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Une enseignante d'une école primaire anglophone de l'Outaouais a été réaffectée parce que son hijab contrevenait à la Loi sur la laïcité de l'État, qui interdit aux enseignants de porter des signes religieux en classe.
Les parents de l'école élémentaire de Chelsea, à une quinzaine de kilomètres au nord d'Ottawa, ont déclaré avoir appris dans une lettre la semaine dernière que l'enseignante était affectée à un autre poste au sein de l'école.
Certains parents ont plus tard découvert que cette réaffectation était liée au port du hijab, ce qui a été confirmé par l'enseignante elle-même dans une entrevue à l'hebdomadaire local «The Lowdown to Hull and Back».
La Loi sur la laïcité de l'État, adoptée en juin 2019 à l'Assemblée nationale, interdit aux employés de l'État en position d'autorité coercitive, comme les juges, les policiers et les gardiens de prison, de porter des signes religieux dans l'exercice de leurs fonctions. Cette interdiction s'étend aussi aux enseignants du réseau public.
Amanda DeGrace, qui est parent d'élève, affirme que des sympathisants ont accroché des rubans verts à la clôture de l'école en soutien à l'enseignante. Ils organisent aussi une campagne de lettres pour dénoncer cette situation auprès de la commission scolaire et des politiciens fédéraux et provinciaux, dont le premier ministre François Legault.
«Les parents ont été informés que l'enseignante quitterait la salle de classe (et serait affectée) dans un rôle distinct. Comme nous vivons dans une petite communauté, la nouvelle s'est rapidement propagée sur les motifs» de cette réaffectation, a déclaré Mme DeGrace en entrevue jeudi. «En tant que parent et étant donné la communauté dans laquelle nous vivons, il est très choquant de voir cette loi entrer en vigueur.»
Wayne Daly, président par intérim de la Commission scolaire Western Québec, a déclaré que la commission avait clairement exprimé son opposition à la loi sur la laïcité. Des parents l'ont également contacté pour exprimer leur mécontentement.
«Ils ne sont pas contents. Ils disent les mêmes choses que nous: que c'est scandaleux et que cela n'aurait pas dû être fait, et je ne peux pas être en désaccord avec eux, a déclaré M. Daly. Mais la loi est adoptée par notre législature et nous, en tant que citoyens, avons élu cette législature, donc si vous voulez changer ça, bien: vous pouvez voter.»
La réaffectation de l'enseignante survient après que la Cour d'appel du Québec a statué, le 9 novembre dernier, que les commissions scolaires anglophones devaient appliquer la Loi sur la laïcité de l'État jusqu'à ce que les tribunaux entendent les contestations sur le fond _ ce qui pourrait prendre des années.
Les commissions scolaires avaient demandé une exemption à la disposition, conformément à une décision d'avril de la Cour supérieure du Québec qui annulait les dispositions de la loi relatives aux commissions anglophones. Cette décision a ensuite été portée en appel par le procureur général du Québec, qui a plaidé que la loi devrait s'appliquer sans exception.
L'Association provinciale des enseignantes et des enseignants du Québec (APEQ) a indiqué qu'elle rencontrerait l'enseignante de Chelsea dans les prochains jours.
Fatema Abdalla, porte-parole du Conseil national des musulmans canadiens, a qualifié cette affaire de troublante et de bouleversante.
«Nous ne pouvons pas comprendre pourquoi les Canadiens sont si choqués subitement, alors que nous réclamons des changements au projet de loi 21 depuis des années, a déclaré Mme Abdalla. La prochaine étape logique serait que le premier ministre (Justin Trudeau) se lève et intervienne.»