Compte tenu des nombreux niveaux de droits de douane et d’exemptions imposés par les États-Unis, certains économistes affirment que le taux effectif sur le Canada est bien inférieur à ce que suggèrent les chiffres clés.
L’économiste principale de la Banque Royale (RBC), Claire Fan, a affirmé en entrevue que le taux effectif est la moyenne des droits d’importation payés sur les marchandises destinées aux États-Unis, qui tiennent compte des exemptions liées à l’Accord Canada-États-Unis-Mexique (ACEUM).
Bien que le président américain Donald Trump ait augmenté les droits de douane généraux sur le Canada à 35 % au début du mois, cette mesure a maintenu une exemption pour les marchandises conformes à cet accord commercial.
La Banque Royale estime que le taux effectif sur les marchandises canadiennes est plus proche de 6 % aujourd’hui. Les calculs de la BMO, effectués au début du mois, situent ce chiffre légèrement plus haut, autour de 7 %.
La Banque du Canada a déclaré fin juillet, avant la dernière escalade de Donald Trump, qu'elle estimait le taux tarifaire effectif américain à environ 5 %, contre presque rien au début de l'année.
Le calcul de la Banque Royale est basé sur les données sur le volume des exportations de 2024. D'autres séries de données offrent des mesures légèrement différentes de la pression douanière à laquelle font face les entreprises.
Mme Fan a déclaré que, selon les données publiées par le Bureau du recensement des États-Unis, le taux effectif du Canada était d'environ 2,4 % en juin, avant l'entrée en vigueur de la dernière vague de hausses des droits de douane.
Ce chiffre reflète les droits réels payés à la frontière canado-américaine, a-t-elle précisé, et pourrait être infirmé en raison des retards de déclaration et de la confusion générale concernant les niveaux douaniers parmi les entreprises.
«Il n'est pas surprenant qu'il y ait une certaine confusion aux douanes.»
Le taux effectif pourrait également être plus bas en pratique, car les entreprises américaines se détournent des importations de produits canadiens soumis aux droits les plus élevés, a ajouté Mme Fan.
Si le taux effectif offre une explication simple du niveau total des droits de douane américains auxquels le Canada est confronté, l'économiste de la RBC a averti qu'il peut sous-estimer l'impact sur le terrain.
«Ce n'est pas le meilleur indicateur de la sévérité des droits de douane, mais c'est malheureusement l'un des seuls dont nous disposons», a-t-elle concédé.
La conformité à l'ACEUM n'exempte pas globalement les produits canadiens des droits sectoriels, comme ceux imposés en vertu de l'article 232 de la législation commerciale américaine.
Les droits de douane américains de 50 % sur l'acier et l'aluminium, par exemple, auront un impact considérable sur ces secteurs à l'avenir, a prévenu Claire Fan.
À environ 6 %, le taux effectif du Canada est bien inférieur au taux cumulatif auquel sont actuellement confrontés les autres partenaires commerciaux des États-Unis, que RBC évalue de 15 à 17 % environ.
«C'est là le point essentiel, et c'est pourquoi nous sommes toujours l'un des pays les moins assujettis aux droits de douane américains à l'heure actuelle», a déclaré Mme Fan.
Les économistes ne savent pas exactement quelle quantité de marchandises canadiennes entrant aux États-Unis est exemptée de droits de douane en vertu de l'ACEUM.
La Banque du Canada a indiqué dans son rapport sur la politique monétaire de fin juillet qu'elle présumait que les entreprises canadiennes se conformeraient collectivement à l'ACEUM pour 95 % des biens non énergétiques, dans un scénario où la situation douanière se maintiendrait au cours des trois prochaines années.
La banque centrale ne présume pas d'une conformité parfaite, car certaines entreprises pourraient ne pas vouloir s'acquitter des formalités administratives liées à l'obtention d'une exemption.
Mme Fan a ajouté que l'exemption de conformité à l'ACEUM est l'élément essentiel qui confère aux exportateurs canadiens un «avantage concurrentiel» par rapport aux autres économies fortement soumises à des droits de douane.
Adam Slater, économiste en chef chez Oxford Economics, a indiqué dans un rapport publié lundi que, malgré l'énorme incertitude liée aux perturbations des échanges commerciaux avec les États-Unis, le Canada et le Mexique pourraient tirer profit de l'ACEUM tant que celui-ci demeurera en vigueur.
L'accord commercial doit être renégocié en 2026.
Selon les données du Bureau du recensement des États-Unis de juin, Oxford estime que le taux de droits de douane effectif pour la Chine s'élève à 35 %, pour le Japon à 15 % et pour le Royaume-Uni à 8 %.
Le cabinet estime que, à 2,5 %, le taux effectif du Canada est légèrement supérieur à l'estimation de RBC basée sur les données du Bureau du recensement des États-Unis, tandis que celui du Mexique est estimé à 4 %.
«Si les droits de douane relativement bas apparemment payés sur les importations en provenance du Mexique et du Canada persistent, ces deux économies pourraient tirer profit des changements dans les chaînes d'approvisionnement, même si les incertitudes sur la fin des droits de douane et l'avenir de l'accord (ACEUM) constitueront des freins à court terme», a écrit M. Slater.

