Des disciples de la Mission de l’Esprit-Saint contournent encore les règles imposées par le ministère de l’Éducation pour enseigner à leurs enfants.
Noovo Info a pu constater que des dizaines d’élèves se retrouvent dans des classes clandestines au sein d'un mouvement religieux qui valorise le mariage et les grossesses à l'adolescence.
La Mission de l’Esprit-Saint a fait l’objet du documentaire La prison de l’Esprit-Saint présenté sur Crave dans lequel d’ex-membres dénonçaient notamment leur manque d’éducation.
«On ne nous apprenait pas les planètes parce que ça, ça n'existait pas. La Terre est faite en poire, elle n’est pas ronde», avait raconté une ancienne disciple à la journaliste et cheffe d'antenne du bulletin Noovo Info 17, Marie-Christine Bergeron.
Un an après la sortie du documentaire, rien n'a changé. Noovo Info a récemment pu capter des images d'enfants de disciples qui se rendent dans les classes improvisées de la Mission avec leur sac à dos.
Ils ont un horaire, différents enseignants qui sont en fait des parents et ont aussi accès à du transport scolaire. Mais au Ministère, ils sont tous inscrits à l'enseignement à domicile.

Dans ces classes, les élèves n'apprennent pas les mêmes matières enseignées par les écoles publiques. Les jeunes filles se font notamment enseigner que le rôle des femmes ne se résume qu'à enfanter.
Le chef de la faction de Joliette, Eugène Doucet, a d'ailleurs confirmé à Marie-Christine Bergeron en 2020 que l'éducation, particulièrement des filles, n'était pas une priorité et qu'il prône le mariage à l'adolescence. Notons qu'il a lui-même épousé une adolescente alors qu'il avait 42 ans.
«On valorise un mariage jeune, pourquoi pas le valoriser? Je vais le prendre à l'envers, qu'est-ce qu'il y a de si extraordinaire à ça? Deux personnes s'aiment et vivent ensemble.»
Il n’a pas donné suite à notre récente demande d’entrevue.
La Mission d'Eugène Doucet n'est pas inscrite au registre des organisations religieuses. Pourtant, le mouvement tient plusieurs activités de culte tous les vendredis et dimanches au Centre de divertissements Jolodium de Notre-Dame-des-Prairies. Au moins une cinquantaine d'enfants y participent. Le groupe compte également plusieurs adolescents déjà mariés.
Selon Mélanie Gagné, porte-parole de l’organisme Nouvelles Racines, qui offre du soutien aux personnes qui désirent quitter le milieu religieux dans lequel ils ont évolué, il n’est pas rare pour un milieu religieux de retirer les enfants de l’école.
«Ça ne m'étonne pas du tout. C'est une réalité à laquelle je suis au courant, parce qu’à travers Nouvelles Racines, on a quand même plusieurs personnes qui sont sorties de la Mission de l'Esprit-Saint, donc ils nous parlent de cette réalité-là», indique Mme Gagné en entrevue avec Noovo Info.
«J'aimerais voir les choses bouger quand on dénonce une réalité qui est aussi actuelle au Québec», ajoute-t-elle.
En 2019, le premier ministre François Legault disait que la situation était «choquante» et «inacceptable».
«On va prendre les actions qui sont nécessaires pour corriger ça. Mais moi, comme premier ministre du Québec, jamais je n'accepterai qu'il y ait des sectes qui enseignent à nos jeunes filles qu'elles sont juste là pour faire des enfants à partir de l'âge de 14 ans, jamais», avait-il déclaré.
Les années ont passé et le groupe persiste à enseigner ses croyances douteuses en valorisant le mariage de mineures.
Le ministre responsable de la Laïcité, Jean-François Roberge, a refusé notre demande d’entrevue en nous renvoyant à Sonia LeBel, ministre de l’Éducation, qui nous a demandé du temps pour analyser le dossier.
À voir dans la vidéo.

