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Trump donne un «coup de froid» aux investissements étrangers à Montréal

Près de la moitié des filiales étrangères songerait à réduire ou geler leurs investissements.

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Trump donne un «coup de froid» aux investissements étrangers à Montréal Trump donne un «coup de froid» aux investissements étrangers à Montréal

Les menaces économiques de l’administration Trump ont jeté «un coup de froid» sur les projets d’investissements des entreprises étrangères dans la région de Montréal, constate le PDG de Montréal International, Stéphane Paquet.  

L’organisme sans but lucratif a sondé les filiales étrangères présentes dans la région métropolitaine sur leurs intentions. Près de la moitié songerait à réduire ou geler leurs investissements. En septembre, cette proportion était de 7 %. «Donc, c’est l’état d’esprit», constate M. Paquet en conférence de presse.

Montréal International a dévoilé, vendredi, ses résultats pour l’année 2024, mais l’attention était visiblement tournée vers les prochains mois, qui s’annoncent volatiles, tandis que le président américain multiplie les menaces économiques à l’endroit de ses partenaires commerciaux, dont le Canada. 

De potentiels droits de douane auraient un «impact majeur» pour 62 % des filiales interrogées, toujours selon le sondage. Seulement 9 % affirment que ces taxes à l’importation seraient sans effet sur leurs activités. «Il n'y a pas énormément d'entreprises qui ont répondu, mais c'est conforme à d'autres sondages qu'on a vus ailleurs et qui sont somme toute préoccupants», précise le dirigeant.

Sur le terrain, M. Paquet a discuté avec des entreprises qui ont décidé de mettre leur projet sur pause. «J'ai une entreprise qui avait prévu investir 200 millions $ dans le secteur de l'emballage de produits en sciences de la vie, notamment, donne-t-il en exemple. Et là, cette entreprise-là dit: "Bien attention, il y avait beaucoup de mes produits qui s'en allaient aux États-Unis. Donc, je vais prendre une pause et je vais voir comment la situation évolue".»

Pour le moment, les filiales semblent dans l’attente, mais le patron de Montréal International dit ne pas avoir vu de projets mis au rancart, pour l’instant. «Les entreprises, soit prennent des pauses, soit s'adaptent, mais, pour l'instant, des annulations pures, nettes et précises, je n'en ai pas, mais clairement, les gens attendent des réponses.»

En réponse au contexte incertain, l’équipe de Montréal International a visité les filiales étrangères à un rythme beaucoup plus «intensif». «Il va falloir leur parler plus souvent qu’à l’habitude.»

La rhétorique de la Maison-Blanche, qui s’oppose à l’énergie renouvelable, à la science du climat ou à la diversité, pourrait toutefois ouvrir des portes à Montréal, croit M. Paquet. «Si j'avais des projets de décarbonation demain matin, je ne suis pas certain que j'irais aux États-Unis où les climatosceptiques ont repris le pouvoir.»

Présent sur place, le maire de Laval, Stéphane Boyer, a suggéré à Montréal International de faire des démarches pour rapatrier le bureau régional de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) pour les Amériques, qui est basé à Washington. Le retrait des États-Unis de l’organisme onusien offrirait une occasion, selon lui.

Réglementation: «pas l’enfer»

Au moment où l’administration Trump promet de réduire de manière importante la réglementation, des voix s’élèvent dans le milieu des affaires pour que le Canada réduise le fardeau administratif des entreprises. Les patrons de la Banque Nationale, Laurent Ferreira, et d’Hydro-Québec, Michael Sabia, ont fait ce plaidoyer à des tribunes différentes récemment. 

Le fardeau administratif décourage-t-il les investissements étrangers? « D'abord, il n’y a pas de juridictions où il n'y a pas de règlement, répond d’entrée de jeu M. Paquet. Donc, il y en a partout.»

Il y aurait toujours des améliorations à faire pour avoir une réglementation plus efficace, mais le fardeau administratif n’empêche pas d’attirer des investissements, selon lui.

Montréal International a accompagné 59 projets en 2024, ce qui a attiré des investissements de 2,7 milliards $. Ce montant est relativement stable par rapport à l’année précédente. 

L’organisme affirme que son intervention a permis de créer ou maintenir 4790 emplois à un salaire moyen de 105 439 $. 

Une majorité des investissements proviennent de filiales déjà établies à Montréal. «Si c'était l'enfer sur Terre, je présume qu'elles ne réinvestiraient pas ici. Elles iraient ailleurs.»

Si l’administration Trump tient sa promesse de réduire les impôts, les gouvernements n’auront pas le choix de réagir, juge M. Paquet. 

«Puis, éventuellement, il va falloir regarder la fiscalité aussi parce que s'il y a des baisses d'impôts aussi importantes que prévu aux États-Unis, les entreprises vont regarder leur fichier Excel. Elles vont dire: "Bien voilà, l'écart est beaucoup trop grand. Je m'installe aux États-Unis"».

Stéphane Rolland

Stéphane Rolland

Journaliste

Lila Mouch

Lila Mouch

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