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Selon divers experts, l'un des principaux facteurs à la forte croissance des coûts des projets d'infrastructures en transport collectif, notamment les métros légers, est... la politique.
Par Laura Osman – La Presse canadienne
Bien sûr, on peut y ajouter d'autres causes comme la profondeur des tunnels, la superficie des stations ou les coûts de la main-d'œuvre.
«[La politique] est au cœur de tout cela», résume Stephen Wickens, un chercheur de Toronto.
Selon Alon Levy, un chercheur établi à Berlin, le coût médian pour une ligne de métro était inférieur à 300 millions $ du kilomètre dans le monde en 2019.
Le coût de la construction de la ligne Ontario à Toronto est estimé à 735 millions $ du kilomètre. Celui de la ligne bleue à Montréal ? Environ 775 millions $ du kilomètre. Le coût de la ligne Broadway du SkyTrain de Vancouver semble presque raisonnable à près de 500 millions $ du kilomètre.
Les politiciens de tous les ordres de gouvernement et de tous les partis jouent un rôle dans cette flambée des prix.
Par exemple: la construction d'un tunnel est souvent la méthode qui coûte le moins cher. Or, c'est aussi le plus ennuyeux pour le voisinage. Les conseillers municipaux locaux préféreront d'autres infrastructures afin d'éviter d'irriter leurs électeurs, au risque bien sûr de gonfler la facture.
Il y a environ une décennie, Vancouver avait choisi une méthode moins onéreuse en construisant sa ligne Canada d'une longueur de 19 kilomètres. On avait commencé par creuser une tranchée à hauteur de rue avant de la recouvrir. Si cette méthode permet d'épargner beaucoup d'argent, elle est aussi synonyme de controverse, de perturbation et même de poursuite judiciaire.
«Les gens en gardaient un si mauvais souvenir que les autorités municipales se sont engagées à construire une ligne complètement souterraine pour le projet Broadway, même si le prix est d'environ 500 millions $ du kilomètre, soit 4,5 fois plus la somme investie pour la ligne Canada», a écrit M. Wickens.
Les promesses des politiciens obligent aussi les gouvernements à payer plus cher. En 2019, une étude de l'Institute of Municipal Finance and Governance concluait que des considérations politiciennes prenaient souvent le pas sur les faits lorsque vient le moment de prendre une décision.
«Quel ingénieur d'un rang inférieur oserait dire qu'on n'a pas besoin d'un tel projet ou oserait demander de diminuer la superficie d'une station ou oserait recommander à un élu de rompre une promesse parce que celle-ci ajouterait 500 millions $ à la facture?», mentionne M. Levy à La Presse canadienne.
M. Levy et d'autres chercheurs en aménagement urbain de l'Université de New York ont estimé que le prix des infrastructures était supérieur au Canada, au Royaume-Uni, en Australie et aux États-Unis qu'en Italie, en Espagne ou en France.
Marco Chitti, un chercheur associé établi à Montréal, juge que l'expertise technique manque souvent aux villes et aux provinces canadiennes pour superviser un projet. Il cite l'exemple de l'Italie où souvent des fonctionnaires-experts élaborent les projets détaillés avant de les soumettre aux élus.
Selon lui, pour arriver à réduire les coûts des projets de transport collectif, il fait que les autorités reconnaissent l'existence d'un problème.
«La majorité des politiciens canadiens ne croient pas qu'il existe un grave problème au pays, un gros problème sur les coûts, soutient-il. J'espère que d'ici quelques années, on parlera plus au Canada de l'explosion des coûts qui deviennent vraiment hors de contrôle.»