Un juge italien a ordonné mardi l’extradition vers l’Allemagne d’un Ukrainien arrêté fin août en Italie, soupçonné par la justice allemande d’être impliqué dans le mystérieux sabotage du gazoduc russe Nord Stream dans la mer Baltique en septembre 2022.
Serhii Kuznietsov, qui nie les faits, est soupçonné d’être l’un des coordinateurs du commando ayant saboté le gazoduc, et son arrestation le 21 août à Rimini (nord est de l’Italie) est la première dans cette affaire particulièrement sensible en raison de la guerre en Ukraine.
M. Kuznietsov, qui risque jusqu’à 15 ans de prison en Allemagne, va faire appel de la décision de la cour d’appel de Bologne et se pourvoir en cassation, a déclaré à l’AFP son avocat, Nicola Canestrini.
La Cour de cassation devrait rendre sa décision dans un délai d’un mois, selon lui.
L’avocat conteste également la détention provisoire de son client depuis son arrestation, et une audience devrait se tenir mercredi à Rome à ce sujet, a-t-il précisé à l’AFP.
Dans sa décision d’extradition, la cour d’appel de Bologne «ne voit pas de motifs s’opposant à la remise du suspect» à l’Allemagne.
M. Kuznietsov, âgé de 49 ans, a affirmé qu’il était à l’époque (et jusqu’en 2023) un commandant de l’armée ukrainienne, et affirme qu’il était en Ukraine au moment des faits, rappelle la cour d’appel de Bologne.
«Procès inéquitable»
Le statut militaire de Kuznietsov à l’époque des faits «ne peut être ignoré», a insisté l’avocat, estimant aussi que le pipeline pouvait être considéré comme «une cible militaire légitime» en raison du contexte de la guerre en Ukraine.
Me Canestrini a par ailleurs dénoncé un procès inéquitable et estimé que «les droits fondamentaux» de son client ne pouvaient «être sacrifiés au nom d’une coopération judiciaire automatique».
«Kuznietsov n’a pas été autorisé à assister personnellement à ses audiences et s’est vu refuser un accès complet au dossier allemand, en violation flagrante du droit à un procès équitable», a-t-il ajouté.
Le 26 septembre 2022, quatre énormes fuites de gaz précédées d’explosions sous-marines avaient eu lieu à quelques heures d’intervalle sur Nord Stream 1 et 2, des conduites reliant la Russie à l’Allemagne et acheminant l’essentiel du gaz russe vers l’Europe.
À cette époque, la Russie avait cessé de livrer du gaz via Nord Stream 1, sur fond de bras de fer avec les pays européens alliés de Kiev. Quant au gazoduc jumeau Nord Stream 2, pomme de discorde entre Berlin et Washington depuis des années, il n’était jamais entré en service.
Après le sabotage, des enquêtes judiciaires avaient été ouvertes séparément par l’Allemagne, la Suède et le Danemark. Elles ont été closes dans ces deux pays scandinaves en 2024.
L’enquête allemande a identifié une cellule ukrainienne composée de cinq hommes et d’une femme comme étant les auteurs des explosions du gazoduc.
Selon le parquet allemand, Kuznietsov a utilisé de faux documents d’identité pour louer un yacht parti de Rostock, dans le nord du pays.
De nombreuses pistes ont été évoquées, avec toujours en toile de fond l’hypothèse selon laquelle un État pourrait être le commanditaire de l’opération.
