Société

Port du casque à vélo: pas d’obligation en vue au Québec

Le Québec est une de trois provinces canadiennes qui n'imposent pas le port du casque à vélo, même pour les mineurs.

Mis à jour

Publié

Le taux de port du casque est de 70% au Québec selon une étude terrain effectuée en 2021 par la SAAQ. Le taux de port du casque est de 70% au Québec selon une étude terrain effectuée en 2021 par la SAAQ. (Photo : Paul Chiasson | La Presse canadienne)

Le Québec est une de trois provinces canadiennes qui n'imposent pas le port du casque à vélo, même pour les mineurs. Alors que neuf cyclistes sont décédés sur les routes du Québec l’an dernier et que 70 ont été gravement blessés, il y a lieu de se demander: est-ce qu'on sauverait des vies en le rendant obligatoire?

 

En octobre 2020, un cycliste qui ne portait pas de casque est décédé à Sherbrooke après avoir happé la portière qu’un automobiliste venait d’ouvrir. Dans son rapport au sujet de ce décès, la coroner Me Kathleen Gélinas s’«explique mal le fait que le casque protecteur ne soit pas obligatoire pour tout type de cycliste.»

Elle recommandait alors à la Ville de Sherbrooke d’évaluer la possibilité de rendre obligatoire le port du casque protecteur chez tous les cyclistes. Il faut dire que Sherbrooke est l’une des rares villes québécoises où le port du casque est obligatoire à bicyclette pour les mineurs. 

Or, pour certains intervenants, bien que le casque soit une protection importante qui permet de sauver des vies, l’obligation légale n’est pas la solution.

«On invite les gens à porter un casque quand ils font du vélo. Par contre, on est contre une obligation, donc une loi qui rendrait obligatoire le port du casque chez toute ou une partie de la population» explique Magali Bebronne, directrice des programmes à Vélo Québec 

«Quand on parle d'imposer une mesure à une population globale, c'est là où il faut bien peser les avantages et les désavantages d'une mesure. Et d'après ce que l'Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) a émis comme avis, une loi qui rendrait le port du casque obligatoire pourrait avoir des effets pervers qui viendraient contrebalancer les avantages qu'on en attendrait», poursuit-elle. 

En effet, dans un avis scientifique daté de 2018 au sujet de la pertinence de rendre le casque obligatoire, l’INSPQ conclut qu’ «on ne peut pas exclure la possibilité qu’une telle loi ait un effet négatif sur la pratique du vélo, en particulier chez les jeunes.»

«Ce phénomène, si minime soit-il, causerait plus de tort que de bien d’un point de vue de santé publique puisque les bienfaits sur la santé liés à la pratique du vélo sont supérieurs au risque de blessure», poursuit l’avis scientifique.

Une théorie qui n'est pas partagée par la coroner Kathleen Gélinas qui estime quant à elle que «ces craintes sont non fondées» puisque la réglementation sur les mineurs à Sherbrooke n’aurait pas eu d’impact négatif sur l’usage du vélo selon les statistiques qu’elle a présenté dans son rapport.

Quel effet sur les comportements? 

Dans son avis, l’INSPQ se demande également quel impact une obligation aurait concrètement sur la modification des comportements par les cyclistes. Selon son analyse, le taux de port du casque ne dépasse pas 80% dans les législations où les administrations l'ont rendu obligatoire. 

Or, la proportion de cyclistes qui portent un casque au Québec n’est déjà pas loin de ce seuil. En effet, le taux de port du casque est de 70% au Québec selon une étude terrain effectuée en 2021 par la SAAQ. 

D’autres pistes de solutions pour protéger les cyclistes? 

Dans son rapport, l’INSPQ recommande d’agir en amont et de mettre en place des infrastructures permettant d’éviter que ne se produisent des accidents. 

«Comparativement au casque de vélo, cette mesure permet non seulement de prévenir une bonne proportion des blessures à la tête, mais également d’autres types de blessures graves pouvant même entraîner le décès. De plus, les infrastructures créent des environnements sécuritaires favorisant l’adoption d’un mode de vie sain et actif», écrivent les auteurs de l’avis scientifique.

Magali Bebronne de Vélo Québec partage cet avis.

«On sait que ça marche pas parce qu'on a réduit drastiquement le nombre de blessés graves à vélo sur les routes du Québec au cours des 20 dernières années, malgré la hausse de la pratique et malgré la hausse du taux de motorisation. Et ça, on le doit au fait qu'on a doublé l'étendue de nos réseaux cyclables au Québec», explique-t-elle.

«Alors, continuer à construire des réseaux cyclables, c'est la voie à suivre», conclut-elle. 

Julien Bouthillier

Julien Bouthillier

Journaliste