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«Peu de pédiatres vont prescrire ces soins.»
En matière d’affirmation de genre, les adultes ont recours aux chirurgies génitales. Les mineurs transgenres non binaires, eux, ont plutôt recours aux bloqueurs d’hormones et à l’hormonothérapie d’affirmation de genre. Pour obtenir ces soins, la liste d’attente est plutôt longue dans les clinique – de quoi en décourager certains.
Seule «une petite proportion des jeunes transgenres non binaires Québec vont avoir accès aux soins et chirurgies d’affirmation de genre», explique la spécialiste Annie Pullen Sansfaçon en entrevue avec Noovo Info en marge de l’édition 2024 du congrès de l’Association francophone pour le savoir (Acfas) qui a lieu cette semaine à Ottawa.
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Selon une enquête effectuée auprès de 220 jeunes transgenres de 14 à 25 ans, 16% d’entre eux ont eu recours à des bloqueurs d’hormones et 51% ont eu recours à des hormones. Chez les 18 ans et moins, ils étaient seulement 32% à utiliser des hormones et 30% à des bloqueurs d’hormones. D’après Mme Sansfaçon, aucune chirurgie génitale n’a été réalisée chez des mineurs au Québec.
Pour avoir recours aux soins d’affirmation de genre à l’adolescence, il faut avoir reçu un diagnostic d’incongruité de genre ou de dysphorie de genre par un professionnel de la santé ou un psychologue, ce qui correspond aux standards de l’Association professionnelle mondiale pour la santé des personnes transgenres.
«La prescription peut être obtenue avant d’entrer dans une clinique d'affirmation de genre», dit la professeure à l’École de travail social de l’Université de Montréal et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en recherche partenariale et empowerment des jeunes vulnérabilisés.
Mais le parcours diffère selon chaque jeune et son stade de puberté.
DOSSIER | Noovo Info à l'Acfas 2024
Alors que certains politiciens, dont la première ministre albertaine Danielle Smith ainsi que Pierre Poilievre, le chef du Parti conservateur du Canada, veulent interdire les bloqueurs de puberté et les chirurgies affirmatives de genres, la professeure espère que le gouvernement du Québec n’emboîtera pas le pas. Toutes les recherches réalisées montrent plutôt «l’importance d'avoir accès à ces soins-là», affirme Mme Pullen Sansfaçon. «Ça serait être très mal avisé» si ces mesures d’ordre «politique» sont appliquées dans la province selon elle.
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D’ailleurs, la conférencière au colloque de l’Acfas déplore que les jeunes n’ont pas accès aux soins dans les cliniques spécialisées «assez rapidement», en raison notamment du temps d’attente qui peut s’allonger jusqu’à plusieurs mois à quelques années.
Certains jeunes ayant un réel besoin de faire la transition peuvent tomber en dépression ou aller jusqu’au suicide en attendant de recevoir des soins. «Plus longtemps on attend, plus cela peut avoir des impacts négatifs sur la santé mentale», a dit Mme Pullen Sansfaçon, en précisant que cela dépend de son stade de puberté.
Pour prévenir ces conséquences négatives, l’appui des parents et des proches est vital pour le jeune, a rappelé Mme Pullen Sansfaçon. Il faut donc, selon elle, miser sur la communication et accompagner le plus possible son enfant, et ce, même si les jeunes québécois dès l’âge de 14 ans peuvent avoir accès aux soins de santé sans l’accord des parents.
Selon les résultats de ses recherches, l’appui moral des parents a un impact positif sur la santé mentale du jeune de manière générale. «Les jeunes ayant un soutien fort sont en meilleure santé mentale que les jeunes qui n’en ont pas», a-t-elle dit.
Même si un jeune réalise sa transition de genre, il peut être isolé de ses amis ou de sa famille. «Même si vous êtes mieux dans votre corps, cela ne veut pas dire que vous allez mieux au niveau de la santé mentale», a prévenu Mme Pullen Sansfaçon. C’est pourquoi tout l’aspect psychologique est donc important à prendre en considération lors de la transition de genre.