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«On ne peut pas continuer comme ça, à attendre des années avant de réviser une formation qui est donnée à autant d'étudiants et d'étudiantes», a dit Maya Labrosse de la Fédération étudiante collégiale du Québec.
La formation générale au cégep est «plate» et doit être mise à jour, affirme la Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ) à l’occasion du 30e anniversaire de l'élaboration de cette formation.
«Les étudiants collégiaux actuels n'étaient pas nés quand on a décidé des devis de la formation qu'ils vivent et pour nous, c'est un non-sens de ne pas adapter la formation avec le temps», lance Maya Labrosse, présidente de la Fédération, au cours d’un entretien avec La Presse Canadienne.
«On ne peut pas continuer comme ça, à attendre des années avant de réviser une formation qui est donnée à autant d'étudiants et d'étudiantes», poursuit-elle.
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La Fédération ne demande pas d’abandonner le cœur de la formation générale, centrée sur la philosophie, la littérature, la langue seconde et l'éducation physique, loin de là. Elle fait toutefois valoir qu’entre 1993 et aujourd’hui, le monde dans lequel évoluent les étudiants collégiaux a drôlement changé, trop pour laisser la formation des jeunes adultes stationnée dans une autre époque.
«La formation de base peut rester, c'est certain, mais il faut la voir sous un autre angle, explique Mme Labrosse. C'est possible de parler de philosophie et de voir les mêmes principes de pensée critique que dans les cours actuels, mais de le voir dans un cours lié à la science, lié à l'intelligence artificielle.
«On est à une ère où on parle beaucoup des technologies et les gens veulent qu'on ait une pensée critique sur la question et les cours de philosophie peuvent justement faire partie intégrante de la question.
«C'est correct que les choses évoluent avec le temps, fait valoir la présidente de la Fédération, et il y a une raison pourquoi on veut que ça évolue; c'est que le reste de la société évolue aussi et on ne peut pas seulement laisser une formation être figée dans le temps et se demander pourquoi les étudiants ne sont pas intéressés.»
Ce n’est d’ailleurs pas une caricature que de qualifier la formation de «plate»: 53 % des étudiants du collégial considèrent la formation générale «inintéressante», selon des données de 2021 citées par la FECQ. Cette statistique a des répercussions sur la réussite et le décrochage, martèle sa présidente. «De ne pas augmenter le pourcentage des gens qui trouvent ça intéressant, on pense que cela a un impact sur la réussite et sur la motivation scolaire.»
La Fédération propose donc, selon les termes de son communiqué, «d’offrir des choix de cours diversifiés pour chacun des domaines de la formation générale, à l'instar de ce qui est déjà en place dans le réseau collégial anglophone. L'objectif est de permettre à la population étudiante de choisir des cours de littérature et de philosophie qui présentent notamment des contenus adaptés à leurs intérêts, tout en dispensant les mêmes compétences essentielles.»
À ces compétences s'ajoutent toutefois de nouvelles réalités qui doivent être intégrées à la formation collégiale, fait-on valoir, notamment «les compétences numériques, l'inclusivité dans les cours d'éducation physique, la place des cours complémentaires dans le parcours».
Quant au cours de littérature, la Fédération ne joue pas à l'autruche et demande de revoir les notions de français écrit dans ces cours car, admet-elle, «la maîtrise du code linguistique est préoccupante au sein de la population étudiante collégiale et devient un frein à la réussite de celle-ci», peut-on lire dans son communiqué, qui souligne au passage que plus de 90 % des profs de l’enseignement général voient les lacunes dans la maîtrise du français comme «un défi dans leur enseignement», euphémisme s’il en est.
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Maya Labrosse estime toutefois, avec raison, qu’il commence à se faire tard au niveau collégial pour s’attaquer à ces lacunes. «Il faut corriger ça en amont. Il y a un travail à faire au niveau du primaire et du secondaire pour améliorer la maîtrise de la langue française dès le primaire.»
Malgré tout, ajoute-t-elle, puisqu’ils n’arrivent pas assez bien formés en français, «il arrive un moment où, au collégial, les étudiants ont une épreuve uniforme de langue à passer qui comprend la grammaire». Et l’institution a le devoir de tout faire pour les mettre à niveau, croit-elle.
D’où le dépoussiérage réclamé en littérature. «Si le travail n'a pas été fait avant, il faut s'assurer que ces étudiants, qui arrivent en épreuve uniforme de langue, soient en mesure de la passer et ça passe par une formation en littérature qui est motivante et qui est intéressante pour la population étudiante si on veut qu'elle arrive après son troisième cours de français au collégial et qu'elle passe son épreuve uniforme avec succès.»
La Fédération et ses associations étudiantes affiliées ont donc souligné avec sarcasme ce 30e anniversaire, d’une part en tenant un party, mais aussi en envoyant des cartes de souhaits aux principaux acteurs décisionnels de l'enseignement supérieur, au premier chef la ministre Pascale Déry.
Dans une missive à La Presse Canadienne, la ministre de l’Enseignement supérieur dit d’abord avoir eu «l’occasion d’en discuter avec la FECQ à la fin janvier, qui nous a partagé son souhait de rendre la formation générale plus attrayante».
Sans faire de promesses, la ministre Déry souligne qu’elle a mis en marche les mécaniques de l’État pour y voir plus clair d’ici la prochaine rentrée scolaire. «Un groupe de travail composé d’enseignants et de conseillers pédagogiques a été mandaté pour justement évaluer ce volet et nous soumettre des recommandations. Nous attendrons les conclusions du rapport, dont le dépôt est prévu à l’été 2023, avant de nous prononcer.»