Les médiateurs font la navette depuis le 6 juillet entre les négociateurs d’Israël et du mouvement islamiste palestinien Hamas en vue d’un éventuel accord de trêve à Gaza après plus de 21 mois de guerre et des craintes d’une «propagation de la famine».
Depuis la trêve de deux mois en début d’année, les belligérants campent sur leur positions.
Mais les enjeux sont aujourd’hui plus importants en raison du nombre croissant de décès de Palestiniens qui meurent de faim ou souffrent de malnutrition selon les hôpitaux à Gaza.
Israël fait face à une pression internationale accrue pour mettre fin à la guerre et ouvrir les passages pour l’aide humanitaire qui entre au compte-gouttes.
Alliés d’Israël, les États-Unis, l’un des trois pays médiateurs avec le Qatar et l’Égypte, ont annoncé que leur émissaire Steve Witkoff se rendrait en Europe cette semaine pour discuter d’un cessez-le-feu et d’un couloir d’acheminement de l’aide à Gaza.
Que veulent les belligérants?
Après plus de deux semaines de va-et-vient, les efforts des médiateurs sont au point mort. Mais les médiateurs se refusent à commenter l’état des négociations et affirment juste qu’elles se poursuivent.
La proposition sur la table prévoit un cessez-le-feu de 60 jours et la libération de 10 otages vivants retenus à Gaza en échange de centaines de prisonniers palestiniens.
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Israël veut détruire le Hamas, le chasser de Gaza et prendre le contrôle du territoire, tandis que le Hamas réclame l’arrêt de la guerre et le retrait des troupes israéliennes de Gaza.
Le Hamas réclame aussi des garanties pour une fin durable de la guerre. Israël refuse.
«La dure réalité est que, pour des raisons de politique intérieure, ni (le premier ministre israélien) Benjamin Netanyahu ni les dirigeants du Hamas à Gaza n’ont intérêt à voir une issue rapide et un cessez-le-feu total», explique Karim Bitar, maître de conférences en études moyen-orientales à Sciences Po Paris.
«Tous deux devraient répondre à de sérieuses questions de la part de leurs propres électeurs», dit-il.
La situation à Gaza complique-t-elle les négociations?
La situation sur le terrain avec la poursuite des bombardements israéliens meurtriers et dévastateurs à Gaza complique davantage les négociations, selon des sources proches des discussions.
L’armée israélienne a étendu cette semaine son offensive à des zones de Gaza qui étaient épargnées par les opérations terrestres depuis le début de la guerre.
Il y a «des aspects techniques assez difficiles à surmonter parce qu’il y a des problèmes de communication entre la direction du Hamas à Gaza et les négociateurs à Doha» en raison de la guerre, observe M. Bitar.
Selon des médias israéliens, les négociateurs du Hamas à Doha n’ont pas été en mesure de communiquer directement avec la direction militaire du mouvement à Gaza pour approuver des cartes et le mécanisme d’application de la proposition de trêve.
Pour Andreas Krieg, analyste du Moyen-Orient au King’s College de Londres, « ce qui est sur la table aujourd’hui n’est en fait qu’un nouvel accord d’échange de prisonniers (Palestiniens contre des otages israéliens enlevés lors de l’attaque du 7 octobre 2023 et retenus depuis à Gaza), et non un véritable accord de cessez-le-feu », dit-il.
Le Hamas est confronté à un dilemme: il est sous pression pour obtenir des concessions de la part d’Israël, mais « d’un autre côté, il est confronté à une situation humanitaire de plus en plus désespérée » dans la bande de Gaza, ajoute-t-il.
«Il se peut que les dirigeants (du Hamas) se demandent jusqu’où ils peuvent faire des compromis sans donner l’impression de capituler sur le plan politique», estime M. Krieg.
Le risque de famine peut-il accélérer une trêve?
Plus de deux millions de personnes à Gaza sont confrontées à de graves pénuries alimentaires, et plus d’une centaine d’ONG mettent en garde contre «une propagation de la famine» dans le territoire.
Mardi, le directeur du plus grand hôpital de Gaza a déclaré que 21 enfants étaient morts de malnutrition et de faim en trois jours.
«La pression humanitaire augmente rapidement», souligne M. Krieg, le Hamas étant confronté au «désespoir croissant de la population, qui pourrait l’obliger à accepter un accord provisoire pour alléger les souffrances».
Mais même si le Hamas cède, Israël a le dessus et aucun cessez-le-feu ne peut tenir, estime M. Bitar. «Je crains que ce cycle de négociations n’échoue comme les précédents, à moins que les États-Unis et le Qatar n’augmentent considérablement la pression sur Israël».
