Des annonces viendront «dans les prochains jours» dans le but d'aider des entreprises particulièrement touchées par les droits de douane américains, dont celles qui œuvrent dans le secteur de l'aluminium, a signalé jeudi la ministre de l'Industrie, Mélanie Joly.
«Les travailleurs dans le secteur de l'aluminium sont aussi importants que les travailleurs dans le domaine de l'acier, que (ceux) dans le domaine du bois d'œuvre», a-t-elle dit lorsque questionnée sur l'état d'avancement de ses discussions avec des acteurs de l'industrie de l'aluminium, comme Rio Tinto.
Ce secteur, qui est visé par des droits de douane américains de 50 %, n'a pas encore reçu de soutien financier direct du gouvernement fédéral.
Mme Joly, au cours d'une mêlée de presse dans le cadre de la retraite du conseil des ministres à Toronto, a fait valoir que les grands projets d'infrastructure qu'Ottawa veut sélectionner pour les déployer de façon accélérée aideront à répondre à l'imprévisibilité qui freine les entreprises à faire des investissements à plus long terme.
«Présentement, il y a plusieurs investissements dans le secteur de l'aluminium, mais les investissements (prévus) pour les entreprises se font parfois dans des projets de 10, 15 ans et ce sont ces décisions-là stratégiques qui, parfois, sont (sources de questionnement), à savoir est-ce qu'on les prend présentement ou on attend d'investir? Et c'est ça que nous, comme gouvernement, on doit gérer», a-t-elle dit.
Elle s'attend ainsi à ce que certains des grands projets à être identifiés permettent aux entrepreneurs de lever la main et d'«investir dans les dernières technologies» et leurs «actifs» à long terme. Mme Joly a cité en exemple Rio Tinto, Alcoa et ArcelorMittal.
«Il y a une différence aussi entre les grandes entreprises et les plus petites entreprises. Ce qu'on voit, c'est que les petites entreprises sont aussi affectées par cette imprévisibilité-là et donc on doit être là pour les aider», a ajouté la ministre.
Les droits de douane ont fait partie des discussions du conseil des ministres qui se sont conclues jeudi, mais ceux-ci ont aussi dû se concentrer sur le budget, le premier du gouvernement Carney, qui sera présenté cet automne.
«Choix difficiles», mais «c'est normal»
Ottawa se retrouve face à des «choix difficiles», a reconnu le ministre de Finances, François-Philippe Champagne, alors qu'il cherche à trouver des économies de 15 % d'ici 2028-2029 dans des coûts de programmes des différents ministères.
«Les familles font des choix difficiles aussi depuis longtemps, alors c'est normal que, comme gouvernement, on aura des choix difficiles à faire», a-t-il répondu aux journalistes qui tentaient de lui soutirer plus de détails.
Le ministre a reçu les plans et propositions de ses collègues du cabinet et ils discutent des différentes options.
Comme l'a fait le premier ministre Mark Carney, la veille, M. Champagne a plaidé que l'exercice de «rigueur» budgétaire n'empêchera pas le gouvernement d'investir «pour l'avenir, pour bâtir des bases solides pour avoir un Canada prospère, résilient».
Quand une journaliste lui a suggéré que chaque ministre pouvait prêcher pour sa paroisse quand vient le temps d'exempter de l'exercice de coupes des dépenses émanant du ministère dont il est responsable, M. Champagne a répondu que ce point de vue est «tout à fait juste».
«C'est normal, (…) mais je pense que les ministres comme les Canadiens comprennent qu'on est dans un moment historique dans le Canada. C'est un moment de l'histoire - ça arrive une fois par génération, un moment comme celui-là - où il faut faire des choix difficiles pour, justement, se garder de l'espace fiscal pour investir dans l'avenir.»
Pressé de préciser si des mises à pied dans la fonction publique étaient à venir, M. Champagne est resté vague en parlant d'«ajustements», ce qui pourrait aussi vouloir dire une réduction du nombre d'employés par attrition.
Le principal syndicat de fonctionnaires, l'Alliance de la fonction publique du Canada, dénonce déjà le régime minceur. «On a vu les ravages de l’austérité sous Stephen Harper et sous Paul Martin avant lui. Des vétérans privés de soins, des services frontaliers à bout de souffle, des coupes dans le personnel d’inspection des aliments, qui surveille la qualité de ce qu’on mange», a déclaré par courriel la présidente de l'organisation, Sharon DeSousa.
Par ailleurs, M. Champagne a refusé d'éventer toute information sur l'ampleur du déficit, qui, selon des experts, sera plus lourd.
Le ministre et ses collègues ont d'ailleurs eu une présentation jeudi sur les perspectives économiques, donnée par Jean-François Perreault, vice-président principal et économiste en chef de la Banque Scotia.
Un autre panéliste qui était attendu avait attiré l'attention des médias, soit Kevin Roberts, qui est à la tête du groupe de droite influent chez les républicains aux États-Unis ayant écrit le manifeste «Projet 2025».
Jeudi matin, au moment où les ministres s'apprêtaient à amorcer leur deuxième journée de sessions de travail en compagnie de M. Carney, le bureau de ce dernier a indiqué aux médias que le président du groupe en question, Heritage Foundation, n'avait finalement pas pu faire le déplacement à Toronto.
Questionné à savoir s'il aurait été à l'aise d'entendre le point de vue du président de la Heritage Foundation dans le cadre de la retraite du conseil des ministres, M. Champagne a d'abord amorcé une phrase par «ce n'est pas une question de» sans la terminer. Il a finalement choisi une autre formulation.
«Quand vous avez des sessions (de travail), vous voulez différentes perspectives, a-t-il enchaîné. Vous savez, c'est une perspective et je pense que d'entendre quelqu'un sur son point de vue et sur comment il voudrait voir les choses (...) quand vous devez prendre des décisions, c'est toujours bon.»
M. Champagne a ensuite minimisé l'importance de la présence ou non d'un seul invité. «Pour être honnête, il y a beaucoup de choses que nous devons faire aujourd'hui et nous allons nous concentrer sur les gros morceaux», a-t-il conclu en mentionnant le budget, le coût de la vie et l'accès au logement.

