Les Montréalais et d’autres personnes à travers le pays ont marqué une pause samedi pour rendre hommage aux 14 femmes qui ont été assassinées à l’École polytechnique de Montréal il y a 36 ans simplement parce qu’elles étaient des femmes.
Le premier ministre du Canada a reconnu qu’il restait beaucoup à faire.
Mark Carney a fait cette déclaration samedi soir alors qu’il assistait à une cérémonie commémorative à Montréal en l’honneur des 14 femmes. Plus tôt, il avait rendu hommage aux victimes, qualifiant le massacre de « rappel solennel du bilan dévastateur de la violence sexiste ».
«Oui, nous avons fait des progrès, nous avons fait des progrès en matière de contrôle des armes à feu, nous avons fait des progrès à d’autres égards, mais nous n’en avons pas fait assez», a affirmé M. Carney.
«Je reconnais que mon gouvernement est conscient que nous devons faire davantage, non seulement en matière de contrôle des armes à feu – il y a toujours de nouvelles armes d’assaut et autres qui font leur apparition –, mais aussi en matière d’application (des lois).»
— Mark Carney, premier ministre du Canada
M. Carney a indiqué que cela signifie une législation exigeant des conditions plus strictes en matière de libération sous caution dans les cas de violence conjugale, ce que son gouvernement a l’intention de mettre en œuvre.
Au cours de la soirée, 15 faisceaux lumineux ont illuminé le ciel nocturne au-dessus du mont Royal, s’allumant un à un au fur et à mesure que les noms des 14 femmes étaient lus.
Les 14 femmes assassinées en 1989 étaient Geneviève Bergeron, Hélène Colgan, Nathalie Croteau, Barbara Daigneault, Anne-Marie Edward, Maud Haviernick, Maryse Laganière, Maryse Leclair, Anne-Marie Lemay, Sonia Pelletier, Michèle Richard, Annie St-Arneault, Annie Turcotte et Barbara Klucznik-Widajewicz.
Treize autres ont été blessées lors de l’attaque antiféministe perpétrée par Marc Lépine, qui s’est ensuite suicidé. Il avait déclaré que les féministes avaient ruiné sa vie.
«Trente-six ans plus tard, nous sommes toujours là à penser à elle, à parler d’elle et à nous demander “pourquoi ? comment ?”. Trente-six ans plus tard, nous voyons le chemin parcouru», a exprimé Catherine Bergeron, dont la sœur Geneviève Bergeron a été tuée.
«Le devoir de mémoire reste plus que jamais d’actualité, malgré le temps qui passe. Trente-six ans. Et nous sommes toujours là pour rappeler, pour inspirer l’action, pour soutenir, pour offrir du réconfort si possible.»
Le premier ministre du Québec, François Legault, a appelé la population à dénoncer la violence faite aux femmes et à agir.
«Aujourd’hui, nous avons le devoir de nous souvenir, mais nous avons aussi le devoir, chacun d’entre nous en tant que citoyens, lorsque nous savons qu’une femme est agressée, de dénoncer l’auteur», a expliqué M. Legault. «C’est ainsi que nous préviendrons toutes les tragédies, les féminicides que nous voyons, car chaque femme au Québec a le droit de vivre sa vie, de vivre sa vie sans violence.»
Plus tôt samedi, lors d’une cérémonie matinale balayée par le vent à l’École Polytechnique de Montréal, en présence des étudiants et du personnel, des couronnes et des bouquets de roses blanches ont été déposés devant une plaque commémorative sur le bâtiment principal de Polytechnique.
«C’est le moment de commémorer les événements, ce qui s’est passé, et de se souvenir de ces jeunes femmes, de leurs rêves et de ce qu’elles voulaient finalement faire : devenir ingénieures», a déclaré Maud Cohen, directrice générale de l’établissement.
«Mais pour nous, c’est aussi l’occasion de nous tourner vers l’avenir et de voir comment, en tant qu’université, nous pouvons faire la différence pour les femmes dans le domaine de l’ingénierie.»
La Journée nationale de commémoration et d’action contre la violence faite aux femmes, connue sous le nom informel de Journée du ruban blanc, a lieu le 6 décembre pour marquer l’anniversaire du massacre de Polytechnique. De nombreux autres hommages ont eu lieu à travers le pays.
Les étudiants en ingénierie de l’Université de Toronto, pour la plupart des femmes, ont organisé une veillée pour marquer l’anniversaire de ces meurtres tragiques.
Le groupe a conçu et construit un monument en plein air de style gazebo pour l’occasion, affirmant que le design de cette année s’inspirait de l’idée de réflexion.
Le monument en bois et en verre était décoré de roses blanches symbolisant l’innocence et l’avenir dont ces femmes n’ont jamais pu profiter. Une plaque commémorative et le monument resteront sur les marches du bâtiment Galbraith pendant toute la semaine.
Kaija Mikes, l’une des étudiantes de l’équipe, a dit que ce mémorial avait une signification profonde pour elle et qu’elle était reconnaissante envers la communauté qui s’était déplacée.
«Il y a toujours une peur constante, non seulement pour moi, mais aussi pour les autres femmes dans le domaine de l’ingénierie, pour les personnes non binaires et de genre divers dans le domaine de l’ingénierie, que cette discrimination et cette violence sexiste persistent encore aujourd’hui», a déclaré Mme Mikes.
Ailleurs, le chef conservateur Pierre Poilievre a déclaré dans un communiqué que « la lutte contre la violence envers les femmes est un impératif moral ».
«Ce n’est pas seulement le moment de se souvenir de leurs noms. C’est le moment de lutter pour la promesse de notre pays : que chaque femme, quels que soient son origine, sa profession ou sa situation, puisse vivre en sécurité, dans la dignité et sans crainte.»
La mairesse de Montréal, Soraya Martinez-Ferrada, a écrit dans un communiqué que 36 ans après la tragédie, les femmes ont le droit de vivre sans crainte et de réaliser leurs rêves. Elle a appelé à transmettre les valeurs de respect et d’égalité aux générations futures.
«Nous le devons aux victimes de la Polytechnique et à celles qui ont besoin de protection aujourd’hui», a-t-elle soutenu.
«Cet acte antiféministe, alimenté par la haine, nous rappelle de manière frappante que la violence envers les femmes reste intolérable», a déclaré Mme Martinez-Ferrada. «À Montréal, nous devons poursuivre la lutte pour l’égalité, l’équité et la sécurité de toutes les femmes et de toutes les filles.»
