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L'année dernière, alors qu'il n'était encore que «simple» prince de Galles, le roi Charles III avait ouvert, au nom de sa mère, le sommet des chefs de gouvernement du Commonwealth, au Rwanda, en présentant notamment le Canada comme un exemple à suivre pour le monde.
Dans son allocution d'ouverture qui portait sur la relation entre les pays du Commonwealth et la Couronne — et sur les racines de cette organisation, profondément ancrées dans la traite des esclaves africains —, le prince saluait l'engagement du Canada pour une réconciliation avec les peuples autochtones.
«Aussi difficile que puisse être cette conversation, les gens de partout au Canada l'abordent avec courage et un engagement inébranlable, déterminés à jeter les bases du respect et de la compréhension sur lesquels un avenir meilleur peut être construit, déclarait-il. Il me semble qu'il y a des leçons à en tirer pour notre famille du Commonwealth.»
En plus de 50 ans de voyages au Canada en tant que prince, Charles a souligné un lien avec le Canada qui remonte à des décennies, comprenant des visites officielles, des voyages en famille et de brèves escales pendant son service militaire. Mais alors que le couronnement de samedi marque la dernière étape de la succession de sa mère, la reine Elizabeth II, Charles devra forger une nouvelle relation avec le pays, cette fois en tant que souverain.
Plus récemment, en mai de l'année dernière, le roi Charles et Camilla, la reine consort, sont venus au Canada dans le cadre des célébrations du jubilé de platine de la reine, alors qu'ils étaient encore prince de Galles et duchesse de Cornouailles. La tournée de trois jours était axée sur les changements climatiques, l'alphabétisation et les efforts de réconciliation avec les peuples autochtones.
Cette tournée du jubilé avait débuté à Saint-Jean, Terre-Neuve-et-Labrador, par un moment solennel de réflexion sur les morts dans les pensionnats fédéraux, et s'est terminée dans le Grand Nord par une rencontre avec les leaders autochtones sur les changements climatiques.
Le prince Charles s'était dit profondément ému par les conversations avec des survivants des pensionnats, qui avaient courageusement partagé leur vécu. «Je tiens à reconnaître leurs souffrances et à dire à quel point nous sommes de tout cœur avec eux et leurs familles», a-t-il déclaré lors de cette visite que certains ont qualifiée de pas en avant dans les relations Couronne-Autochtones.
Des experts de la monarchie estiment que le nouveau roi fait néanmoins face à un défi de taille pour s'établir dans un pays qui est devenu sceptique à l'égard de la Couronne britannique — et dans un rôle qui a été si inextricablement lié à sa mère, dans l'esprit de nombreux Canadiens.
Et bien que le roi Charles ait fait un effort clair pour dialoguer avec les Autochtones – il aurait même tenu à ce qu'ils soient invités à son couronnement samedi –, ses discours au Canada ont soigneusement évité les excuses que certains dirigeants autochtones espéraient.
Le désir du roi Charles d'une monarchie «allégée» et ses nouvelles fonctions de monarque pourraient signifier que ses futures tournées au Canada pourraient devenir plus courtes ou plus rares, ce qui pourrait rendre difficile l'établissement de liens forts.
La relation du roi Charles III avec le Canada remonte à sa première visite officielle en 1970, qui comprenait une tournée au Manitoba et dans les Territoires du Nord-Ouest, avec d'autres membres de la famille royale. Lors de ses plus récentes visites, il a été accompagné de Camilla, dont il a mentionné la lointaine ascendance canadienne.
«Chaque fois que je viens au Canada (...) un peu plus du Canada s'infiltre dans ma circulation sanguine — et de là directement dans mon cœur», lançait-il à la foule réunie à Terre-Neuve en 2009.
Ces visites officielles ont souvent comporté des séances de photos et des cérémonies officielles auxquelles le public canadien s'attend de la part de la famille royale. Ainsi, lors de son dernier voyage, le prince Charles a participé à une danse du tambour déné à Yellowknife, ou servi des pintes de bière à Terre-Neuve-et-Labrador.
Mais ces visites ont aussi abordé des sujets plus sérieux. Au fil des ans, les voyages princiers au Canada comprenaient souvent des événements et des conversations centrés sur le changement climatique – un sujet qu'il aborde de plus en plus directement.
À Ottawa, l'année dernière, le prince de l'époque avait exhorté le Canada à user de son «influence incroyable» au G7 et dans d'autres forums internationaux pour trouver des solutions à la crise du climat et de la biodiversité.
«J'essaie de rassembler des gens du monde entier sur l'environnement durable depuis quelque chose comme 40 ans maintenant – c'est terriblement long, avait-il déclaré. Maintenant, après une procrastination interminable, le temps presse. Donc, avec des billions de dollars d'actifs, le secteur privé et la haute finance détiennent la clé ultime, je crois, de notre succès.»
Le roi Charles a effectué plusieurs visites dans le Nord canadien, où il a été notamment très ému par la «beauté incomparable» des aurores boréales, lors d'une visite à Whitehorse, qu'il a essayé de les capturer dans une peinture.
Plus récemment, il s'est particulièrement intéressé aux efforts visant à préserver la langue et la culture inuites, notamment en invitant un groupe inuit à se rendre au Pays de Galles en 2016 pour discuter des efforts visant à normaliser le système d'écriture de l'inuktitut.
Son couronnement devrait être moins somptueux que celui de sa mère, il y a 70 ans, et inclure plus de gens de divers horizons. La cérémonie comprendra pour la première fois la participation active de religions autres que l'Église d'Angleterre, et permettra aussi de voir pour la première fois des femmes évêques. On prévoit aussi des hymnes et des prières chantées en gallois, en gaélique écossais et en gaélique irlandais.
Après le couronnement de Charles III, le traditionnel «hommage des ducs et duchesses» sera remplacé par un «hommage du peuple», dans lequel les gens rassemblés dans l'abbaye de Westminster et les téléspectateurs seront invités à affirmer leur allégeance au nouveau roi.
Des observateurs de la monarchie estiment que les premiers mois de Charles III sur le trône ont fait voir un monarque qui jouera un rôle actif dans les causes et qu'il était prêt à dialoguer avec la population, mais il a encore du travail à faire pour convaincre les Canadiens sceptiques.
Un sondage publié en mars par la firme Léger a révélé que 67 % des Canadiens interrogés étaient indifférents au roi, contre seulement 12 % qui ont dit que c'était bien qu'il soit monarque — 7 % au Québec.
Seulement 13% des Canadiens interrogés ont déclaré ressentir un attachement personnel à la monarchie, et plus de la moitié (56 %) ont déclaré que le moment était venu pour le pays de reconsidérer ses liens avec cette institution; au Québec, ce chiffre atteint 71 %.
Le fils aîné de la reine Elizabeth II et du prince Philip est né en 1948 au palais de Buckingham, et il a été proclamé héritier à l'âge de trois ans lorsque sa mère a pris le trône. Après avoir obtenu son diplôme universitaire en 1970, il a suivi une formation de pilote militaire, qui comprenait un passage à la base de Gagetown, au Nouveau-Brunswick, où il s'est entraîné «dans une zone d'exercice au milieu de nulle part», dira-t-il plus tard.
À 74 ans, Charles est la personne la plus âgée à accéder au trône britannique.