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Ottawa vient à la rescousse des transformateurs et des producteurs laitiers qui sont aux prises avec ce qu’il reste du lait quand on en a extrait le gras, notamment pour faire du beurre ou de la crème.
Ces résidus, que l’on appelle des solides non gras du lait (SNG), sont riches en protéines et en minéraux, mais doivent être transformés pour avoir une seconde vie auprès des consommateurs.
Or, il y a de plus en plus de ces solides en raison de changements d’habitudes chez les consommateurs.
«La cause première (de la croissance des surplus de SNG), c'est la consommation de types de produits laitiers qui a connu une croissance dans les dernières années, par exemple la crème et le beurre», a expliqué le président et chef de la direction de l’Association des transformateurs laitiers du Canada, Mathieu Frigon, en conférence de presse vendredi au Centre de recherche et de développement d’Agriculture Canada, à Saint-Hyacinthe.
Il a ajouté que les récents accords commerciaux, notamment celui avec les États-Unis et le Mexique et celui avec l’Europe, «ont créé beaucoup d'incertitude du côté des entreprises pour investir pour traiter ce lait écrémé».
D’où l’annonce du ministre fédéral de l’Agriculture, Lawrence MacAuley, d’offrir aux transformateurs une enveloppe de 333 millions $ sur dix ans pour soutenir leur modernisation, l’agrandissement ou même la construction de nouvelles installations et d’autres types d'investissements qui permettront de traiter une plus grande part de SNG.
«À ce jour, on n'a pas trouvé de façon de dire à une vache de ne pas produire!» a blagué le secrétaire parlementaire du ministre de l’Agriculture, Francis Drouin, qui participait à l’annonce aux côtés du ministre.
Avec un accroissement de production des transformateurs, «il y a des produits dérivés qui vont pouvoir être faits, je m'attends à ce que le secteur innove dans ces nouveaux produits et ce qui est bon pour le transformateur va être bon pour le producteur laitier en bout de ligne. En ce moment, le seul marché souvent qu'ont les producteurs laitiers, c'est pour la nourriture destinée aux animaux», a ajouté M. Drouin.
Ottawa avait promis, en concluant des accords commerciaux qui ouvraient une brèche dans les marchés protégés des productions sous gestion de l’offre, de compenser les producteurs et transformateurs. Et même si ce sont les choix des consommateurs qui sont la première cause de la croissance des surplus, l’ouverture des marchés avait freiné l’investissement, a fait valoir M. Frigon.
Francis Drouin l’a clairement reconnu en affirmant que cette enveloppe «conclut l'ensemble du soutien promis aux producteurs et transformateurs suite aux pertes de marché des récents accords commerciaux».
Du même souffle, M. Drouin a repris les propos tenus en anglais quelques instants auparavant par son ministre: «Le gouvernement du Canada va continuer à sauvegarder, protéger et défendre la gestion de l'offre. Nous ne ferons plus de concessions commerciales dans les secteurs sous gestion de l'offre.»
Ces propos étaient certainement de la musique aux oreilles de Daniel Gobeil, vice-président des producteurs laitiers du Canada et président des producteurs de lait du Québec. «Merci, M. MacAuley de votre soutien à la gestion de l'offre. Je suis très content d'entendre votre engagement face à la gestion de l'offre», a-t-il déclaré.
Même si l’aide ne sera pas versée directement aux producteurs laitiers, ceux-ci verront un raffermissement de la chaîne d’approvisionnement et de meilleurs débouchés pour leurs résidus de SNG.
La question des accords commerciaux et de libre-échange a souvent été source de différends entre Ottawa et les producteurs de lait, de volailles et d’œufs, des productions qui sont toutes protégées par le système de gestion de l’offre. Les différents gouvernements fédéraux ont toujours promis de les protéger lors de négociations de libre-échange, mais les partenaires internationaux ont souvent réussi à forcer le Canada à plier l’échine et accepter des brèches dans cette protection.
En retour, Ottawa avait dû s’engager à verser des compensations et de l’aide aux producteurs et transformateurs, aide dont l'enveloppe de vendredi représente le dernier volet dans le secteur laitier.
Il n’y a aucun doute que le secteur sera prêt à faire sa part dans la modernisation et l’accroissement de la transformation des SNG: l’aide annoncée vendredi ne couvrira que de 25 % à 33 % des investissements effectués par les transformateurs. En d’autres termes, le secteur privé assumera entre les deux tiers et les trois quarts des investissements requis.
Le Québec recevra 109 millions $ de l’enveloppe de 333 millions $ sur dix ans. L’Ontario en recevra 127 millions $, alors que 74 millions $ et 18 millions $ sont destinés, respectivement, aux provinces de l’Ouest et aux provinces de l'Atlantique.