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Le Tribunal administratif du travail (TAT) du Québec a ordonné à l'Université McGill de cesser de faire obstruction et d'interférer avec un syndicat représentant les professeurs de droit à temps plein.
Le Tribunal administratif du travail (TAT) du Québec a ordonné à l'Université McGill de cesser de faire obstruction et d'interférer avec un syndicat représentant les professeurs de droit à temps plein.
Le tribunal a conclu que l'université semble avoir violé le Code du travail du Québec lorsque son administration a envoyé deux courriels à des professeurs de droit critiquant le syndicat, selon une décision du 30 août.
L'université a envoyé les courriels aux professeurs de droit dans les jours précédant leur vote en faveur d'une grève illimitée coïncidant avec le début des cours.
Le syndicat a démontré que McGill a cherché «à influencer ses membres à la veille d’une assemblée générale». Le tribunal estime aussi que les deux courriels tentaient de «miner la crédibilité du syndicat» à un moment particulièrement sensible. Il a ordonné à McGill d'informer le syndicat avant toute communication future avec les professeurs de droit.
La décision du tribunal est une ordonnance temporaire, une audience complète sur la question étant prévue plus tard ce mois-ci.
Cette décision représente un «tournant remarquable des événements», a réagi le professeur de droit de McGill Richard Janda, qui est le secrétaire et négociateur en chef de l’Association mcgillienne des professeurs de droit (AMPD).
«C’est la première fois que nous avons eu du tribunal une déclaration aussi claire selon laquelle l’université agit de manière antisyndicale et viole la loi», a-t-il commenté.
Les deux courriels contenaient des messages du provost et vice-recteur principal aux études de l’Université McGill, Christopher Manfredi, et du vice-recteur de l’administration et aux finances, Fabrice Labeau. Ils ont été envoyés aux professeurs de droit par le doyen de la faculté, Robert Leckey.
Le premier courriel a été transmis le 21 août et comprenait une explication des raisons pour lesquelles McGill s’était retirée des séances de négociation.
Le tribunal a jugé qu’il contenait «des propos tendancieux qui critiquent l’approche du syndicat».
Un deuxième courriel a été envoyé le lendemain. MM. Manfredi et Labeau ont déclaré qu’ils voulaient corriger un document envoyé par le syndicat à ses membres comparant différents régimes de retraite. Le courriel affirmait que le document du syndicat comporte «de nombreuses erreurs factuelles, des omissions et de fausses représentations».
Une réunion syndicale était prévue pour le 23 août, au cours de laquelle les membres du corps professoral voteraient pour décider s’ils devaient reprendre ou non la grève qui avait débuté au printemps dernier. Le moment de l'envoi des courriels de l’administration de McGill n’était «pas une coïncidence», mentionne M. Janda.
Le tribunal a ordonné à McGill de «de cesser toute forme d’entrave et de ne plus faire d’ingérence dans les affaires syndicales, et ce, d’aucune façon» et de «cesser de communiquer directement avec les membres» du syndicat «autrement qu’avec un compte rendu factuel et neutre».
Dans une déclaration, McGill indique qu'elle se conformera à l'ordonnance provisoire dans l'attente de l'audience qui aura lieu plus tard ce mois-ci.
«McGill est consciente des contraintes qui pèsent sur le discours d'un employeur à l'égard de ses employés syndiqués et estime qu'elle a respecté ces contraintes dans toutes ses communications avec ses professeurs représentés par l'AMPD», peut-on lire.
Malgré les courriels, les professeurs de droit ont voté pour la poursuite de la grève, qui a débuté le 26 août et concerne plus de 40 professeurs. Ils réclament un meilleur salaire et une plus grande participation à la gouvernance de la faculté. M. Janda précise que la préoccupation clé reste le droit des professeurs de se syndiquer.
Le syndicat des professeurs de droit a été accrédité en novembre 2022 par le Tribunal administratif du travail, mais le syndicat n’a pas encore obtenu sa première convention collective. L'université contestera cette accréditation lors d'une audience devant la Cour supérieure du Québec en décembre.
M. Janda croit que l’université tente de retarder les négociations jusqu’à l’audience. Les professeurs ne retourneront pas au travail tant que McGill n’aura pas abandonné sa contestation judiciaire, dit-il.
«Si McGill est prête à abandonner sa tentative de révoquer l’accréditation du syndicat, nous pourrons retourner en classe dans la journée», a avancé M. Janda.
Les professeurs de droit ont mené une grève de deux mois après la fin des cours au printemps dernier, mais cette fois-ci, le syndicat a opté pour une approche plus perturbatrice. Les cours devaient commencer mercredi dernier.
La faculté de droit de McGill est le premier groupe de professeurs à se syndiquer à l'université, bien que la plupart du personnel non enseignant soit syndiqué. Depuis la création du syndicat de la faculté de droit, les professeurs des facultés d'éducation et des arts ont également déposé une demande d'accréditation syndicale.
La lutte des professeurs de droit déterminera «l'avenir de la syndicalisation à McGill», estime-t-il. Selon lui, l'université tente d'étouffer le mouvement.
«L'objectif de McGill ne semble pas seulement être de négocier durement avec nous, mais en fait de vaincre la syndicalisation à McGill et de se comporter de manière à mettre fin à notre existence, a-t-il soutenu. Et nous savons que d'autres facultés surveillent ce qui va se passer.»
Avec la collaboration de Joe Bongiorno de La Presse Canadienne.