Une Canadienne qui tentait de prendre un vol vers le sud pour se rendre dans une clinique de fertilité en Californie s’est récemment vu refuser l’entrée aux États-Unis par les douaniers et les agents des services frontaliers américains.
Ce texte est une traduction d’un contenu de CTV News.
Toujours incrédule, Melody - qui a demandé à ce que nous n’utilisions que son prénom - dit avoir été sous le choc lorsque deux agents armés l’ont escortée hors de l’aéroport international de Calgary.
Melody est une mère porteuse canadienne qui tente depuis des mois de porter un deuxième enfant pour une famille américaine incapable d’avoir un enfant par ses propres moyens.
Le 12 octobre, Melody est arrivée à la zone de pré-contrôle douanier américain de l’aéroport international de Calgary et dit avoir présenté tous ses documents en tant que mère porteuse pour se rendre dans une clinique de fertilité en Californie, où l’embryon est conservé. Elle avait également réservé son billet de retour au Canada pour le lendemain de l’intervention, avec l’intention de rester enceinte au Canada et d’accoucher sur le sol canadien.
C’est alors qu’un agent des douanes et des frontières américaines lui a dit que ce qu’elle faisait était «illégal, ce qui n’est pas le cas», a soutenu Melody. La maternité de substitution n’est pas illégale au Canada, ni interdite dans l’État de Californie.
Elle affirme que l’agent des douanes américain a également prétendu qu’elle «se rendait en Californie pour obtenir un avantage financier».
Il n’est pas rare que des mères porteuses se rendent dans des cliniques de fertilité aux États-Unis. Dans un courriel adressé à CTV News, un porte-parole des douanes et de la protection des frontières américaines a écrit qu’une «mère porteuse canadienne pour une famille américaine, en particulier si une compensation est impliquée, serait probablement classée comme employée en vertu de la loi américaine sur l’immigration. L’emploi aux États-Unis nécessite généralement un visa de travail, tel qu’un visa H-2B ou une autre catégorie de visa appropriée, en fonction de la situation spécifique».
Melody a exprimé qu’elle n’allait pas travailler aux États-Unis et qu’elle n’avait jamais gagné d’argent en tant que mère porteuse.
La loi canadienne interdit de tirer profit de la maternité de substitution.
Melody a dit qu’elle connaissait les règles relatives à la rémunération des mères porteuses. Elle avait déjà donné naissance à un enfant pour la même famille californienne. Au cours de cette grossesse en 2018, elle n’avait accepté que le paiement des frais liés à la grossesse.
«Au Canada, nous sommes autorisés à rembourser aux mères porteuses les dépenses qu’elles engagent dans le cadre de la maternité de substitution, à condition d’avoir les reçus et les documents justificatifs», a expliqué Sara Cohen, avocate spécialisée dans la fertilité, qui a souligné qu’au Canada, la maternité de substitution n’est pas une opération lucrative.
«Par exemple, ses frais de déplacement, ses médicaments, son assurance-vie, ses frais juridiques, son hôtel pendant sa visite à la clinique de fertilité en Californie, tout cela est parfaitement légal selon la loi canadienne.»
— Sara Cohen, avocate spécialisée dans la fertilité
«Cette mère porteuse est comme un ange qui va aider une famille à avoir un enfant, un enfant qui sera tellement aimé», a ajouté Mme Cohen.
Le couple californien qui tente de compléter sa famille avec l’aide de Melody est marié à un partenaire de même sexe. L’un des conjoints a accepté de s’entretenir avec CTV National News, mais a demandé que son vrai nom ne soit pas divulgué, craignant que le fait de rendre cette information publique ne crée davantage de problèmes pour Melody aux douanes américaines. Dans cet article, il est appelé Paul Smith.
M. Smith explique que lorsque Melody a mené à bien sa grossesse et donné naissance à leur premier fils en 2018, un lien spécial s’est créé entre eux.
«Nous avons vraiment eu de la chance de trouver Melody. Nous avons un lien profond avec elle sur le plan personnel», a soutenu M. Smith, ajoutant que «notre famille aime le Canada, et les Canadiens sont vraiment des êtres humains exceptionnels».
Melody a accepté de porter un deuxième enfant pour eux, mais la pandémie a mis ces projets en suspens.
« Depuis, nous essayons d’avoir un deuxième enfant pour compléter ce que nous considérons comme notre famille », a déclaré M. Smith.
Le 12 octobre, lorsque Melody a envoyé un message pour dire que son entrée aux États-Unis avait été refusée par les agents frontaliers, M. Smith dit avoir d’abord pensé qu’elle plaisantait.
«Je ne suis pas très politisé, mais personne n’essaie d’immigrer aux États-Unis en ce moment, surtout depuis le Canada», a plaisanté M. Smith.
Il sait cependant que la situation n’a rien de drôle. Le stress lié à l’incertitude pèse lourdement sur M. Smith et son mari, qui affirment que l’avenir de leur famille dépend désormais de la décision d’un agent des services frontaliers, quel que soit le jour.
«J’espère qu’elle pourra venir. Nous n’allons pas abandonner», a dit M. Smith en essuyant ses larmes.
S’adressant à CTV National News, Melody, une résidente de Calgary, affirme que les douaniers américains ont également dit qu’elle était une immigrante sans papiers, même si elle dit avoir fourni tous les documents de voyage appropriés.
«Je suis citoyenne canadienne ; je travaille dans un hôpital. J’ai mes propres enfants au Canada. Je n’essaie pas d’immigrer ; j’essaie simplement de me rendre aux États-Unis pour un rendez-vous et de rentrer chez moi», a-t-elle indiqué. «Essayer de fonder une famille n’est pas un délit. Être mère porteuse n’est pas un délit.»
Plusieurs avocats qui se sont récemment entretenus avec CTV News au sujet des Canadiens refoulés à la frontière américaine affirment que certaines des politiques menées à Washington se répercutent à la frontière canado-américaine.
«Il est très décevant qu’une institution gouvernementale (américaine) interfère dans une telle relation », a expliqué Mme Cohen. «Cette mère porteuse agit de manière tout à fait légitime, d’après ce que je peux voir, tout a été fait dans les règles.»
Mme Cohen a indiqué avoir eu des centaines de clients qui ont traversé la frontière pour se rendre dans des cliniques de fertilité américaines sans aucun problème, et a qualifié le cas de Melody d’alarmant.
«Elle essaie d’offrir à ce couple le plus beau des cadeaux et elle est escortée hors de l’aéroport par des agents armés», a clamé Mme Cohen.
Melody a réservé un autre vol et prévoit de tenter à nouveau de passer la douane américaine et de se rendre à la clinique de fertilité en Californie ce dimanche, dans l’espoir d’aider cette famille américaine à réaliser son rêve.
«J’espère que ce qui s’est passé n’était qu’une erreur, une faute, et non un acte malveillant, et que cette fois-ci, je serai autorisée à entrer aux États-Unis pour mon rendez-vous», a expliqué Melody.
Interrogé par CTV News, un porte-parole des douanes et de la protection des frontières américaines a refusé de dire si Melody serait autorisée à franchir la frontière lorsqu’elle tentera à nouveau de passer.

