueurs de puberté ont eu des enfants plus tard», a souligné Dr Wong.

Grâce aux soins d'affirmation de genre, a-t-il expliqué, les bloqueurs de puberté peuvent être utilisés par les enfants souffrant de dysmorphie de genre jusqu'à ce qu'ils soient prêts à vivre une puberté biologique ou à suivre une hormonothérapie. Cette thérapie est considérée comme «partiellement réversible», car elle entraîne avec le temps des changements à la fois réversibles et irréversibles.

Les bloqueurs de puberté sont également couramment utilisés dans les cas anormaux de puberté précoce, a précisé le médecin.

La loi albertaine n'interdit pas aux jeunes cisgenres, qui s'identifient au sexe qui leur a été assigné à la naissance, d'utiliser des bloqueurs de puberté ou une hormonothérapie pour traiter des affections telles qu'une puberté précoce ou anormalement précoce.

Neelam Punjani, infirmière et professeure adjointe à l'Université de l'Alberta, a invité la première ministre à se méfier de la diffusion d'informations inexactes, car elles créent de la peur et du stress.

«En tant qu'infirmière travaillant en étroite collaboration avec des enfants, des adolescents et des familles, je reconnais à quel point les conversations autour des bloqueurs de puberté peuvent être confuses et chargées d'émotion et que, trop souvent, la désinformation domine le discours public», a-t-elle raconté. «L'inquiétude la plus courante que nous entendons est l'idée que les bloqueurs de puberté rendent les enfants stériles. Or, c'est faux.»

Elle a déclaré que les bloqueurs de puberté sont essentiels au bien-être mental des jeunes atteints de dysmorphie de genre.

«Leur objectif principal est de donner aux jeunes le temps d'explorer leur identité, d'accéder à des services de thérapie et de prendre les bonnes décisions quant aux prochaines étapes.»

Lisa Johnson

Lisa Johnson

Journaliste

Fakiha Baig

Fakiha Baig

Journaliste