Gabie Renaud a été tuée. Gabie Renaud a été retrouvée morte dans son appartement en fin de semaine, soit trois semaines après son meurtre. Le suspect, son conjoint, est un homme au lourd passé criminel, qui a démontré à quinze reprises être incapable de respecter les ordres d’un tribunal.
Gabie Renaud est morte. Elle fait partie d’une dizaine de femmes assassinée dans un contexte de violence conjugale, cette année au Québec. Ce peut être davantage, parce qu’il n’existe aucune définition commune et reconnue de ce qu’est un féminicide, et plusieurs sont considérés comme des homicides commises sur des filles et des femmes, avec facteurs aggravants.
Gabie Renaud est morte, et la nouvelle est traitée, encore une fois, comme une nouvelle à part, n’ayant rien à voir avec le monde dans lequel on vit. Sa mort échappe, comme toutes les autres, à une lecture approfondie d’un phénomène social qui cause notre mort, à nous, les femmes.
L’invisibilisation des féminicides par l’absence d’une reconnaissance juridique contribue à une culture d’inégalité sociale permettant la répétition de cette violence.
Ces crimes haineux ne sont pas détachés du reste des inégalités systémiques mettant en péril la sécurité des femmes, mais ils continuent d’être traités comme des faits divers.
Gabie Renaud est morte, mais ce n’est pas de ça dont nos politiciens nous parlent à l’ouverture de la session parlementaire à Québec. On entend les mots «islamistes radicaux» et «identité».
Je repensais à ce message lancé récemment par François Legault: «Il y a une baisse de certaines valeurs québécoises fondamentales comme l’égalité entre les hommes et les femmes. Est-ce que c’est important pour vous l’égalité entre les hommes puis les femmes? Bien il faut s’assurer que ce soit important pour tous ceux qui arrivent à Montréal».
Pour monsieur Legault, les Québécois de souche comme Johnathan Blanchet, le tueur présumé de Gabie Renaud, eux, ont bien assimilé la question de l’égalité.
Gabie Renaud est morte, mais jamais on n’entendra notre premier ministre au salon Rouge parler de culture de domination masculine, de misogynie et de patriarcat. C’est pourtant ce système d’oppression fondé sur la suprématie masculine qui façonne un climat social de haine viscérale à l’égard des femmes.
Si ces meurtres et cette violence ne font pas l’objet d’une conversation sociétale, c’est que collectivement, on refuse de traiter les hommes blancs comme un groupe homogène posant un danger, comme on le fait pourtant si aisément pour d’autres groupes.
Gabie Renaud est morte, mais il n’y a pas de gain politique à faire pour nos politiciens avec ça. C’est que son tueur présumé nous ressemble.
Les victimes de violences conjugales peuvent contacter SOS violence conjugale au 1-800-363-9010 ou via son site internet.

