L’homme de 26 ans qui a vraisemblablement commis trois meurtres de manière aléatoire en 24 heures dans la région de Montréal était équipé en armes pour commettre un véritable carnage, a-t-on appris mardi au deuxième jour de l’enquête publique de la coroner.
Abdulla Shaikh avait en sa possession deux armes à feu en polymère de type glock 19, soit des armes imprimées à l’aide d’une imprimante 3D. Ou ne connait pas encore comment l’homme de 26 ans s’est procuré ses armes artisanales.

Le pistolet retrouvé dans sa chambre était modifié avec un chargeur haute capacité prohibé comprenant 30 munitions à l’intérieur. L’arme s’est enrayé après les deux coups de feu tirés vers les policiers.

Dans le véhicule qu’il avait loué, les policiers ont trouvé une deuxième arme à feu en polymère, avec 10 munitions à l’intérieur. L’arme était modifiée avec un dispositif prohibé permettant le tir automatique, communément appelée glock switch. Ce dispositif permet de transformer l’arme à feu en arme automatique pouvant tirer 1200 balles en une minute.
8 chargeurs haute capacité prohibé ont été trouvés sur les lieux, avec un total de 190 munitions.

Abdulla Shaikh, qui a reçu un diagnostic de schyzophrénie, a été abattu par la police afin de mettre un terme à sa cavale meurtrière. L’homme s’est procuré ses armes de manière illégale.
Opération à très haut risque
Deux agents du groupe d’intervention tactique, qui ont participé à l’intervention ayant mené au décès de M. Shaikh, ont témoigné mardi. Ils ont fait la lumière sur l'importante opération policière qui s'est déroulée dans un motel montréalais le 4 août 2022 et s'est soldée par la mort du suspect du triple meurtre.

Sur des caméras de surveillance du motel Pierre, on voit Abdulla Shaikh arriver avec de la nourriture à la réception. L’homme parle avec quelques clients de l’établissement. Il ira filmer une cigarette plus tard. Une importante opération est élaborée, l’homme est sous haute surveillance par les forces de l’ordre. Le suspect est isolé, donc il n’y a pas d’urgence d’agir, selon les témoignages entendus lors des audiences.

Le groupe tactique d’intervention, qui comporte huit policiers, arrive vers 5h du matin au motel. Il y a plusieurs scénarios possibles pour l’intervention, mais celui choisi est de créer un effet de surprise pour déstabiliser le suspect, prendre le contrôle de la situation et surtout minimiser le risque de détruire des preuves.

Et le plus important, selon le superviseur du GTI, il y a plusieurs clients au motel, et l’évacuation de ceux-ci est impossible. La police ne veut pas alarmer le suspect.
Barricadé dans sa chambre avec une arme à feu
Peu avant 7h le matin, les policiers du GTI s’approchent silencieusement de la chambre 139 en longeant les murs du motel. Ils se positionnent devant la porte, donne un premier coup avec leur bélier, mais la porte ne s’ouvre pas complètement. Abdulla Shaikh a placé des chaises et une table derrière la porte, érigé une barricade, et a attendu les policiers avec son arme à feu, selon la version des autorités.

Les policiers du groupe tactique d’intervention s’identifient, un deuxième coup de bélier est donné et cette fois la porte est défoncée. L’objectif est de maitriser le suspect avant qu’il prenne son arme à feu. Un des policiers aperçoit l’homme de 26 ans sur le lit, celui-ci ouvre le feu à deux reprises sur les agents. Une balle passe à quelques cm d’un membre du groupe.
Les policiers répliquent, en effectuant des déplacements tactiques pour se protéger. Deux policiers ouvrent le feu, 4 balles sont tirées en direction du suspect. Un dispositif de distraction est lancé, similaire à une grenade qui émet une lumière ultra puissante et un bruit assourdissant. Les policiers entrent dans la chambre quelques instants plus tard. Ils aperçoivent les pieds du suspect par terre, mais ils ne sont pas en mesure d’avoir un visuel précis sur l’individu; ils ne savent toujours pas si le suspect représente toujours une menace ou s’il tend un piège aux policiers.

Une arme intermédiaire est alors utilisée, soit des balles en plastiques pour tenter d’obtenir une réaction auprès d’Abdulla Shaikh. Deux projectiles sont tirés sur l’épaule du suspect. Celui-ci n’a aucune réaction.
À ce moment, les policiers s’approchent et trouvent l’homme inconscient. L’arme à feu se trouve tout prêt de lui par terre, de l’autre côté du lit. L’endroit est sécurisé, un des policiers du GTI entame des manœuvres de premiers soins sur la victime avant l’arrivée des ambulanciers. Le décès du suspect est par la suite confirmé.

Aucun citoyen et policier n’a été blessé dans l’opération, qui s’est déroulée en deux minutes.
La coroner Géhane Kamel préside l’enquête sur les meurtres d'André Lemieux, Mohamed Belhaj et Alex Lévis-Crevierm ainsi que sur le décès d'Abdulla Shaikh.
Lundi, l’enquête a révélé que le suspect est allé faire une virée à Toronto afin d’y visiter le zoo et un parc d’attractions quelques heures avant de commettre un troisième homicide à Laval. Les deux premières victimes ont été tuées à Montréal.
La police a déclaré qu'en moins d'une heure à Montréal le 2 août, M. Shaikh a tué par balle André Lemieux, 64 ans, qui se trouvait à l'intérieur d'un abribus et Mohamed Belhaj, 48 ans, qui se rendait au travail à pied. Environ 24 heures plus tard, à Laval, il a tué Alex Lévis-Crevier, 22 ans, qui faisait de la planche à roulettes dans la rue.
André Lemieux était le père de l'ex-boxeur professionnel David Lemieux, qui espère «obtenir des réponses» au terme de cette enquête.
M. Shaikh, qui avait des antécédents de problèmes de santé mentale, n’avait pas de casier judiciaire malgré quelques démêlés avec la justice.
