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M. Cliche-Rivard s'inquiète des conséquences de l'application des tarifs américains et des tarifs de rétorsion canadiens sur l’économie québécoise.
Le premier ministre François Legault s'est montré «très ouvert» à la suggestion du leader parlementaire de Québec solidaire, Guillaume Cliche-Rivard, de tenir un débat d'urgence à l'Assemblée nationale sur la guerre commerciale qui s'est amorcée entre les États-Unis et le Canada.
Dans une déclaration publiée sur les réseaux sociaux en fin de journée, M. Legault a rappelé qu'il allait «falloir se serrer les coudes et prendre toutes les bonnes idées».
Dans une lettre envoyée samedi à la présidente de l'Assemblée nationale du Québec, M. Cliche-Rivard, s'inquiète des conséquences de l'application des tarifs américains et des tarifs de rétorsion canadiens sur l’économie québécoise et sur les entreprises et travailleurs de la province.
Le député solidaire soutient à la présidente de l'Assemblée, Nathalie Roy, que la rapidité à laquelle évolue ce dossier rend «d’autant plus urgente une prise de position et une action concertée» afin de protéger les intérêts économiques du Québec.
«Face à ces enjeux, il est impératif que l’Assemblée nationale tienne un débat d’urgence afin d’évaluer l’impact de ces mesures et de définir des actions pour protéger l’économie québécoise.»
L'élu rappelle que l'économie québécoise repose en grande partie sur l'exportation.
«Nous, on est d'avis que, rapidement, il faut absolument qu'il y ait des débats entre les parlementaires pour que tout le monde puisse apporter ses propositions, ses analyses, pour qu'on puisse avancer dans l'intérêt du Québec», a insisté M. Cliche-Rivard dimanche matin en entrevue avec La Presse Canadienne.
Il restera à Mme Roy de trancher mardi matin, au début de la prochaine session parlementaire, mais le député de QS se dit optimiste en la matière. «Ça m'apparaît assez consensuel. (...) Je m'attends à avoir de l'appui de la part de mes collègues des autres formations politiques du gouvernement pour qu'on puisse avoir ce débat-là.»
Le député estime que le Québec doit éviter de se retrouver assailli sur deux fronts: le premier, celui des pertes d'emploi dues aux mesures d'austérité, et le second, celui des pertes d'emplois dues aux tarifs de M. Trump. «On va demander au premier ministre Legault de stopper ses mesures d'austérité, puis de protéger les emplois de Québécois», a ajouté M. Cliche-Rivard.
Au terme d'une réunion avec le caucus de la CAQ, M. Legault a reconnu que l’inquiétude était grande dans les régions. «On va être très attentif aux économies régionales qui pourraient être frappées de plein fouet», s'est-il engagé.
Le premier ministre a mis en garde contre un certain optimiste. Selon lui, les tarifs ne seront pas abolis de sitôt. Il serait même dangereux de penser le contraire, a-t-il ajouté. «Il faut au contraire nous préparer à ce que notre système économique soit perturbé sur une longue période. Et en affaires, je peux vous dire qu’il n’y a rien de pire que l’incertitude.»
M. Legault a annoncé qu'il rencontrerait lundi certains dirigeants du système financier et économique québécois. Son agenda indique notamment des rencontres avec le président et chef de la direction du Mouvement Desjardins, Guy Cormier, le président et chef de la direction de la Banque Nationale, Laurent Ferreira, le président et chef de la direction de la Caisse de dépôt et placement du Québec, Charles Emond, la présidente-directrice générale d’Investissement Québec, Bicha Ngo, et le président-directeur général d’Hydro-Québec, Michael Sabia.
Il a tenté de rassurer ceux qui pourraient perdre éventuellement leur emploi.
«On va faire le maximum pour rediriger les travailleurs qui vont perdre leur emploi vers d’autres secteurs porteurs d’avenir. Hydro-Québec, par exemple, a lancé un chantier de 150 milliards $, pour augmenter notre production d’électricité et rénover et renforcer notre réseau de transport d’électricité», a-t-il écrit.
