Mike Decker, un homme de 64 ans vivant en situation d’itinérance, a perdu la vie dans les derniers jours à Longueuil. Non seulement l’homme est mort dans l’indifférence, mais les causes et les circonstances de sa mort seraient erronées.
Selon plusieurs témoins rencontrés par Noovo Info, dont des gens vivant dans le même campement que M. Decker, la victime a été happée par un véhicule quelques jours avant d’être retrouvée sans vie.
«Il était en bicycle. Il y avait un camion sur la lumière, prêt à virer, et lui [Mike Decker] il a passé. Les paramédicaux l’ont vu revoler dans les airs», a raconté à Noovo Info Alain Leroux, un ami de Mike Decker qui vit aussi en situation d’itinérance.
Les paramédicaux auraient pris soin de l’homme directement sur lieux de l’accident en lui prodiguant les premiers soins, mais selon le Service de police de l’agglomération de Longueuil (SPAL), Mike Decker aurait refusé de se rendre à l’hôpital.
Des amis rencontrés par Noovo Info ont confié que son état de santé s’était toutefois dégradé après les événements.
«Il se tenait le ventre. Pour moi c’était une hémorragie interne», a raconté Pierre, un ami de M. Decker.
C'est malheureusement la deuxième fois cette année que Pierre découvre un mort. «C’est triste de trouver quelqu’un de mort… On est dans la rue, les loyers ne sont plus abordables, on a de la misère à trouver des refuges», a-t-il partagé.
Pierre s'attriste aussi que ces décès passent souvent sous silence. «Il n’ya pas grand monde qui se soucie de ce qu’on vit dans la rue. C’est comme un monde à part.»
Selon des informations transmises par le SPAL, le coroner assigné au décès de Mike Decker n'a pas recommandé d'autopsie et il a déclaré sa mort naturelle. Une conclusion à laquelle ses amis ne croient pas. «C’est impossible», a confié Alain Leroux.
«Ça prendrait des informations un petit peu plus», a renchéri Pierre, qui ignore si son ami a eu droit à des funérailles.
Pierre s’inquiète d'ailleurs de la saison froide qui s’installe.
«On va en perdre d’autres. Malheureusement, ça prend des soins, ça prend de la bouffe, ça prend de la chaleur pour au moins subvenir aux besoins d’un être humain, mettons.»
Changer les règles
Le directeur du refuge La Halte du coin, Pierre Rousseau, estime que les règles pour commander un rapport du coroner ou une autopsie devraient changer étant donné la crise actuelle en matière d’itinérance au Québec.
«Ces normes, il faut les revisiter. Quelqu’un peut mourir d’une cause naturelle au sens légal de la loi ou au sens médical, mais mourir dans une tente, même d’une mort naturelle, ce n’est rien de naturel d’une certaine manière [...]», a-t-il expliqué.
Le Bureau du coroner a répondu à Noovo Info qu'il était «conscient que l’itinérance est un enjeu de société important qui doit être bien documenté».
Cependant, en vertu de cette loi, ce ne sont pas tous les décès de personnes en situation d'itinérance qui sont signalés au coroner, mais seulement ceux qui surviennent dans des circonstances violentes, obscures ou dans un contexte de négligence.
Le Bureau du coroner a également expliqué à Noovo Info que les décès résultant d'une cause naturelle, bien identifiée par le médecin qui constate le décès, n’ont pas à être signalés au coroner, que ce soit pour une personne en situation d’itinérance ou pour toute autre personne.
«Ainsi, les coroners interviennent dans seulement 10% de tous les décès survenus au Québec. Donc, même si des autopsies étaient ordonnées par les coroners dans tous les cas de personne itinérante qui leur sont signalés, cela ne donnerait pas un portrait complet de la situation», précise-t-on.

