Des données de l’organisme SOS violence conjugale obtenues par Noovo Info sont troublantes: près de 54 000 demandes d’aide ont été reçues en 2023-2024, ce qui représente près du double du nombre reçu en 2016-2017.
Alors que l’organisme a reçu un peu plus de 16 000 demandes pour de l’hébergement immédiat, il n’a réussi qu’à référer un peu plus de 50% de ces femmes dans des ressources comme des maisons d’hébergement, celles-ci étant débordées.
Voyez le reportage de Marie-Pier Boucher dans la vidéo liée à l’article.
«C’est presque 50% de ces demandes d’hébergement où on a dû demander à la personne de nous rappeler demain ou plus tard. Dans les dernières semaines, on dit non à peu près 17 fois par jour», déplore Claudine Thibaudeau, de SOS Violence conjugale.
C’est que la plupart des maisons d’hébergement roulent à pleine capacité et ne tiennent pas de liste d’attente. À Montréal, le taux de refus pour une place dans une maison d’hébergement de 2e étape, soit un logement de transition sécuritaire, est de 78%.
«On est au-dessus du 100%. Ça veut dire que parfois, dans une maison d’hébergement, peut-être qu’on va avoir neuf places, mais qu’au lieu de neuf femmes, on va avoir 11, 12 femmes, parfois avec des enfants aussi», révèle la coordonnatrice générale de l’Alliance des maisons d’hébergement de 2e étape, Maud Pontel.
Pour Mme Pontel, la situation est extrêmement inquiétante et n’est que la pointe de l’iceberg.
«Il y a énormément de femmes qui n’osent pas encore prendre le téléphone pour appeler et demander de l’aide.»
«Ça a sauvé ma vie et celles de mes enfants»
Shirley a déjà subi de la violence conjugale. Elle ne s’en cache pas, elle ne serait pas là aujourd’hui si elle n’avait pas eu accès aux services d’une maison d’hébergement pour victimes de violence conjugale.
Mais elle rappelle que sa vie aurait pu prendre une autre tournure, si elle n’avait pas pu trouver d’hébergement.
«Je me serais dit que j’étais dans l’erreur, que je n’aurais pas dû appeler, que c’est parce que je vis est normal et je serais retournée au domicile. Jamais je n’aurais rappelé. La violence ne se serait pas arrêtée, ça aurait donné encore plus de puissance à mon ex-conjoint», confie-t-elle.
Shirley appelle d’ailleurs le gouvernement à en faire plus pour les victimes de violence conjugale.
«J’aimerais vraiment que le gouvernement s’assoie et qu’il se pose réellement la question: ‘’Est-ce que je veux continuer de voir le taux de féminicides au Québec augmenter, ou je fais ce qu’il faut pour que ça descende?’’», lance-t-elle.
Une sortie de crise pourrait toutefois se dessiner pour les maisons d’hébergement. Le gouvernement Legault a finalement accepté la semaine dernière de ne plus les considérer comme du logement social, si bien que des appels d’offres ont été lancés pour deux nouvelles maisons dans les Laurentides.
Il y a quelques semaines, on apprenait cependant que la ministre de l’Habitation, France-Élaine Duranceau, avait bloqué des projets destinés aux femmes violentées en raison des coûts liés à leur développement. Elle évoquait alors des projets soumis au gouvernement au prix de 900 000 $ ou 1 million $ par unité.
Les victimes de violences conjugales peuvent contacter SOS violence conjugale au 1-800-363-9010.
Avec de l’information de Julien Denis pour Noovo Info.