Le chef du Parti Québécois (PQ), Paul St-Pierre Plamondon, a quant à lui longuement réagi sur le réseau social X face aux décisions de Québec pour gérer la crise.
«Constatant que nous ne disposons d’aucune information de la part du gouvernement et que les actions de la CAQ demeurent très opaques, nous souhaitons éviter les erreurs de la pandémie de même que prévenir les décisions précipitées qui pourraient causer plus de tort que d’apaisement de la situation», a déclaré le chef péquiste.
Il a critiqué la réponse d'Ottawa d'imposer des contre-tarifs de 25% sur les produits américains, qui selon lui, «ne représentent que le 1/10 de la valeur de nos importations des États-Unis».
Pour Paul St-Pierre Plamondon, la réponse de Québec n'est pas non plus à la hauteur. Il a balayé d'un revers de la main l'idée défendue par François Legault que «l’immense chantier d’Hydro-Québec va nous aider à créer des emplois qui vont remplacer ceux qui sont perdus», en affirmant que cela «ne tient pas la route».
«Une escalade des tarifs entraînera en toute probabilité le retour de l’inflation, avec les conséquences qu’on connaît sur le consommateur québécois», a ajouté le chef péquiste.
Il a ensuite mis de l'avant des propositions pour que le Québec puisse répondre aux tarifs américains telles que la réduction du fardeau fiscal des PME, de rendre non imposables les nouveaux revenus d'exportations ou d'augmenter les achats de produits québécois. M. St-Pierre Plamondon mise également sur la réindustrialisation de l'économie québécoise et propose d'«adopter rapidement un grand plan de réduction de la paperasse, de la surréglementation et des contrôles administratifs».
«Nul doute que nous devons riposter, mais avant de tout mettre nos œufs dans le panier d’une hypothèse que nous gagnerons une guerre tarifaire contre les États-Unis, agissons rapidement sur ce que nous pouvons faire pour aider nos entreprises à se trouver de nouveaux partenaires et à s’adapter à ce nouveau contexte», a déclaré Paul St-Pierre Plamondon
Une hausse des droits de douane sans précédent
Samedi, le président américain Donald Trump a annoncé que sa menace de tarifs douaniers se concrétiserait dès mardi. Il a signé un décret imposant des droits de douane de 25 % sur tous les produits canadiens et de 10 % sur l'énergie canadienne.
En réponse, le premier ministre Justin Trudeau a annoncé en soirée des contre-tarifs douaniers de 25 % sur des produits américains. Une première salve de tarifs de rétorsion sera lancée dès mardi également sur 30 milliards $ de produits américains, et dans 21 jours, sur 125 milliards $ de marchandises.
Par la suite, c'est le premier ministre québécois qui a annoncé la riposte de la province. François Legault a indiqué qu'il comptait pénaliser les entreprises américaines qui travaillent d’une manière ou d’une autre avec son gouvernement. «On doit se tenir debout. On doit se battre pour protéger notre économie, pour protéger nos emplois», a lancé M. Legault, qui a fait une déclaration, samedi en soirée, à Montréal.
M. Legault s’est dit conscient que des entreprises québécoises vont être «très affectées» par les tarifs américains et a prévenu que plus de 100 000 emplois pourraient être perdus. Il a ensuite évoqué la possibilité que des projets d'infrastructure soient accélérés, afin de créer des emplois pour remplacer ceux qui seraient potentiellement perdus.
La ministre québécoise de l'Économie, Christine Fréchette, a indiqué dimanche matin sur les ondes de Radio-Canada que l'aluminium, l'aéronautique, l'agriculture ou encore la foresterie seront parmi les secteurs les plus affectés par ces tarifs, même si tous les milieux seront touchés. Elle a ajouté que les mesures d'aide du gouvernement commenceront à être déployées dans les prochains jours. Elle a aussi invité les entreprises à diversifier leurs marchés.
«Notre objectif est de mettre fin à cette guerre tarifaire là le plus rapidement possible. Plus elle sera brève, moins les pertes d'emplois seront importantes, a soutenu la ministre. Je pense qu'on a des outils pour avoir de l'impact aux États-Unis.»