Le chef d'une organisation représentant les constructeurs automobiles s'est dit «prudemment optimiste» après avoir rencontré le premier ministre Mark Carney pour l'exhorter à abroger l'obligation de vente de véhicules électriques.
Brian Kingston, PDG de l'Association canadienne des constructeurs de véhicules, s'est joint aux PDG de Ford Canada, Stellantis Canada et GM Canada lors d'une réunion avec le premier ministre mercredi à Ottawa.
En plus de discuter de l'impact des droits de douane américains – principal sujet de la réunion –, les constructeurs automobiles ont indiqué à M. Carney que l'industrie ne pouvait en aucun cas atteindre les objectifs fixés par l'obligation de vente de véhicules électriques.
L'industrie soutient depuis longtemps que cette obligation est inutile, le Canada ayant déjà d'autres politiques pour atteindre ses objectifs de réduction des émissions.
«Pourquoi ajouter une obligation de vente de véhicules électriques à votre réglementation actuelle (sur les gaz à effet de serre)? C'est totalement insensé», a fait valoir M. Kingston à La Presse Canadienne.
«Ce qui a changé depuis sa conception et son entrée en vigueur, c'est l'effondrement des ventes de véhicules électriques.»
La politique de l'obligation stipule qu'à compter de l'année prochaine, 20 % de tous les nouveaux véhicules légers vendus au Canada devront être à zéro émission, et cet objectif augmentera chaque année pour atteindre 100 % d'ici 2035.
Les données les plus récentes de Statistique Canada indiquent que les ventes de véhicules électriques au pays ont chuté à 7,53 % de toutes les ventes de véhicules neufs en avril.
Fin des incitatifs fédéraux
Même avec l'aide du populaire Programme d'incitatifs pour les véhicules zéro émission (iVZE), qui offrait une réduction de 5000 $ sur le prix d'un véhicule électrique neuf, les ventes de véhicules électriques ont culminé à 18,29 % en décembre 2024. Le programme de remise iVZE a été suspendu en janvier, après l'épuisement du financement.
Les ventes ont chuté à 11,95 % en janvier à la fin du programme de remise, puis à 6,8 % en février et à 6,53 % en mars, avant de remonter légèrement en avril.
«Si nous voulons atteindre l'objectif obligatoire de 20 % des ventes de véhicules électriques d'ici 2026, il faudrait augmenter les ventes de véhicules zéro émission de 180 000 unités», a affirmé Brian Kingston.
«Il est tout simplement impossible que cela se produise dans un délai aussi court, compte tenu de toutes les forces du marché en jeu.»
Bien que le gouvernement ait indiqué son intention de rétablir une forme de rabais à la consommation pour les véhicules électriques, M. Kingston a déclaré qu'une telle promesse sans calendrier précis de mise en œuvre risque de nuire davantage aux ventes de véhicules électriques.
En mai, après une rencontre avec la direction de General Motors, la ministre de l'Industrie, Mélanie Joly, a déclaré aux journalistes que le gouvernement envisageait de rétablir des «programmes de soutien» pour les véhicules électriques. Le mois dernier, la ministre de l'Environnement, Julie Dabrusin, a déclaré à La Presse Canadienne qu'Ottawa travaillait au rétablissement d'un programme de rabais spécifique.
La plateforme électorale du Parti libéral promettait d'examiner les moyens de «réintroduire un incitatif à l'achat pouvant aller jusqu'à 5000 $».
«Les commentaires publics de ministres suggérant le retour d'un programme incitatif pour les véhicules électriques sont extrêmement préjudiciables», a prévenu M. Kingston.
«C'est un énorme problème. Si le gouvernement veut le rétablir, il doit être clair quant à son plan et à son échéancier. Et il faut agir vite, car, si on annonce que ce sera dans trois mois, personne n'achètera de véhicule électrique pendant les trois prochains mois.»
Transports Canada mène des consultations sur le programme de rabais. Le PDG de Hyundai Canada, Steve Flamand, qui a réclamé le retour du rabais, rencontrera des représentants du ministère pour en discuter la semaine prochaine.
«Pour nous, le programme a plutôt bien fonctionné», a expliqué M. Flamand à La Presse Canadienne.
Il a ajouté que la fin soudaine du programme iVZE a perturbé les chaînes d'approvisionnement de son entreprise.
«Évidemment, il faut que ce soit prévisible et stable, car notre activité ne change pas en quelques jours, a-t-il ajouté. Elle pivote par tranches de six mois.»
M. Flamand a déclaré que son entreprise n'était pas opposée à l'obligation d'achat de véhicules électriques, tant qu'elle s'aligne sur la demande du marché.
«Nous croyons en la cause, mais pour l'instant, je pense que 20 % (…) ce n'est tout simplement pas réaliste. Personne ne le fera», a-t-il dit.
«Avoir une obligation irréaliste sans la demande naturelle du marché est la recette du désastre.»
Brian Kingston a estimé que le rétablissement du programme de rabais – réclamé par le PDG de Hyundai, Steve Flamand, dans une chronique publiée jeudi dans le «Globe and Mail» – ne suffirait pas à respecter l'obligation relative aux véhicules électriques.
«Pour vous donner une idée du coût d'un incitatif de 5000 $ et d'une augmentation des ventes de 180 000 véhicules supplémentaires pour atteindre l'objectif de 2026, cela représenterait près d'un milliard de dollars de dépenses», a-t-il pointé.
«Ce n'est pas une politique viable.»
Le gouvernement a dépensé près de 3 milliards $ au cours des cinq années de vie de son programme de rabais sur les véhicules électriques.

