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Un étudiant palestinien obligé d'aller étudier ailleurs qu'au Canada faute de visa

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3feab6a14542bc5eeaae438ce972495377f461902bde83e21551a7b770cfa516.jpg De la fumée s'élève dans le ciel après une frappe aérienne israélienne à Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza, le samedi 19 juillet 2025. (Photo AP/Abdel Kareem Hana)

Un étudiant palestinien admis à l'Université de l'Alberta se prépare maintenant à poursuivre ses études en France, affirmant que ce pays a pu le faire sortir de la bande de Gaza en toute sécurité, contrairement au Canada. 

Ehab fait partie des quelque 70 étudiants de la bande de Gaza qui poursuivent des études à l'étranger avec l'aide du réseau canadien de Palestinian Students and Scholars at Risk.

Il a expliqué avoir déposé sa demande de visa étudiant canadien en février. La Presse Canadienne a accepté de ne pas publier son nom de famille pour des raisons de sécurité.

Des documents partagés avec La Presse Canadienne montrent qu'Ehab a été admis au programme de maîtrise en génie mécanique de l'Université de l'Alberta en mars et que sa demande de visa a été reçue par le gouvernement canadien en avril.

Il a mentionné connaître d'autres étudiants palestiniens qui attendent leur visa canadien depuis plus d'un an. Il a également déposé une demande de bourse en France et a été admis à Centrale Méditerranée en juin.

«Le gouvernement m'a ensuite mis en contact avec l'ambassade pour effectuer les démarches d'évacuation de la bande de Gaza et obtenir le visa», a raconté Ehab.

Quelques jours après le dépôt de sa demande de visa pour la France, Paris a facilité sa sortie de la bande de Gaza et son déplacement vers l'ambassade de France en Jordanie, a souligné l'étudiant, où il a pu soumettre les données biométriques nécessaires pour sa demande de visa.

Son visa étudiant français approuvé est daté du 10 juillet.

Ehab se trouve actuellement à Marseille, en France, où il entamera une maîtrise en génie biomédical en septembre.

Il estime que le gouvernement français avait facilité son évacuation, car lui et d'autres étudiants palestiniens en route pour la France étudient pour devenir ingénieurs et médecins.

Ayman Oweida, président du Palestinian Students and Scholars at Risk, a souligné qu'Ehab était l'un des cinq étudiants avec lesquels l'organisation travaillait et qui se sont inscrits dans des écoles françaises ces dernières semaines.

Selon lui, il est «déconcertant» que la France ait pu faire sortir des étudiants de Gaza et approuver leurs visas beaucoup plus rapidement que le Canada.

«Nous continuons de nous demander avec inquiétude ce qui se passe ici, et nous pensons que le gouvernement canadien ne fait rien de bien, s'il fait quelque chose, honnêtement. Et c'est ce que nous pensons. Il ne fait rien pour remédier à la situation», a affirmé M. Oweida.

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Dans une réponse par courriel, Rémi Larivière, porte-parole d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC), a indiqué que de nombreux «facteurs complexes» influencent le traitement des demandes de visa en provenance de la région.

«Chaque pays établit ses propres conditions d'entrée et de sortie. Nous continuons de collaborer étroitement avec les autorités locales, à tous les niveaux, pour plaider en faveur du départ des personnes de la bande de Gaza, mais nous ne décidons pas en dernier ressort qui peut partir», a ajouté M. Larivière.

Toute personne arrivant au Canada depuis la bande de Gaza doit se soumettre à un contrôle de sécurité supplémentaire en plus des données biométriques standard.

«Comme les contrôles de sécurité sont effectués par des organismes extérieurs à IRCC, nous ne sommes pas en mesure de fournir un délai de traitement moyen», a expliqué M. Larivière.

Le Canada n'ayant pas de présence consulaire ou diplomatique dans la bande de Gaza, les données biométriques ne peuvent être recueillies qu'à l'extérieur du territoire.

Le président français Emmanuel Macron a évoqué son souhait de reconnaître un État palestinien dans le cadre d'un accord de cessez-le-feu en juin dernier.

Avec de tels commentaires de la part du gouvernement français, il est surprenant que la France ait réussi à faire sortir les étudiants de la bande de Gaza alors que le Canada n'y est pas parvenu, a fait remarquer M. Oweida.

«Je pense que cela en dit long, même si nous ne comprenons pas vraiment ce qui se passe au niveau du gouvernement canadien, mais les observations sont éloquentes», a-t-il noté.

«Comment la France, qui s'est montrée très critique envers Israël, a-t-elle pu évacuer?» s'est-il interrogé.

Un site web du gouvernement français indique que la France accepte les demandes de visa des Palestiniens à Jérusalem et à Ramallah, une ville de Cisjordanie. Avant la guerre, la France pouvait accepter les demandes de visa dans la bande de Gaza.

M. Oweida a expliqué avoir dû reporter l'inscription d'une étudiante palestinienne en maîtrise à trois reprises. Elle est bloquée dans la bande de Gaza depuis plus d'un an, sans pouvoir avancer sa demande de visa, a-t-il ajouté.

Avec la poursuite de la guerre et l'insécurité alimentaire qui pousse la bande de Gaza vers la famine, M. Oweida et d'autres universitaires canadiens pourraient devoir chercher des partenaires internationaux pour inscrire leurs étudiants ailleurs.

«En fin de compte, c'est la sécurité des étudiants que nous voulons assurer», a-t-il soutenu.

Alors qu'Ehab se prépare à poursuivre ses études en France, il a déclaré qu'il aimerait bien venir au Canada et obtenir un diplôme à l'Université de l'Alberta un jour. Il espère que cette opportunité pourra être offerte à ses amis qui vivent encore en zone de guerre.

«Tous mes amis de la bande de Gaza qui ont la chance de venir au Canada se sentent très stressés et très tendus, et c'est très dangereux», a-t-il témoigné.

«J'espère que mon pays d'amour, le Canada, et IRCC (…) aideront mes amis à réaliser leurs rêves et ne ratent pas cette occasion», a-t-il souligné.