Un groupe de citoyens, mené par les demandeurs Guy Ouellet, Serge Jacques et Louis-Serges Parent, déposent une demande devant la Cour d’appel du Québec afin de faire infirmer la décision du juge Martin Bureau, de la Cour supérieure du Québec, de ne pas autoriser un recours collectif contre la compagnie de chemin de fer du Canadien Pacifique (CP).
La demande, dont Noovo Info a obtenu copie, vise également la compagnie Montréal, Maine et Atlantique (MMA).
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La responsabilité du CP à Lac-Mégantic
Lors du procès, les plaignants ont allégué que le CP avait violé des «obligations statutaires et industrielles très étroites et spécifiques».
Le groupe soutenait que l’entreprise, lorsqu’elle avait connaissance d’une pratique dangereuse sur un chemin de fer d’intérêt local, avait le devoir d’informer l’expéditeur, le destinataire et/ou l’organisme de réglementation, en plus de devoir contacter la direction du chemin de fer dans le but de mettre fin à la pratique dangereuse.
Le groupe alléguait également que le Canadien Pacifique avait aussi le devoir de demander à l'expéditeur des documents justificatifs lorsqu’il savait que la classification d’une matière dangereuse pouvait être incorrecte afin d’étayer ou corriger la situation.
Les demandeurs estiment que «si le CP avait respecté les obligations susmentionnées de l'industrie, le déraillement ne se serait pas produit.»
Erreurs de droit
Le groupe soutient donc que le juge Bureau a commis «des erreurs de principe, ainsi que des erreurs de fait palpables et prépondérantes en refusant de reconnaître les obligations susmentionnées de l'industrie, et de les appliquer au CP.»
Les présumées erreurs soumises à la Cour d’appel du Québec par les demandeurs sont :
- L’appréhension et l'application erronées du critère de comportement d'un chemin de fer raisonnablement prudent en vertu de l'art. 1457» ;
- De rejeter ou ignorer des preuves crédibles que le CP était au courant de la pratique dangereuse de MMA consistant à laisser les trains de pétrole Bakken pendant la nuit, sur la voie ferrée principale, sur une colline au-dessus de la ville de Lac-Mégantic ;
- La mauvaise compréhension et la mauvaise application de la «règle de l'offrant», qui régit la responsabilité des transporteurs qui ont des motifs raisonnables de soupçonner que la cargaison qu'ils transportent est mal classée ;
- De rejeter ou ignorer des preuves crédibles selon lesquelles la direction de MMA a été induite en erreur quant au danger et à la volatilité du pétrole Bakken en raison de sa classification erronée ;
- Le rejet (ou le non-respect) de preuves crédibles selon lesquelles la direction de la MMA n'aurait pas laissé le train sans surveillance sur une pente, sur la ligne principale, si elle avait connu la véritable volatilité du pétrole de Bakken ;
- La mauvaise compréhension et la mauvaise application du concept de causalité, et la conclusion erronée que la seule cause du déraillement était le fait que M. Harding n'ait pas mis suffisamment de freins.
Les demandeurs allèguent que si le juge avait pris en compte les éléments de preuve ci-dessus, «il aurait conclu à juste titre que la faute du CP était le premier maillon de la chaîne de causalité ayant abouti à cette tragédie.»
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Les appelants demandent donc à la Cour d’appel du Québec d’accueillir cette requête et d’annuler l’arrêt des procédures. Il demande aussi au tribunal d’accepter dans son intégralité la demande du 13 janvier 2017 contre tous les défendeurs et déclarer tous les défenseurs responsables des dommages subis par les membres du groupe.
L'animatrice du bulletin Noovo Le Fil Estrie s'est entretenu avec l'avocat responsable du dossier, Me Daniel Larochelle. Voyez l'entrevue dans la vidéo ci-dessous.
Le groupe plaide que si le jugement est maintenu, «cela aura pour effet de perpétuer une culture ferroviaire dépassée qui fait passer le profit avant la sécurité, et de permettre aux chemins de fer de "fermer les yeux" sur les violations évidentes de la sécurité et la non-conformité sur les réseaux de leurs partenaires, au détriment des communautés locales.»

