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Les exemples flagrants les plus récents sont probablement les concerts de Blink-182 et de Bruce Springsteen (pour lesquels on pouvait demander des milliers de dollars pour un billet). En fait, depuis 2011, le prix des billets de concert a augmenté de près de 60%, selon le magazine torontois Canadian Business.
En gros, on doit ce gonflement des prix à deux phénomènes: la revente de billets et la tarification dynamique.
Même si les plateformes de revente de billets ne sont plus légales, depuis l’adoption d’une loi à cet effet en 2012 au Québec, certains de ces sites (comme billets.ca et 514-billets) se sont reconvertis en sites de petites annonces, pour échapper aux sanctions. Ils plaident qu’ils ne font que le lien entre des consommateurs qui veulent vendre leur billet et ceux qui veulent en acheter.
Mais en réalité, plusieurs salles de spectacle, comme le Centre des arts Juliette-Lassonde, remarquent qu’à presque tous les spectacles, des rangées de billets sont achetées sur leur site web (par une adresse courriel douteuse), affirme le directeur général et artistique de cette salle de Saint-Hyacinthe, Jean-Sylvain Bourdelais.
Selon lui, la clientèle se fait carrément berner, puisqu’elle paie beaucoup trop cher pour les billets achetés sur des plateformes de revente. «Un billet pour une pièce de théâtre comme Gaz Bar Blues, par exemple, est affiché à 52,50$ chez nous, mais se vend 76$ sur les plateformes de revente», illustre-t-il.
Crédit photo: billets.ca
Depuis le retour des spectacles après la pandémie, l’Association québécoise de l’industrie du disque, du spectacle et de la vidéo (ADISQ) a également remarqué un nombre croissant de billets offerts en revente, confirme sa directrice générale, Eve Paré. «C’est vraiment les annulations et les modifications de dates qui ont mis en lumière ce phénomène, parce que l’information ne se rendait pas toujours bien aux clients», explique-t-elle. «Souvent, le client ne sait même pas qu’il est en train d’acheter un billet sur une plateforme de revente parce que ces plateformes sont très habiles pour se déguiser en véritable billetterie», ajoute-t-elle.
L’ADISQ a d’ailleurs lancé une série de capsules dans lesquelles des artistes invitent le public à rester vigilants, et à acheter leurs billets directement sur le site de l’artiste ou sur celui de la salle de spectacle, et à ne surtout pas chercher sur le moteur de recherche Google, par exemple, «le nom de l’artiste + billets», parce que les plateformes de revente sont très bien référencées, et sont souvent le premier lien affiché.
Mais si les prix pour les concerts d’artistes internationaux gonflent autant, c’est surtout à cause de la tarification dynamique, un phénomène qu’on connaît bien en hôtellerie ou en aviation par exemple, qui fait fluctuer les prix en fonction de l’offre et de la demande. La plateforme officielle de vente de billets pour les spectacles du Centre Bell, Ticketmaster, appelle ces billets «platine officiel».
Crédit photo: Ticketmaster
Au Québec, le cabinet LPC Avocats a déposé il y a environ un mois une demande d’autorisation collective contre Ticketmaster, notamment pour cette raison. «Notre cabinet a poursuivi Ticketmaster dans le cadre de plusieurs actions collectives», explique Me Joey Zukran, de LPC Avocats. «Ils affichent des billets comme étant "platines officiels", et ces mots doivent avoir un sens, mais en réalité, ils n’ont aucun sens, c’est trompeur», ajoute-t-il.
La demanderesse principale dans ce dossier, Valérie Richard, a acheté des billets «platines officiels» pour le concert de P!nk au Centre Bell en novembre prochain, au coût de 355$ chaque. Mais ces places se trouvaient pourtant dans la section 300, au fond du Centre Bell. Quelques heures plus tard, on a annoncé un deuxième concert de P!nk. Valérie Richard a trouvé pour ce deuxième concert des places un peu plus près, mais à un prix similaire. Elle a donc voulu revendre ses premiers billets sur la plateforme certifiée de Ticketmaster, mais leur prix avait chuté. Pourtant, la plateforme impose un prix plancher, ce qui l’empêchait de les vendre, puisque ce prix n’était pas compétitif. Mme Richard, qui n’était pas allée voir un spectacle au Centre Bell depuis longtemps, ne cache pas que cette mauvaise expérience ne lui donne pas nécessairement envie d’y retourner de sitôt… Une chose est sûre, «je mandaterais quelqu’un d’autre pour acheter les billets!» conclut-elle.
La plateforme de vente Ticketmaster (celle par laquelle on doit passer pour acheter des billets pour les spectacles du Centre Bell), ainsi que les plateformes de revente Billets.ca et 514-Billets, n’ont pas répondu à nos demandes d’entrevue.
Voyez le reportage de Camille Laurin-Desjardins dans la vidéo.