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Cinq ans plus tard, nous l’avons rencontré pour discuter de ce que cette œuvre marquante avait changé dans sa vie et dans sa carrière.
«Beaucoup de choses! lance-t-il d’entrée de jeu. Désherbage, ç’a été un point tournant dans ma carrière. Avec Mitan en 2013 et Panorama en 2015, j’avais déjà un semblant de carrière, qui fonctionnait bien, ajoute-t-il humblement. Je faisais des plus petites salles, mais j’avais un bassin de fans, quand même.»
Il faut dire que Désherbage était son cinquième album, en comptant son premier EP, sorti en 2009. Mais l’auteur-compositeur-interprète était déjà très satisfait de ce qu’il avait, soit de pouvoir vivre de la musique, à compter de 2012 ou 2013.
«Pour moi, j’ai toujours vu ça comme un gros bonus, parce que je n’avais pas l’impression que j’avais le type de projet pour ratisser large… J’étais conscient que ma voix pouvait ne pas plaire à tout le monde, et mon type d’écriture aussi, qui est plus axé dans la poésie. Tous ces petits pas vers une plus grande reconnaissance étaient comme un bonus, et un moment donné, je me suis retrouvé à me dire : ça se passe bien !», lance-t-il en riant.
Ça se passait plutôt bien, oui, pour reprendre son euphémisme. Le coyote s’est mis à multiplier les spectacles et à jouer dans des salles de plus en plus vastes, pour une tournée qui s’échelonnera finalement sur deux années et demie, pour répondre à la demande. En 2018, son album Désherbage a remporté le Félix de l’album folk de l’année, au gala de l’ADISQ (catégorie dans laquelle il est encore une fois en nomination, cette année, pour son album Au premier tour de l’évidence, sorti en février dernier).
Difficile pour lui, toutefois, de cerner ce qui a vraiment fait le succès de cet album. Tout le travail fait depuis ses débuts a sûrement fini par «payer», dans un sens, avance l’artiste.
«Et puis, je pense encore aujourd’hui qu’il y a quand même la chanson Le ciel est backorder, qui a été un point tournant, ajoute-t-il. C’est probablement la chanson qui a le plus tourné sur cet album-là, qui a rejoint beaucoup de gens. Je pense que j’ai peut-être touché à une corde sensible de beaucoup de gens qui connaissent quelqu’un qui est malade ou qui le sont eux-mêmes.»
Sa chanson préférée, à lui, sur cet album ? Comment te dire, pour le texte.
Et est-ce qu’il y a une chanson qu’il est un peu de tanné de jouer ?
«Non, ça m’arrive pas ! Ça ne m’est pas encore arrivé… Évidemment, plus on a d’albums, plus on arrive à un certain nombre de chansons dans le répertoire, on a la chance de pouvoir changer son set list en spectacle… Comme en ce moment, dans la tournée de mon dernier album, on sort des vieilles chansons que je n’avais pas jouées depuis longtemps, que je n’avais même pas faites à l’époque de Désherbage…»
«Mais j’aime ça, faire des spectacles, renchérit-il. Donc je ne me rends pas à ce point-là.»
N’empêche, le tourbillon a été intense, depuis 2017. Et après une longue tournée, qui s’est achevée juste avant le début de la pandémie, le coyote a ressenti de prendre une petite pause de la musique avant d’écrire un prochain album.
«Je suis évidemment extrêmement content du succès de Désherbage, de la tournée qui en a suivi, mais ça vient aussi avec son lot de fatigue, de déplacements et de mouvement…»
«Et de pression… Et moi, c’était la première fois que je devais dealer avec une certaine reconnaissance… Bon, je ne suis pas Céline… mais on devient plus conscient du regard du public, du regard des autres, de ce que les gens pensent de nous. Je m’étais toujours fait un devoir de me couper de cet aspect-là, mais on entre dans cette sphère publique qui fait que tu n’as pas le choix d’y faire face, à un certain moment.»
«À la fin de la tournée de Désherbage, j’ai senti que j’avais besoin de m’éloigner un peu de la chanson et d’attendre d’avoir vraiment hâte d’écrire encore des chansons avant de le faire», poursuit-il.
Pendant la pandémie, il s’est donc réfugié dans sa résidence de Saint-Élie-de-Caxton, et il a notamment écrit un recueil de poésie, joliment intitulé La mémoire est une corde de bois d’allumage, paru aux éditions La Peuplade.
Et quelques mois plus tard, quand il en a ressenti le besoin, il s’est mis à l’écriture de ce qui allait devenir Au premier tour de l’évidence. En travaillant beaucoup plus les textes avant de trouver la musique qui allait les accompagner. Et ça donne des textes mieux construits, constate l’artiste. Peut-être moins axés sur la recherche de l’image forte, coup de poing.
N’empêche, Tire le coyote n’a pas le désir d’aller complètement ailleurs, d’essayer un autre style musical, par exemple, pour un prochain album.
«Je ressens le besoin de m’enraciner, dans mes influences… Je suis un vrai amoureux de folk, j’ai besoin de plonger dans cet univers. Mais en même temps, je ne veux pas faire du sur place. Donc je m’entoure de gens différents pour la réalisation de mes albums, qui vont m’aider à pousser mon art un peu plus loin.»
Il cite Daniel Bélanger ou Lisa Leblanc comme des exemples d’artistes qui sont capables de se réinventer complètement d’un album à l’autre — il a d’ailleurs beaucoup aimé le dernier opus disco de Lisa Leblanc. Et s’il les admire pour ça, il ne pense pas faire la même chose dans un avenir rapproché.
«Mais qui sait ? ajoute-t-il. J’aime beaucoup de musique, j’écoute beaucoup de musique de styles différents. Mais si un jour je me lance dans un autre projet, je pense que ça aura un autre nom que Tire le coyote…»
Voyez le reportage de Camille Laurin-Desjardins dans la vidéo.