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Une commission transpartisane recommande la majorité numérique à 14 ans

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9260da3fac9838fba73c025d7310b3464de095dc2276ca5c8ab1b2e60556b29f.jpg Un enfant tient un iPhone à Chicago, aux États-Unis, le 25 septembre 2015. LA PRESSE CANADIENNE/AP, Kiichiro Sato

Les jeunes de moins de 14 ans ne devraient pas pouvoir s'inscrire sur les réseaux sociaux sans le consentement de leurs parents.

C'est l'une des 56 recommandations contenues dans le rapport final de la commission spéciale transpartisane sur les effets des écrans chez les jeunes déposé jeudi matin, à l'Assemblée nationale.

La limite d'âge a été fixée à 14 ans, puisque c'est à partir de cet âge qu'un jeune peut travailler, consulter un médecin seul et répondre à un sondage en ligne, a expliqué en conférence de presse la présidente de la commission, la caquiste Amélie Dionne.

En lançant ce débat l'an dernier, l'aile jeunesse de la Coalition avenir Québec avait suggéré que la limite soit fixée à 16 ans.

«Mettre la majorité numérique à 14 ans, il y a un défi d'application, comme bien d'autres lois au Québec, mais ça envoie un signal», a déclaré aux côtés de Mme Dionne le député Alexandre Leduc, de Québec solidaire.

«Ça envoie un signal de santé publique que c'est ça qui devrait être la norme. Ça envoie un signal aux parents aussi (...) qu'ils ont un rôle à jouer dans l'application de cette norme-là», a-t-il ajouté.

Les parents largement interpellés

D'ailleurs, le rapport interpelle largement les parents, qui devraient notamment: assurer l'exemplarité en matière de temps d'écran, éviter d'exposer les enfants aux écrans avant l'heure du coucher et proscrire les écrans dans les chambres.

Les parents devraient aussi éviter d'utiliser les écrans pour calmer ou distraire leurs enfants, interdire l'utilisation des écrans durant les repas, faire bouger leurs enfants et mieux protéger leur vie privée, selon la commission.

Le député libéral Enrico Ciccone a parlé en conférence de presse d'une visite qu'il a faite dans une école. `Quand j'ai posé la question suivante: "Qui aimerait faire plus d'activités avec leurs parents?" Ça a été 100 % des mains qui ont été levées.

«On ne pointe pas les parents parce qu'ils ne sont pas capables d'aller faire du camping la fin de semaine. Ce n'est pas ça qu'on dit, mais, (...) les parents doivent être conscients que leurs enfants veulent faire plus d'activités avec (eux)», a-t-il déclaré.

Resserrements à l'école

Pour assainir le milieu scolaire, la commission a recommandé dans son rapport intérimaire présenté en avril dernier de bannir le téléphone cellulaire dans toutes les écoles primaires et secondaires, et ce, dès septembre.

Le 1er mai dernier, le ministre de l'Éducation, Bernard Drainville, a annoncé qu'il mettait en ┼ôuvre cette recommandation.

«Les écrans sont trop souvent l'élément déclencheur de situations d'intimidation. Trop de moqueries, d'insultes, de conflits, de gestes de violence prennent naissance sur les cellulaires, parfois même durant les heures de classe», avait-il justifié.

La commission recommande également aux écoles de ne pas utiliser les écrans comme récompense en classe, en les remplaçant plutôt par de l'activité physique, de la lecture ou des jeux entre amis.

Il est aussi proposé de restreindre l'utilisation des écrans en classe à des fins pédagogiques, afin de favoriser «un équilibre entre les différentes méthodes pédagogiques traditionnelles et numériques».

Les programmes de sport électronique devraient aussi être mieux encadrés, et les intervenants scolaires, mieux outillés pour détecter la cyberdépendance, estime la commission.

En outre, les élus se sont attardés aux impacts des jeux vidéo sur les jeunes. Ils recommandent d'interdire les lots aléatoires payants, appelés "loot box", et les microtransactions dans les jeux qui s'adressent aux mineurs, comme Fortnite.

Selon M. Leduc, il arrive que des jeunes dépensent des milliers de dollars en peu de temps. «J'ai en mémoire un jeune qui nous avait dit qu'il avait dépensé 4000 $ en deux ans dans le jeu Fortnite», a-t-il raconté en conférence de presse.

500 jeunes rencontrés, les grandes plateformes absentes

Avant de remettre son rapport, la commission spéciale transpartisane a entendu 66 personnes ou organisations à l'occasion de consultations particulières et reçu 74 mémoires.

Elle a également fait une tournée dans une vingtaine d'écoles, situées dans 13 villes différentes, où elle a rencontré environ 500 jeunes.

Fait à noter: les grandes plateformes numériques ont refusé de venir témoigner à la commission. M. Ciccone a confié jeudi que des élus auraient voulu les contraindre à témoigner, mais qu'après discussion, la commission s'est résolue à prendre acte de leur silence.

De toute façon, «ça aurait été un gros "show" de communications», a lancé Mme Dionne, laissant poindre le peu d'espoir qu'elle avait d'avoir des échanges constructifs avec ces géants numériques.

La présidente a déclaré souhaiter que le rapport, qui était très attendu, selon elle, ait une `portée significative au Québec comme à l'international'.