L’organisme de surveillance du Pentagone a conclu que le secrétaire à la Défense, Pete Hegseth, avait mis en danger le personnel américain et sa mission en utilisant l’application de messagerie Signal pour transmettre des informations sensibles concernant une frappe militaire contre les militants houthis au Yémen, ont indiqué mercredi deux personnes au fait des conclusions de l’enquête.
Cependant, M. Hegseth a la possibilité de déclassifier des documents et le rapport n’a pas conclu à une utilisation abusive de sa part, selon l’une des personnes ayant requis l’anonymat. Cette même personne a également précisé que le rapport concluait à une violation du règlement du Pentagone par M. Hegseth en utilisant son appareil personnel à des fins officielles et recommandait une meilleure formation pour tous les responsables du Pentagone.
M. Hegseth a refusé de s’entretenir avec l’inspecteur général du Pentagone, mais a fourni une déclaration écrite, a ajouté cette source. Le secrétaire à la Défense a affirmé qu’il était autorisé à déclassifier des informations comme bon lui semblait et qu’il n’avait communiqué que des détails qui, selon lui, ne compromettraient pas la mission.
Les premières conclusions, révélées par CNN, accentuent la pression sur l’ancien présentateur de Fox News Channel, suite à la demande des parlementaires d’une enquête indépendante sur son utilisation de l’application commerciale.
Les parlementaires ont également ouvert des enquêtes sur un article de presse selon lequel une frappe de suivi menée en septembre contre un bateau soupçonné de trafic de drogue dans la mer des Caraïbes aurait coûté la vie à des survivants après que M. Hegseth aurait donné l’ordre verbal de «tuer tout le monde».
M. Hegseth a défendu la frappe, affirmant qu’elle avait été menée dans le «brouillard de la guerre», qu’il n’avait vu aucun survivant, mais qu’il n’était pas resté sur place pour le reste de la mission et que l’amiral responsable avait «pris la bonne décision» en ordonnant la seconde frappe. Il n’a pas non plus reconnu sa responsabilité après les révélations de Signal, affirmant que les informations étaient déclassifiées.
«Le rapport de l’inspecteur général disculpe totalement le secrétaire Hegseth et prouve ce que nous savions depuis le début : aucune information classifiée n’a été partagée, a déclaré Sean Parnell, porte-parole du Pentagone, dans un communiqué. Cette affaire est close.»
Le président Donald Trump «soutient» Pete Hegseth, a expliqué la porte-parole de la Maison-Blanche, Karoline Leavitt, dans un communiqué, ajoutant que l’enquête confirme qu’«aucune information classifiée n’a fuité et que la sécurité opérationnelle n’a pas été compromise».
Un journaliste a été ajouté à une conversation où des plans sensibles étaient partagés.
Dans au moins deux conversations Signal distinctes, Pete Hegseth a fourni les horaires précis des lancements d’avions de combat et des largages de bombes, avant même que les hommes et les femmes chargés de ces attaques pour le compte des États-Unis ne soient en vol.
La femme et le frère de Pete Hegseth dans la conversation
L’utilisation de l’application par Pete Hegseth a été révélée lorsqu’un journaliste, Jeffrey Goldberg de The Atlantic, a été ajouté par inadvertance à une conversation Signal par le conseiller à la sécurité nationale de l’époque, Mike Waltz.
Cette conversation incluait le vice-président J.D. Vance, le secrétaire d’État Marco Rubio, la directrice du renseignement national Tulsi Gabbard et d’autres personnalités, réunis pour discuter des opérations militaires du 15 mars contre les Houthis, soutenus par l’Iran.
M. Hegseth avait créé une autre conversation sur Signal avec 13 personnes, dont sa femme et son frère, où il a partagé des détails similaires concernant la même frappe, selon l’Associated Press.
Signal est crypté, mais n’est pas autorisé pour la transmission d’informations classifiées et ne fait pas partie du réseau de communications sécurisé du Pentagone.
Pete Hegseth a précédemment affirmé qu’aucune des informations partagées dans ces conversations n’était classifiée. Plusieurs responsables militaires, actuels et anciens, ont déclaré à l’AP qu’il était absolument impensable de partager des détails aussi précis, surtout avant une frappe, sur un appareil non sécurisé.
Le rapport a été remis aux parlementaires, qui ont pu l’examiner dans un local classifié du Capitole. Une version partiellement expurgée du rapport devait être rendue publique plus tard cette semaine.
Selon une personne ayant eu accès aux conclusions du rapport, Pete Hegseth a expliqué considérer l’enquête comme une manœuvre partisane et ne pas faire confiance à l’inspecteur général. L’enquête a dû se baser sur des captures d’écran de la conversation Signal publiées par The Atlantic, car Pete Hegseth n’a pu fournir qu’une poignée de ses messages, a indiqué la source.
Interrogé sur l’enquête en août, le porte-parole du Pentagone, Kingsley Wilson, a déclaré aux journalistes : «Nous pensons qu’il s’agit d’une chasse aux sorcières, d’une véritable mascarade et d’une enquête menée de mauvaise foi.»
Des parlementaires avaient demandé à l’inspecteur général d’enquêter.
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Les journalistes de l’Associated Press Stephen Groves, Konstantin Toropin, Michelle L. Price et David Klepper ont contribué à cet article.
Lisa Mascaro et Ben Finley, The Associated Press
