Justice

Un projet de loi conservateur souhaite étendre les sanctions aux proches

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f7b027d5ec11941dc3c4bf387dfa0f5fb28e8612de94be99cb3435de461fbf2c.jpg Le député conservateur de Selkirk-Interlake-Eastman, James Bezan, participe à une conférence de presse sur la colline du Parlement à Ottawa, le mardi 16 septembre 2025. (LA PRESSE CANADIENNE/Adrian Wyld) (Adrian Wyld | La Presse canadienne)

Le député conservateur James Bezan appelle Ottawa à réformer son régime de sanctions afin de cibler les membres de la famille immédiate des auteurs de violations des droits de l'homme et de lutter contre la répression transnationale.

«Nous voulons nous assurer que le Canada ne serve pas de refuge à des fonctionnaires étrangers corrompus qui cachent leurs familles ici», a déclaré le député manitobain. 

«Nous devons demander des comptes aux responsables de tous les crimes commis à l'encontre des normes internationales et de l'État de droit, ainsi que des violations continues des libertés civiles et des droits de la personne dans le monde», ajoute-t-il. 

Le projet de loi C-219 interdirait également aux proches des auteurs de violations des droits de la personne de voyager et de détenir des actifs financiers au Canada, en réponse aux informations selon lesquelles des responsables iraniens responsables de la répression à l'étranger enverraient leurs enfants dans des universités canadiennes. 

Le projet de loi demanderait également à la Gendarmerie royale du Canada (GRC) et au Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada (CANAFE) d'aider le gouvernement à élaborer des sanctions et à en assurer l'application. Il exigerait que les ministres répondent aux demandes du Parlement concernant des sanctions spécifiques. 

Le projet de loi permettrait de retirer les licences de diffusion aux chaînes de télévision et stations de radio «susceptibles d'être fortement influencées» par des entités sanctionnées, ce qui interdirait de fait à de nombreuses chaînes de télévision étatiques d'émettre sur les ondes canadiennes. 

Le projet de loi C-219 reçoit le soutien du député libéral, John McKay. Ce dernier affirme que la législation avait besoin d’être « rafraîchie » pour tenir compte de l’évolution du comportement des autocraties. 

«J'ai hâte que cette loi soit appliquée avec enthousiasme et efficacité, car la brutalité avec laquelle (le président russe Vladimir) Poutine maltraite le peuple ukrainien doit cesser, et le Canada doit assumer sa part de responsabilité», a-t-il exprimé. 

Irwin Cotler, directeur du Centre Raoul Wallenberg pour les droits de la personne, estime que le projet de loi pourrait répondre aux préoccupations concernant les opérations d'ingérence étrangère menées par des pays comme l'Iran, la Russie et la Chine contre les diasporas au Canada. 

«Cette loi protégera la souveraineté, la sécurité et les droits du peuple canadien, tout en tenant les principaux auteurs de violations des droits de la personne responsables de leurs actes», a expliqué M. Cotler, ancien procureur général. 

«Nous sommes confrontés à un axe autoritariste croissant et nous avons besoin de ces recours et améliorations accrus pour garantir la responsabilité dans la quête de justice», dit-il. 

Le projet de loi obligerait également le Canada à procéder à la confiscation des avoirs gelés en vertu des régimes de sanctions,  conformément aux délais prévus par la loi.

Ottawa promet depuis des années de saisir un avion-cargo russe qui a atterri à Toronto peu avant l'invasion à grande échelle de l'Ukraine par Moscou, et de confisquer des millions de dollars qui seraient détenus par l'oligarque Roman Abramovich. Ces deux mesures font l'objet de contestations judiciaires et feraient du Canada le premier pays à confisquer des avoirs en vertu des lois sur les sanctions. 

Une nouvelle loi Magnitsky 

Le projet de loi rebaptiserait la loi sur les sanctions en citant le nom du lanceur d'alerte russe, Sergueï Magnitsky, décédé dans une prison moscovite en 2009 après avoir accusé des fonctionnaires d'une fraude fiscale de 230 millions $. 

Le Canada a déjà donné le nom de Magnitsky à une loi de 2017 visant les fonctionnaires étrangers, mais cette loi a rarement été utilisée. Selon Affaires mondiales Canada, cela s'explique par le fait qu'elle ne peut interdire que certaines transactions, ne prévoit aucune exception, impose des seuils de preuve élevés et ne vise que des personnes physiques, et non des entités.

Ottawa a tendance à utiliser la Loi sur les mesures économiques spéciales pour imposer des sanctions. Le projet de loi de M. Bezan renommerait cette loi.

M. Bezan, qui était le promoteur de la loi de 2017, a appuyé que «le nom de Magnitsky est synonyme de défense des droits de l'homme, de bonne gouvernance et de paix et sécurité internationales». 

Il a été rejoint sur la colline du Parlement par Bill Browder, un financier d'origine américaine qui est devenu l'un des principaux défenseurs des sanctions contre la Russie depuis la mort de Magnitsky, qui était son employé. 

M. Browder a constaté que, si le Canada a été l'un des premiers pays à adopter une loi Magnitsky et a incité d'autres pays à suivre son exemple, il n'avait depuis lors pratiquement pas utilisé cette loi. 

«Nous avons constaté des lacunes et des failles qui doivent être corrigées et renforcées, a-t-il ajouté. C'est une excellente façon de renforcer la législation sur les sanctions et de ne pas laisser les malfaiteurs s'en tirer impunément». 

Le projet de loi fait suite à une étude interne d'Affaires mondiales Canada qui a conclu qu'Ottawa manquait de ressources et appliquait un régime de sanctions désordonné. M. Bezan a dit espérer que son projet de loi puisse remédier à «un certain nombre de faits inquiétants» révélés par l'étude, et a appelé à une surveillance accrue de la part du personnel gouvernemental sur la recherche, l'application et l'examen des sanctions.