Gabriel Nadeau-Dubois martèle que 500 000 immigrants temporaires au Québec c’est beaucoup trop, mais il refuse de s’avancer sur ce qui serait un nombre acceptable, préférant s’en remettre à une éventuelle évaluation par un comité d’experts.
À l’ouverture du caucus présessionnel de Québec solidaire (QS), jeudi matin à Laval, le chef parlementaire de Québec solidaire a reconnu que l’explosion du nombre d’immigrants temporaires au cours des dernières années ajoute une pression sur les services publics ainsi que sur la crise du logement, mais il répète qu’elle n’en est pas la cause. Cette crise, selon lui, est en préparation depuis une décennie et elle est entièrement imputable à l’inaction des gouvernements.
Bien qu’il soit d’accord avec le premier ministre François Legault sur le fait que le Québec accueille plus que sa part de demandeurs d’asile et que le reste du Canada doit en prendre davantage, il rappelle que c’est le Québec qui contrôle l’immigration temporaire d'étudiants et de travailleurs. Or, la situation actuelle est une démonstration très claire que le modèle ne fonctionne pas.
«L'immigration temporaire, c'est un mauvais modèle pour les personnes immigrantes parce que c'est synonyme de précarité.»
Une immigration privatisée
Les travailleurs temporaires, dit-il, ne font pas que ramasser des fraises dans les champs; ils sont également dans les résidences pour personnes âgées, dans des industries. Le problème, fait-il valoir, c’est que cette approche d’immigration «privatisée» crée une main-d’œuvre précaire, fragilisée par son statut, alors qu’il faudrait plutôt se tourner vers l’immigration permanente régionalisée, francisée et mieux intégrée.
«Est-ce que ce qu'on veut, c'est une immigration qui est privatisée, où les entreprises, selon leurs besoins d'un devis immédiat, font venir des gens de l'extérieur pour travailler sur des statuts temporaires? Ou est-ce qu'on veut une immigration permanente, régionalisée, francisée, qui s'intègre à la société québécoise? Je ne veux pas qu'on se laisse aveugler par le débat de chiffres. Il faut qu'on ait le débat aussi sur le modèle.»
Toutefois, aller dans cette direction implique nécessairement d’aborder les seuils d’immigration permanente, un seuil que Québec solidaire ne fixe pas de manière absolue, préférant parler d’une fourchette de 60 000 à 80 000. La formation politique reproche d’ailleurs au Parti québécois de proposer un seuil irréaliste de 35 000, alors qu’elle accuse la Coalition avenir Québec (CAQ) de parler d’un seuil de 50 000 en faisant abstraction de l’entrée massive d’immigrants temporaires.
Un caucus régional
Les députés de Québec solidaire, qui sont réunis pour préparer la prochaine session parlementaire, doivent également discuter du coût de la vie élevé, notamment en ce qui a trait à l'alimentation, le logement et les hypothèques. Une de ses propositions pour alléger ce fardeau est de rapatrier au Québec et de bonifier le programme fédéral de soins dentaires, la santé étant une juridiction exclusive du Québec. Gabriel Nadeau-Dubois signale au passage qu'un Québécois sur cinq se prive de soins dentaires à cause des coûts que cela représente.
À ses côtés, la nouvelle co-porte-parole de la formation, l'ancienne députée de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, Émilise Lessard-Therrien, a annoncé la formation d'un caucus régional où chaque député aura la responsabilité d'une région. Elle reproche à la CAQ de négliger les régions. «La CAQ fonctionne avec des ministres top gun. Il y a des ministres régionaux qu'on entend très peu. Je ne les ai pas entendus parler des impacts de la réforme Dubé dans leur région. Je ne les ai pas entendus parler des impacts de la réforme Drainville. (...) Nous, on veut que les députés de Québec solidaire puissent être le relais de cette voix-là.»
Québec solidaire entend consacrer ses énergies sur le logement à la prochaine session
Québec solidaire entend taper sur le clou de la construction de logements lors de la prochaine session parlementaire, estimant qu’il s’agit là du plus important dossier pour les Québécois, et dit vouloir s’inspirer d’un programme vieux d’une quarantaine d’années, le programme Corvée habitation.
À l’issue du caucus de la formation politique visant à préparer la rentrée parlementaire, jeudi à Laval, les deux porte-parole, Gabriel Nadeau-Dubois et Émilise Lessard-Therrien, ont présenté les grandes orientations de ce que devrait être un nouveau programme pour relancer la construction de logements.
«Le Québec est dû pour une nouvelle corvée habitation. Une corvée habitation qui serait adaptée à la réalité d'aujourd'hui, puis qui serait fondée sur le même esprit d'innovation, de concertation, de rassemblement que le succès qu'on a connu dans les années 80», a lancé Gabriel Nadeau-Dubois.
Les deux n’ont pas manqué, au passage, de dénoncer vigoureusement le Programme d’habitation abordable du Québec (PHAQ) qui a remplacé le programme Accès-Logis et qui, en deux ans, n’a mené qu’à la mise en chantier de 46 unités d’habitation dont aucune n’est encore prête à recevoir des occupants.
«Deux ans plus tard, le bilan de leur programme, c'est zéro logement construit. La preuve est dans le pudding. Le programme de la CAQ ne marche pas. C'est un échec total et on est en pleine crise du logement. C'est inadmissible. C'est un bilan gênant», a pesté M. Nadeau-Dubois.
Paperasse, taux préférentiels et bigénérationnelles
Québec solidaire propose d’activer la construction de logement sur trois axes, soit de commencer par élaguer la paperasse, la complexité du PHAQ étant une des raisons de son inefficacité. Puis, devant le retrait du secteur privé de la construction d’habitations, de retourner vers l’investissement public en offrant des taux préférentiels pour la construction de logements sociaux, communautaires et abordables.
Enfin, la formation de gauche suggère d’offrir des incitatifs financiers pour favoriser le regroupement familial sous un même toit, notamment par la construction d’habitations bigénérationnelles ou la rénovation d’habitations unifamiliales pour y accommoder plus d’une génération.
L’ex-députée de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, Émilise Lessard-Therrien, qui s’affirme de plus en plus comme la porte-étendard des régions, a insisté sur le fait que la nouvelle réalité de la crise du logement, c’est qu’elle atteint toutes les régions. «Les mises en chantier sont en chute libre partout au Québec. Moins 21 % pour Sherbrooke, moins 40 % pour Québec, moins 33 % pour Drummondville, moins 31 % à Gatineau. Le 1er juillet dernier, il n'y avait littéralement aucun logement de disponible à Roberval ou à Gaspé.»
«La vérité, a-t-elle tranché, c'est que François Legault n'a pas livré la marchandise dans les régions qui ont voté pour la CAQ.»

